Les jeunes, l'école et la religion. (étude européenne).
Paru dans Scolaire le vendredi 11 juin 2010.
Quels rapports les adolescents (14-16 ans) entretiennent-ils avec le fait religieux? Une grande enquête financée par l’Union Européenne dans les pays européens a exploré ces liens, dont Jean-Paul Willaime, sociologue, qui codirige le livre, rend compte dans un entretien mis en ligne sur le site de Canal Académieau mois d'avril 2010. Cet entretien se référe à l'ouvrage "Les jeunes, l’École et la religion" paru chez Bayard en 2009.
L'ouvrage du sociologue (écrit avec Cécile Béraud) met en avant la coexistence de trois modèles d'enseignement religieux en Europe: Un enseignement confessionnel des religions dans l’École publique assuré par des religieux. C'est le modèle prédominant en Europe (Allemagne, Espagne, Pologne, Grèce, Belgique ou encore Irlande); Un enseignement non confessionnel des religions. C'est le modèle prévalent dans les pays nordiques (Danemark, Norvège...) mais aussi en Angleterre, en Suisse et aux Pays-Bas; Enfin, un enseignement transdisciplinaire du fait religieux. C'est le modèle de la France, où les faits religieux sont intégrés à des matières déjà enseignées par ailleurs.
La reconnaissance du fait religieux est la conception largement majoritaire en Europe : "Dans les différents pays d’Europe, pose Jean-Paul Willaime, soulignant la particularité de la position française en matière de religion, prévaut une laïcité de reconnaissance du religieux, c’est-à-dire une laïcité qui, tout en respectant l’autonomie respective de l’État et des religions (...) reconnaît les apports sociaux, éducatifs et civiques des religions et les intègre de ce fait dans la sphère publique."
Si 59 % des jeunes interrogés pensent que la religion les aide à mieux comprendre le monde, 22 % d’entre eux ont peur d’être moqués s’ils expriment leurs convictions. Dans les écoles catholiques, les motivations religieuses des élèves ne concernent que 21 % des élèves interrogés. La certitude d’une bonne discipline touche 21 % des élèves, celle d’études sérieuses, 25 %. Les élèves musulmans expriment une certaine contestation de l’enseignement du fait religieux et de l’Histoire tel qu’il est pratiqué à l’École.
"Pour la première fois dans l’Histoire de la République, l’École républicaine ne scolarise plus la majorité des enfants juifs", écrivent en outre les auteurs de l'ouvrage. 60% des enfants juifs vont désormais dans des écoles privées : 30 % vont dans des écoles privées juives, 30 % dans des écoles catholiques, 40 % restent à l’école publique. L'étude met en lumière la montée en puissance des écoles privées juives, sous contrat à 75 %. Ces écoles semblent plus religieuses que toutes les autres : 92 % des élèves des écoles juives croient en Dieu (contre 34 % des élèves dans les écoles catholiques et 32 % dans les écoles publiques).