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L'éducation des filles

Paru dans Scolaire le jeudi 10 janvier 2013.

Depuis le 17e siècle, les femmes ont rattrapé leur retard à l’école et sur le marché du travail. Pourtant, l’idée qu'elles ne doivent pas négliger leur foyer au profit de leur carrière joue encore sur leurs orientations. C’est l’un des enseignements du dernier volet de "La fabrique de l’histoire" (France Culture) sur l’éducation, consacré à l’éducation des filles aujourd’hui 10 janvier(lire aussi sur Touteduc (La pédagogie Freinet, un sujet d'actualité (France-Culture) et L'histoire de l'éducation : 4 émissions sur France Culture).

Claude Lelièvre, historien de l’éducation, qui souligne leur présence massive à l’université, rappelle qu’en 1968 le taux d’étudiantes était de 30% en droit, contre 63% aujourd’hui, 30% en médecine contre 60%, mais que ce taux reste stable en sciences. Toutefois, il insiste sur l’extraordinaire rattrapage qu’elles ont opéré depuis 1880, date de la création du secondaire féminin et de 1924, date de l’alignement des programmes enseignés aux filles et aux garçons.

Martine Sonnet, historienne des femmes, ajoute que l’instruction des enfants et la multiplication des écoles sur le territoire débute avec la contre-Réforme au 16e siècle, quand protestants et catholiques y voient "le meilleur moyen pour préserver la doctrine" et la diffuser au plus grand nombre. L’une des premières écoles pour filles est Saint-Cyr, fondée par Madame de Maintenon, dont la finalité est d’éduquer des filles nobles mais ruinées, destinées à épouser des nobles et à régner sur des biens ruraux, ce qui nécessite de nombreuses compétences. Elles sont également instruites dans des couvents, comme les Ursulines et des abbayes prestigieuses et beaucoup de petites écoles gratuites ou payantes pour les filles d’ouvriers ou de marchands.
Rebecca Rogers, historienne de l’éducation féminine en France, note que la révolution française ne change pas grand-chose pour l’éducation des filles. En revanche, la création par Napoléon 1er, des maisons d’éducation de la légion d’Honneur, destinées aux filles désargentées apparentées, leur apporte une "instruction plus poussée et devient un modèle pour les classes moyennes". Le programme d’étude leur ouvre les carrières de l’industrie textile de luxe et du tertiaire, notamment dans l’enseignement.
Nicole Mosconi, professeure en sciences de l’éducation à Paris X, remarque cependant que même sous la IIIe République, il subsiste "un retard fort de l’éducation des filles, voulu par les milieux intellectuels et politiques" qui s’inquiètent des dangers des savoirs sur une population qui doit accepter sa domination. Il ne faut pas les détourner de leur rôle de femme au foyer et de mère ou en faire des "raisonneuses" comme s'en inquiétait Napoléon.

Rebecca Rogers rappelle que c’est sous la IIIe République que des lois passent, permettant aux filles de recevoir une éducation équivalente à celle des garçons, à quelques différences près. Les filles poursuivent leurs travaux d’aiguille quand les garçons font de la gymnastique, mais surtout, elles n’ont pas accès au baccalauréat et n’apprennent pas les humanités classiques.

Cependant, Rebecca Rogers note le rôle de certaines femmes dans la construction d’un réseau scolaire, comme Joséphine Bachellery , qui tient un pensionnat pour jeunes filles à Paris et demande en 1848 à Hyppolite Carnot , la création d’une école normale supérieure pour les filles afin d'assurer leur avenir professionnel. A ce sujet, Claude Lelièvre remarque que dès la création en 1880 du secondaire féminin, "le vers était dans le fruit". "Elles n’avaient pas accès au bac pour leur interdire l’accès à l’université et aux diplômes professionnels mais dans le même temps, on a besoin de professeurs féminins puisque les école ne sont pas mixtes. Il faut donc former des cadres." Et en 1924, le décret Bérard leur ouvre l’accès à l’épreuve finale.

C’est une date importante, insiste Nicole Mosconi, mais il faut aussi rappeler le rôle du Front populaire, l’affirmation constitutionnelle de l’égalité des sexes et la mixité scolaire, qui permet aux filles d’accéder à l’ensemble des filières. Rebecca Rogers cite aussi "le coup de pouce donné par la loi Bertoin en 1959 qui rend l’école obligatoire jusqu’à 16 ans" et la création d’écoles ménagères, écoles de secrétariat, et autres "écoles pratiques axées sur l’offre de travail" qui vont permettre aux femmes d’arriver sur le marché du travail alors que se développe le secteur tertiaire.

Claude Lelièvre remarque que dans certaines professions, comme juges ou commissaires, "les femmes dominent largement les hommes". Mais Nicole Mosconi souligne que "la raison de la féminisation de certains métiers, notamment dans le tertiaire, c’est leur exigence de diplôme et leurs faibles salaires."

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