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L'Ecole peut-elle répondre à "une très forte demande sociale d'enseignement religieux"? (IESR/ministère)

Paru dans Scolaire, Culture le mardi 25 septembre 2012.

 "La connaissance du fait religieux est une dimension essentielle de l'épanouissement personnel du jeune: tous les systèmes éducatifs doivent lui faire une place." A l'occasion d'un colloque de l'IESR (Institut européen en sciences des religions), Carole Reich, représentante du Conseil de l'Europe, a rappelé l'importance du traitement scolaire des faits religieux. "Ce sujet est partiuclièrement important aujourd'hui, dans un cadre de doutes et d'interrogations sur l'enseignement des faits religieux dans un cadre laïque", confirme Johanna Barasz, conseillère du ministre de l'Education.

Elle note "une très forte demande sociale d'enseignement religieux, qui se double d'une interrogation sur la légitimité de l'école à aborder ce champ". Les enseignants se heurteraient parfois à des réactions hostiles d'enfants et de familles qui refusent que l'école se saisisse de leurs croyances.

Laïcité d'incompétence, laïcité d'intelligence

Selon la conseillère technique, on ne peut traiter ce malaise qu'à travers "une réaffirmation de la laïcité". C'est le rôle que devrait remplir l'enseignement de "morale laïque" proposé par Vincent Peillon (voir ToutEduc La "morale laïque" n'est pas l'ordre moral (V. Peillon au JDD)): il s'agit une morale "commune, qui s'impose à la diversité des confessions religieuses".

L'enseignement de la laïcité prendra-t-il en charge un enseignement du "fait religieux" en tant que tel ? En mai 2010, dans un numéro de la revue Le Sociographe, Frédérique Sicard, docteur en sociologie, regrettait que l’école "abandonn[e] ses élèves dans leur quête spirituelle et identitaire", au nom d’une laïcité  "mal comprise". Elle estime que la lutte contre les communautarismes implique de mieux prendre en compte les croyances dans un cadre laïc. L'une des missions de l'école serait "d'aider les élèves à donner du sens aux cultes, ce qui suppose de former les enseignants aux faits religieux".

Pour Joanna Barasz, l'enseignement scolaire du fait religieux a justement été l'occasion de "mieux comprendre" la notion de laïcité. Il suit les préconisations d'un rapport paru en 2002, qui a permis de passer "d'une laïcité "d'incompétence" à l'égard des religions, à une laicité "d'intelligence" visant à se saisir du fait religieux pour mieux le comprendre".

Recommandations

Comme le rappelle une étude Européenne sur l'Ecole, les jeunes et la religion (voir Touteduc Les jeunes, l'école et la religion. (étude européenne).), la France est l'un des rares pays de l'UE où l'étude des religions est exclusivement abordée à travers les disciplines scolaires. Conformément aux préconisations du rapport de Régis Debray, les faits religieux s’inscrivent dans le cadre normal d’acquisition et de transmission des connaissances à l’école : ils ne peuvent pas bénéficier d'un traitement particulier. 

La représentante du ministère assure que le cours de "morale laïque" ne contreviendra pas à ces préconisations. Autrement dit, il ne devrait pas inclure d'étude des religions en tant que telles. "Les faits religieux ont djà une place importante dans les programmes : histoire, philosophie, arts abordent largement le fait religieux dans le cadre de la laïcité constitutive de l'école républicaine", affirme-t-elle.

Dans un rapport de 2005 consacré à la relation entre "religion et éducation", le Conseil de l'Europe soulige qu'une "bonne connaissance des grandes religions est indispensable à la formation de citoyens éclairés et tolérants". Il recommande d'assurer un cours d'étude des religions dans le primaire et le secondaire, ce qui implique d'inclure l'étude des religions dans la formation initiale et continue des enseignants. "Tout enseignant doit bénéficier d'une formation le familiarisant avec les courants de pensée religieuse majeurs", assure Carole Reich.

La formation des enseignants est un enjeu majeur dans ce domaine, confirme Denis Pelletier, président de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes (EPHE). Ils "devraient connaître davantage l'histoire et les principes des grandes religions pour ne pas être mal à l'aise face au multiculturalisme religieux de leurs élèves."

Des connaissances essentielles?

Pour autant, les faits religieux font rarement partie des connaissances acquises par un futur enseignant au cours de son cursus universitaire. En mars 2011, La Croix rappellait que "seule une infime minorité des enseigants aborde la question des religions dans le cadre de leur formation initiale". La réforme de la mastérisation a renforcé cette tendance, les modules d'études religieuses étant plus difficiles à mettre en place en université que dans les IUFM. 

Les enseignants s'en remettent donc à la formation continue. L'IESR propose des cours du soir et des journées de formation "à l'intelligence des faits religieux" destinées aux enseignants  du primaire et du secondaire. Cependant, les crédits alloués à la formation continue des enseignants diminuent, regrette Gérard Gobry, directeur de l'Institut de formation à l'étude et à l'enseignement des religions, installé à Dijon.  "Partout des sessions ont été annulées", déplore-t-il.

Le 1er mars dernier, Vincent Peillon avait reconnu sur France culture que l'école "devait enseigner le pluralisme des civilisations, donc des religions". Il avait cependant insisté sur l'importance de former les enseignants au "fait laïque", regrettant qu' "il y [ait actuellement] plus d’enseignement du fait religieux que du fait laique" dans les établissements scolaires (voir Touteduc Laïcité : V. Peillon souhaite une formation des enseignants au "fait laïc"). Unsondage IFOP datant de 2011 renvoie spiritualité et laïcité dos à dos: l'une et l'autre sont considérées comme des valeurs essentielles par moins de 5% des Français de moins de 30 ans. 

Pour compléter cet article, toutEduc et id2 ont consacré un dossier à la laïcité; il analyse notamment les impasses de l'enseignement du fait religieux en France.

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