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Le test d'évaluation des élèves de maternelle présenté aux inspecteurs aujourd'hui

Paru dans Scolaire le vendredi 13 janvier 2012.

La direction de l'enseignement scolaire organise ce 13 janvier une rencontre de tous les inspecteurs (IEN) "maternelle", au cours de laquelle Michel Zorman présentera le test d'évaluation des élèves de maternelle qui a fait couler beaucoup d'encre cet automne. Il répond aux questions de ToutEduc. 

Michel Zorman : Oui, j'y ai été convié et j'y exposerai les outils d'évaluation des élèves de maternelle que l'équipe Cogni-sciences du LSE de l'université de Grenoble dont je suis responsble a produits. Il ne s'agit pas de l'évaluation des compétences de fin d'année de grande section de maternelle, à laquelle nous n'avons pas participé, et qui existe depuis trois ans. Lorsqu'une fuite a été organisée et les outils de repérage et l'évaluation de fin d'année ont été communiqués à la presse, tout a été mélangé.

ToutEduc : Pour pouvoir distinguer clairement les choses, à quelle commande avez-vous répondu, et quels sont les outils que vous proposez ?

Michel Zorman : Il s'agit de savoir s'il est possible de repérer à l'école maternelle des élèves susceptibles de rencontrer ultérieurement des difficultés dans l'apprentissage de la lecture, et, donc, de permettre à l'enseignant de mettre en oeuvre des renforcements dans le cadre de petits groupes de besoin afin de compenser ces points faibles, qu'il s'agisse de motricité fine, de conscience phonologique, de langage.

ToutEduc : Comment comprenez-vous la polémique suscitée par ces outils de repérage ?

Michel Zorman : Encore une fois, on a tout mélangé. Ce qui était appelé "comportement scolaire" correspondait aux capacités attentionnelles dans les apprentissages. Cela n'avait rien à voir avec la civilité ou les attitudes dans la cour de récréation. Deuxièmement, on a présenté cette démarche de repérage comme obligatoire. Ni notre équipe ni la DGESCO n'ont jamais eu l'intention de la rendre obligatoire et systématique. Je dirai bien, et la DGESCO fera de même, aux inspecteurs qui seront là qu'il s'agit d'outils, aussi bien pour le repérage que pour les entraînements pédagogiques qui sont mis à disposition des enseignants. Elle suppose l'adhésion de l'enseignant, qui ensuite décide, s'il en a les moyens et en fonction des besoins reperés, d'individualiser son enseignement, avec des petits groupes.

ToutEduc : C'est justement ce repérage qui a inquiété, notamment les pédopsychiatres...

Michel Zorman : Et alors, qu'ont-ils fait ? C'est à une part d'entre eux que dans les décennies précédentes l'on doit d'avoir laissé les enfants handicapés en situation de "sous enseignement", les autistes, les trisomiques, les troubles cognitifs dans les structures médico sociales. Ils ont médicalisé la difficulté.. Il a fallu les lois sur le handicap 1975-2005 pour qu'ils puissent rejoindre l'école ordinaire avec les autres enfants. Je me situe dans la lignée de mes illustres prédécesseurs, médecins et pédagogues, Jean Itard, Maria Montessori, Edouard Claparède, Ovide Decroly ou Janusz Korczak, pour qui tous les enfants ont des capacités d'apprentissage. Encore faut-il les mettre en situation d'apprentissage adapté, donc à l'école.

ToutEduc : On peut penser aussi qu'ils se sont inquiétés d'une certaine proximité entre vos outils et le DSM, "Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders", aujourd'hui international mais d'origine américaine...

Michel Zorman : Le DSM est un outil, et comme de tout outil, on peut en faire un bon ou un mauvais usage. C'est toujours la clinique qui doit avoir le dernier mot. Les tests donnent des indications, nous aident à nous faire une idée, mais au final, c'est le médecin, ou l'enseignant dans le cas présent, qui décide, en fonction de ce qu'il a vu. Les tests ne lui donnent qu'un élément, parmi tous les d'autres, pour approcher la réalité. Il ne faut pas perdre de vue la complexité du réel et tenter une approche réductionniste. Ceci ne veut pas dire que des mesure objectives, des évaluations psychométriques sont inutiles ou éthiquement inacceptables. Le DSM est un outil modeste, qui aide au diagnostic et qui permet que les psychiatres et professionnels de la santé mentale du monde entier, lorsqu'ils utilisent un terme, parlent à peu près de quelque chose de circonscrit. Nous avons le même problème dans l'enseignement. Le dernier élève d'une classe préparatoire d'un lycée de centre ville est, vraisemblablement bien meilleur, scolairement, que le premier d'une classe de lycée professionnel préparant un CAP. Un enseignants à besoin d'avoir à sa disposition des outils d'évaluation standardisés, qui lui permettent de situer les élèves qu'il pense en difficulté par rarpport aux autres élèves en France.

ToutEduc : Mais pourquoi faudrait-il toujours évaluer ?

Michel Zorman : L'évaluation est consubstantielle à la relation humaine. Nous parlons ensemble et chacun de nous deux se fait une idée de l'autre, à coup sûr fausse car fondée sur son expérience, ses préjugés, ses représentations..., mais en fonction de laquelle il organise ses propos. Les enseignants évaluent constamment leurs élèves, et ça ne dérange personne, par exemple quand on leur demande d'évaluer lesquels peuvent tirer profit des "Coups de pouce CLE"... La polémique commencerait quand on donne aux enseignants des critères plus objectifs à intégrer à leur évaluation ? Je trouve profondément scandaleux ce débat idéologique, qui s'en prend à des outils destinés à renforcer la bienveillance à l'égard des enfants les plus en difficultés, actuellement délaissés dans notre enseignement.

ToutEduc : Que voulez-vous dire ?

Michel Zorman : On a le droit de critiquer les tests que nous proposons, de dire qu'ils ne sont pas pertinents. J'ai des convictions, mais je n'ai aucune certitude, et je peux entendre qu'on devrait s'y prendre autrement. On peut aussi réorganiser l'enseignement, on peut même penser que si on l'individualisait totalement, on n'aurait peut-être plus besoin d'outils pour l'évaluation des difficultés des enfants. Mais on ne peut pas dire "on ne change rien et on n'évalue pas". On compte quelque 20 % d'élèves qui n'acquièrent pas les connaissances nécessaires pour vivre dans notre société. Si on veut gagner sur ces 20 %, il faut disposer d'une analyse différenciée pour des approches différenciées.

Sur ce test et  sur la polémique suscitée lors de sa divulgation, lire ToutEduc Maternelle: le projet de test d'évaluation contesté (Le Monde), ici, ici,ici etici.

Sur le programme Parler, lire ToutEduc "Il n'y a pas de méthode Zorman" déclare à ToutEduc Michel Zorman et Lecture: la méthode "PARLER" expérimentée au Puy-en-Velay.

 

 

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