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Enseignement professionnel : un profond malaise (SNUEP - FSU)

Paru dans Scolaire, Orientation le vendredi 29 août 2014.

"Colère", "résignation", "souffrance". Les termes employés pour décrire la situation morale des professeurs des lycées professionnels par le SNUEP sont durs. Pour le syndicat FSU de l'enseignement professionnel, "la réforme du bac pro en 3 ans" est un échec. Elle se traduit bien par une augmentation du nombre des bacheliers, mais celle-ci n'est que l'effet mécanique de la suppression des BEP. "Le nombre des diplômes délivrés n'augmente pas." Et les entreprises ne sont pas dupes, elles dénoncent "la dévalorisation du diplôme", puisqu'à l'année perdue avec le passage de 4 à 3 ans, s'est ajouté un allongement des stages en entreprise. Egalement en cause, le CCF qui est chronophage et prend encore sur le temps d'enseignement. Le contrôle en cours de formation est de plus l'occasion de pressions sur les enseignants pour qu'ils montent leurs notes.

Autre cause de la colère des PLP (professeurs de lycées professionnels), le sentiment d'être les oubliés de la réforme du statut. Ils ne bénéficient pas d'heures de pondération comme les professeurs des collèges en éducation prioritaire et ne savent pas comment certains lycées seront intégrés aux "REP", s'ils le sont... Ils demandent "l'équité entre les filières". Ils éprouvent ce même sentiment d'injustice quand ils pensent à leurs collègues qui viennent de réussir les concours, et qui, pour les deux-tiers d'entre eux, ne bénéficieront pas "du mi-temps de formation" parce qu'ils ont déjà une expérience professionnelle. "Ces inégalités de traitement sont inacceptables".

Absence de projet politique

Les 3 co-secrétaires généraux du SNUEPMais leur malaise est plus profond. Ils ont le sentiment que les ministres qui se sont succédé "n'ont pas de projet pour l'enseignement professionnel", même si Najat Vallaud-Belkacem, qui a déjà reçu les responsables du syndicat, semble vouloir "faire remonter le dossier dans la pile". Le discours politique valorise l'apprentissage. Or celui-ci s'inscrit dans un marché du travail tendu. Alors que le service public reçoit tous les élèves, les employeurs recrutent peu et de préférence des "garçons blancs issus des milieux les moins défavorisés". L'apprentissage est "classiste, sexiste, raciste", résume Sigrid Gérardin, co-secrétaire générale. Les entreprises hésitent de plus à recruter pour des durées longues, et il arrive qu'elles ferment leurs portes en cours de contrat. D'où les efforts de l'administration pour implanter des sections d'apprentissage dans les lycées qui voient les élèves passer de l'un à l'autre, sous statut scolaire la première année, voire la seconde, et sous contrat de travail ensuite. Outre la difficulté pour un enseignant de gérer dans le même groupe des élèves placés dans des situations différentes, c'est son identité même qui est mise à mal. Il vise une adéquation moins étroite à l'emploi, mais une culture générale et professionnelle plus large, qui permet aux élèves de rebondir, et qui a pour ambition à leur émancipation. Le Gouvernement envisage pourtant une campagne de promotion de l'apprentissage, pas de l'enseignement professionnel.

S'ajoutent à ces difficultés générales des questions et des inquiétudes plus ponctuelles. Lors de la conférence sociale au mois de juillet a été évoquée la nécessité d'ancrer davantage les diplômes dans la réalité et donc de les redéfinir plus rapidement. Mais pour le SNUEP, le vrai problème est l'accompagnement des enseignants lorsque les diplômes et les programmes sont réformés. La fusion des sections comptabilité et secrétariat dans le cadre de la réforme du bac pro a abouti à la disparition de la comptabilité et à la multiplication des évaluations, au point que les temps d'enseignement disparaissent. Le syndicat perle d'un "Seveso" et indique que le ministère a lui-même saisi le CHSCT (comité d'hygiène et de sécurité), alerté par les signes de souffrance au travail des enseignants de cette section. Autre discipline en difficulté, les "biotechnologies", qui ne font pas le plein lors des concours. Couvrant un champ de connaissances très vastes, les épreuves sont particulièrement difficiles et débouchent notamment sur l'enseignement de PSE (prévention santé environnement) à raison d'une heure par semaine, donc de 18 classes pour le professeur. La réforme envisagée de l'enseignement adapté, les SEGPA et les EREA, provoque également des inquiétudes, tout comme la diminution des redoublements au collège: les élèves sont plus jeunes, moins autonomes, moins capables de tenir leur place lors d'un stage en entreprise, ou même de s'y rendre, faute d'avoir le permis.

 

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