La Lettre de ToutEduc n°219
Paru dans La lettre le mercredi 02 juillet 2014.
Transférer et photocopier nuit gravement à la santé ... de la presse *
La Lettre de ToutEduc n°219, du 2 juillet 2014
A LA UNE. Benoît Hamon voulait que l'Education nationale participe à la "grande conférence sociale". Vous trouverez ci-dessous ce qu'il en attend.
Les concours exceptionnels 2014 ne font pas le plein. Le malaise des enseignants est grand, souligne de plus l'UNSA.
Les "colonies de vacances" représentent un choix éducatif pour les familles.
L'analyse se fonde sur trois publications et une université d'été de cette semaine et montre qu'on assiste à une mise en cause de la légitimité même de l'école. Elle ne date pas d'hier, mais l'épisode des ABCD montre combien la question, que l'on pensait derrière nous, est vive.
Des informations à retrouver ci-dessous, si vous ne les avez pas reçues au fur et à mesure de leur publication.
TERRITOIRES
Ecole, collectivités, projets éducatifs de territoires, numérique... Un malaise (Université d'été de PRISME) (lire l'article).
Le Val d’Oise investit dans le journal scolaire numérique (lire l'article).
Les députés votent en commission la restriction des pesticides près des écoles (lire l'article).
Accident au cours d'une séance d'EPS : la collectivité est responsable du matériel (CAA de Nantes) (lire l'article).
La suppression de la gratuité des cantines au Pontet (Vaucluse) votée par la majorité FN (lire l'article).
Des ordonnances pour la loi d'orientation à Mayotte, en Polynésie et Nouvelle Calédonie, et pour la suppression de certaines compétences du CSE et des CAEN (Conseil des ministres) (lire l'article).
Espaces scolaires: Un appel à articles pour un numéro thématique d' "Espace et Société" (lire l'article).
PEDAGOGIE
Les pédagogues chinois et indiens nous obligent à repenser les finalités de l'éducation, un ouvrage d'A. Trouvé (lire l'article).
D. Paget s'interroge sur le caractère démocratique de l'élaboration des programmes d'enseignement (lire l'article).
Le CESE préconise une formation des élèves au handicap dans le cadre de l'éducation civique (lire l'article).
L’UNICEF France lance "Droits dans l’école" (lire l'article).
Evaluation des élèves: les réactions du SGEN, du SE, du SNES, du SNALC, de J-C Carle, d'E. Ciotti et du FN (lire l'article). Les trois quarts des Français sont contre la suppression des notes à l'école (lire l'article).
DNB: "Une scène jouée dans la mémoire" de Charlotte Delbo à l'épreuve de français (lire l'article).
ENSEIGNANTS
Concours exceptionnels : les postes non-pouvus aux CAPES, CAPET et CAPLP (lire l'article).
Un enseignant peut-il fouiller dans les affaires de ses élèves ou apprentis ? Non mais... , estime la CAA de Douai (lire l'article).
Institut catholique de Paris: François Moog est élu doyen de l'Institut supérieur de pédagogie qui annonce la mise en oeuvre du master MEEF (lire l'article).
Les personnels ne sont pas d'accord avec les choix politiques faits dans l'Education nationale, selon une enquête de l'UNSA (lire l'article).
ORIENTATION - INSERTION
Conférence sociale : les thèmes qui seront abordés à la table "éducation" (lire l'article). La FNEC (FO) n'y participera pas (lire l'article).
France Stratégie propose de diviser le nombre de décrocheurs par trois (lire l'article) et calcule avec la DARES que 800 000 postes seront à pourvoir chaque année d'ici 2022 (lire l'article).
Les missions locales reçoivent de plus en plus de jeunes, mais ceux-ci trouvent de moins en moins de débouchés (lire l'article).
Décrochage: Les zones à risques sont situées dans les académies de Lille, Montpellier ou Créteil (DEPP, CEREQ) (lire l'article).
Le Parlement vote la loi encadrant davantage les stages (lire l'article).
POLITIQUE
"Ma démarche profite de ma méconnaissance de certaines chasses gardées au sein du ministère", déclare Benoît Hamon au Sénat (lire l'article).
La ministre de l'Education nationale est "très fier de porter, au nom du gouvernement" la généralisation de l'éducation à l'égalité filles-garçons (lire l'article). Les réactions de la Ligue de l'enseignement, de J-C Carle, de C. Coutelle, de F. Belghoul, de la FCPE à l'annonce de la fin de l'expérimentation des ABCD (lire l'article).
LOISIRS
Centres de loisirs et colonies de vacances : un choix éducatif pour les familles (JPA), et des centaines d'initiatives pour les Francas (lire l'article).
ETRANGER
Afrique : une femme nommée "secrétaire exécutive" de l'ADEA (lire l'article).
AU JO
Au JO du 26 au 29 juin : les AESH, les ESPE, le bac pro, T. Rey, le CSE et les CAEN, la refondation à Mayotte, des titres professionnels, le privé HC (lire l'article).
A l'agenda cette semaine (ici)
Le mercredi 02 juillet 2014 à Échirolles (38), "Relation École-Famille : Construire une confiance réciproque pour mieux (s') apprendre" (FNAREN).
Du 2 au 4 juillet à Pau, Congrès de l'AGEEM, association des enseignants des écoles maternelles publiques.
Le 23 septembre à Bobigny, Restitution de l'étude sur la scolarité des enfants confiés à l’aide sociale
Les 15 et 16 octobre à Rennes, 9ème édition des Rencontres nationales de l'éducation
Le 6 novembre à Charleroi, "L'Ecole bientôt hors jeu ?"
ANALYSE. Quatre questions de fond pour ne pas "bronzer idiot" cet été nous sont posées par l'actualité de cette semaine, la première par Denis Paget, la seconde par Confucius et Lao-Tseu, la troisième par les ABCD de l'égalité, la quatrième par Alain Bollon, lors de l'université d'été de PRISME. Aucune n'a de réponse évidente.
"La question de savoir comment on associe les citoyens, les usagers de l'école et les professionnels de l'éducation reste entière", constate d'abord Denis Paget. Membre du CSP (conseil supérieur des programmes), ancien co-secrétaire général du SNES, il signe dans le dernier numéro de la revue du SNPI (le syndicat FSU de l'inspection) une défense et illustration du projet de socle commun dont il est l'un des auteurs, mais à cette occasion, il s'interroge, et c'est bien le moins, sur la légitimité du CSP, une interrogation qui peut être étendue à l'ensemble des instances qui font la politique de l'éducation. Les programmes d'enseignement ne peuvent être soumis à la délibération du Parlement sans devenir un enjeu politicien, et ils ne peuvent davantage être confiés à l'Inspection générale ou à un collège d'experts sans "privilégier la vision de quelques uns", et, ajouterons-nous, sans que les intérêts et les passions ne prennent les habits de la rationalité. On sait que de leur rédaction dépend leur étendue et leur orientation, donc le nombre d'heures pour chaque discipline et une vision du monde. Idéologies et corporatismes mènent de sourds combats. Ils sont légitimes. Chacun est en droit de défendre ses intérêts, et son point de vue. Histoire des grands hommes, ou histoire des sociétés, analyse des systèmes économiques et sociaux ou étude de l'économie des entreprises, exercices d'admiration ou analyse scientifique des oeuvres littéraires, mathématiques formelles ou appliquées ? Les réponses à ces questions emportent avec elles bien plus qu'un problème technique au sein d'une discipline. A qui revient-il de trancher ? Comment organiser, sur de tels sujets, le dialogue entre la société et son école ? A moins de considérer que l'Ecole est souveraine, et décide seule. Mais qui est l'Ecole ? Le ministre ?
Alain Trouvé publie une étonnante recension des grands principes des pédagogues chinois et indiens. Pour les seconds, les Tagore et Aurobindo, nous les connaissions déjà un peu en Occident. Ils ont réagi à la violence institutionnelle de l'Ecole britannique, et ils ont, peu ou prou, inspiré les mouvements libertaires occidentaux de la fin des années 60. On ne peut les lire sans penser aux "Libres enfants de Summerhill", une autre réaction à un modèle rigide et puritain. Il en va tout autrement de Confucius, Mencius et Lao-Tseu, des contemporains des philosophes grecs de l'antiquité. Voici quelques formules prélevées dans "Pédagogues de l'Asie". "Savoir qu'on sait quand on sait et savoir qu'on ne sait pas quand on ne sait pas, c'est la vraie connaissance." La parole du maître "vise à féconder, plutôt qu'à persuader". "Rompre avec l'étude, c'est supprimer les soucis." Pour eux, et sans prétendre résumer en trois lignes des siècles de sagesse, le but de l'éducation n'est pas la transmission des connaissances, celle-ci n'est au mieux qu'un moyen, au pire un obstacle à la construction de l'individu. Et de quel droit un maître peut-il prétendre imposer une morale ?
Depuis le VIème siècle avant notre ère au moins, la même question hante donc tous les débats pédagogiques : quel est le fondement de la légitimité de celui qui enseigne comme de ce qu'il enseigne ? Elle était peut-être un peu oubliée en France. Elle est revenue brutalement sur le devant de la scène avec la contestation des "ABCD de l'égalité". Comme l'écrit l'inspection générale, "les professeur(e)s n’auraient jamais imaginé que des parents puissent voir l’école comme source de danger, jamais pensé qu’on puisse suspecter l’école – et eux en même temps – d’avoir un projet organisé qui les autoriserait à attenter à la pudeur des enfants, à violer leur intimité, à intervenir sur leur sexualité, à manipuler leur conscience (...) L’école n’a pas ou n’a plus de légitimité intrinsèque."
Mais, comme le dit Alain Bollon, après J. Habermas et M. Serres, "notre génération est peut-être la dernière à avoir la prétention à éduquer la suivante", puisque les enfants d'aujourd'hui apprennent "autrement" et que le savoir est à portée de clic.
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