La Lettre de ToutEduc n°228
Paru dans La lettre le mercredi 03 septembre 2014.
Transférer et photocopier nuit gravement à la santé ... de la presse *
La Lettre de ToutEduc n°228, du 3 septembre 2014
A LA UNE. Najat Vallaud-Belkacem garde le directeur, le directeur adjoint et le chef de cabinet de B. Hamon, et affirme ainsi son souci de continuité.
Le CNESCO fait un premier point sur le redoublement. L'IFE propose un dossier sur l'évaluation des élèves. L'INSEE montre combien l'environnement social joue sur les retards scolaires...
Des informations à retrouver ci-dessous, si vous ne les avez pas reçues en temps réel, au fur et à mesure de leur publication. L'analyse porte la proposition, par J-M Blanquer d'une autre politique scolaire. Les titres de cet été ici.
LA RENTREE SCOLAIRE
"La rentrée devrait bien se passer" affirme la ministre de l'Education nationale qui fait un tour d'horizon des dossiers en cours (lire l'article). Avec François Hollande, Najat Vallaud-Belkacem inaugure un collège numérique (lire l'article).
Quelques réactions et prises de position syndicales et associatives (lire l'article).
Thierry Braillard fait sa rentrée avec "Sport sans frontières" dans une école d'Issy-les-Moulineaux (lire l'article).
"service-public.fr" ouvre un portail avec tout ce qu'il faut savoir pour la rentrée (lire l'article).
LE SYSTEME SCOLAIRE
Jean-Michel Blanquer, ancien DGESCO, propose un programme pour l'Ecole ("L'Ecole de la vie", Odile Jacob) (lire l'article).
PEDAGOGIE
Quelles sont les alternatives au redoublement ? quelles sont ses fonctions ? Le CNESCO et l'IFE organisent une conférence de consensus (lire l'article).
Evaluation, notation ... Comment les utiliser au mieux pour favoriser les apprentissages ? Un dossier de l'IFE (lire l'article).
La plate-forme de la Khan Academy en version française est en ligne depuis hier 2 septembre (lire l'article). Elle s’enrichit de milliers d’exercices dans les matières scientifiques. (lire l'article).
Sports et enseignement scientifique : le rectorat de Poitiers exporte son savoir faire au Chili (lire l'article).
Ludovia Magazine rend compte de l'université d'été, et dit comment la révolution numérique sert l’innovation pédagogique (lire l'article).
Bicentenaire de la naissance de Don Bosco: les Salésiens rappellent son message, "sans confiance, pas d'éducation" (lire l'article).
LES ENSEIGNANTS
Le SNES inquiet d'une rentrée sociale et scolaire "sous tension" (lire l'article).
Pour la FNEC-FO, une rentrée difficile dans un contexte de "politique d’austérité aggravée" (lire l'article).
Enseignement professionnel : un profond malaise (SNUEP - FSU) (lire l'article).
Jean-Paul Brighelli donne à voir le fond de sa pensée ("Tableau noir") (lire l'article).
ETABLISSEMENTS
La mise en concurrence des établissements favorise la ségrégation sociale, pas leurs performances (PISA à la loupe) (lire l'article).
"Les bibliothèques scolaires doivent devenir des agitateurs de pédagogie", affirme Cl Bisson-Vaivre à l'IFLA (lire l'article).
Biométrie : une pétition contre l'interdiction de la reconnaissance du contour de la main dans les cantines (lire l'article).
ELEVES
Retard scolaire, origine sociale des élèves et influence du voisinage, une étude de l'INSEE (lire l'article).
Questions de genres : "de quoi l'enfer scolaire est pavé" (1er congrès de l'Institut du genre) (lire l'article).
JEUNESSE
Patrick Kanner : réaffirmation de la priorité à la Jeunesse (lire l'article).
Idées suicidaires chez les moins de 16 ans : d'abord les relations conflictuelles avec les pairs (lire l'article).
SENEGAL
Le Sénégal organisait des assises de l'éducation, qui dégagent un consensus pour "une école de la réussite" (lire l'article) tandis que le président veut réorienter l'enseignement vers la voie professionnelle, et réhabiliter l'enseignement traditionnel (lire l'article).
TEXTES OFFICIELS
Au JO du 29 août au 3 sept. Les cabinets de N. Vallaud-Belkacem, de C. Taubira et de F. Hollande, les élections professionnelles (lire l'article).
Au JO du 27 et du 28 août: important mouvement de DASEN, la PJJ, le CNEFOP, un BEP, un bac pro... (lire l'article).
ANALYSE. Le livre de Jean-Michel Blanquer est l'un des évènements majeurs de cette rentrée. La succession des ministres, les "réformes Peillon" et les "accommodements Hamon" occupent le devant de la scène depuis deux ans et demi maintenant, et le tourbillon de l'actualité fait oublier la période précédente, dont l'opinion risque de ne retenir que la suppression du samedi matin et le non-remplacement d’enseignants partis à la retraite. L'ancien directeur de l'enseignement scolaire a été l'un des principaux acteurs du ministère Robien, dont il était directeur adjoint du cabinet, avant d'être recteur de Créteil puis le "numéro 2 du ministère". ToutEduc vous propose un compte-rendu détaillé de "L'école de la vie" (lire l'article), mais cet ouvrage pose aussi des questions sous-jacentes.
L'auteur ne se veut pas partisan. Tout comme Josette Théophile, autre directrice générale du ministère, appelée par Luc Chatel à la gestion des ressources humaines et renvoyée après les élections de 2012 (lire ici), Jean-Michel Blanquer pense avoir agi pour le bien commun, sans idéologie. Il se présente comme un militant, non d'un parti politique, mais de la cause de l'Ecole; quoi qu'il en dise, il prend souvent un malin plaisir à décocher quelques flèches à ses adversaires d'alors, une partie de l'inspection générale, les syndicats, les sciences de l'éducation, les journalistes...
Il n'assume pas la responsabilité de tout ce qui a été fait à l'époque, par exemple la suppression du samedi matin, et n'apparaît comme un "sarkozyste". Mais nul doute que les électeurs de droite trouveront dans ce livre matière à espérer qu'une alternance se traduise par une politique scolaire cohérente, et en cela, l’ouvrage rappelle la démarche récente d'un François Fillon (voir ToutEduc ici). Bien des propositions devraient leur plaire, qu'il s'agisse des méthodes de lecture ou de l'autonomie des établissements. De plus, une formule du type "nous ne devons pas avoir peur d'enseigner le 'roman national' à nos enfants, dans la grande tradition de Michelet", leur ira droit au coeur.
Mais cet ouvrage pose une autre question, fondamentale. Pour Jean-Michel Blanquer, toute politique doit se fonder sur les acquis de la science, à condition que celle-ci soit neutre, objective. Les IRM ne sont ni de droite, ni de gauche, et l'imagerie médicale permet de comprendre comment fonctionnent nos cerveaux. Est-ce certain ? Admettons que ce le soit, et que les mathématiques, la physique, la biologie sont de même à l'abri de toute idéologie. Le sont-elles encore lorsqu'elles sont "appliquées", quand elles servent à prédire les cours de bourse, à fabriquer des armes ou des OGM ? Qu'on soit pour ou contre le capitalisme, la guerre ou les manipulations génétiques, ces exemples illustrent la distance entre le laboratoire et l’exploitation industrielle des brevets. Peut-on faire l'économie de cette distance entre l'activation d'une série de neurones et une méthode de lecture, entre des résultats de la recherche fondamentale et les instructions qui imposeraient la méthode syllabique et les pédagogies "explicites".
L'auteur se méfie des sciences de l'éducation. C’est qu’elles sont souvent décevantes, elles ont davantage pour fonction de poser des questions que d’apporter des certitudes. Elles ont pourtant produit quelques données positives, comme celle-ci, résumée par Bernard Charlot dans une formule, "les expériences réussissent toujours". Contrairement à la paillasse du chimiste, la classe est un lieu d'interactions multiples, où nul ne maîtrise l'ensemble des paramètres, et certainement pas l'enthousiasme de l'enseignant expérimentateur, convaincu de l'intérêt d'une méthode à laquelle il a été parfaitement formé. A l'inverse, il convient de se méfier des statisticiens qui prétendent tirer des conclusions de l'utilisation d'une même méthode par un très grand nombre d'enseignants, car ils ignorent jusqu'à quel point elle a été transformée par des praticiens qui l'ont "mise à leur sauce". C’est l’un des reproches adressées à la recherche américaine lorsqu'elle fait la louange des pédagogies "explicites". Lorsqu'il s'agit d'éducation, les biais "idéologiques" sont innombrables.
L'idéal de Jean-Michel Blanquer se heurte à une autre difficulté. L'Ecole est le lieu où une société prépare son avenir. C'est donc le lieu de toutes les passions. Nous projetons nos idéaux sur nos enfants, et nos rêves seront toujours plus puissants que la raison. Quand bien même des vérités "scientifiquement reconnues" permettraient d’édicter de "bonnes pratiques", elles seraient inaudibles et le politique ne devrait les imposer qu'avec d'infinies précautions.
Cela ne signifie pas qu'il doive renoncer à faire évoluer le système scolaire, ni que celui-ci soit condamné à subir avec chaque alternance des mouvements contraires, ce qui fait qu’il laisse de facto à chaque enseignant la liberté de faire au mieux, ou au moins mal, en attendant qu’un nouveau ministre annule les mesures prises par son prédécesseur. Les résultats de la recherche internationale sont très clairs. Les systèmes qui réussissent ne sont pas ceux qui imposent de "bonnes méthodes", mais ceux où les enseignants se sentent soutenus et où ils ont l’occasion de réfléchir avec leurs pairs et avec la direction de leur établissement au sens de leur action. C'est ce que peuvent favoriser les ministres qui se succèdent rue de Grenelle.
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