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Comment conduire un programme contre les discriminations filles/garçons à l'école? (Conférence).

Paru dans Scolaire, Orientation le vendredi 26 novembre 2010.

Comment conduire un projet de lutte contre les discriminations de genre à l'école? Quelles sont les ressources disponibles pour les établissements? Quels sont les moyens et les freins à ce type de projet en classe? Des acteurs de terrains et des spécialistes en débattaient hier jeudi 25 novembre sur le Salon de l'éducation à Paris, à l'initiative de l'association Eveil. (Voir le programme des conférences du salon ici).

Plusieurs freins ont été mis en avant par les intervenants:

-La difficulté des acteurs éducatifs à cerner et définir les discriminations garçons/filles d'un point de vue conceptuel, mais aussi à les identifier sur le terrain;

-Le difficile choix de la politique à mener: une intervention visible au risque de stigmatiser les individus discriminés, ou bien une action de fond se traduisant par l'inscription d'un certain nombre de valeurs dans le règlement intérieur de l'établissement?

-L'intériorisation par certaines filles de la domination masculine;

-Le cautionnement plus ou moins inconscient de la part des enseignants des stéréotypes de genre;

-Un conflit entre la culture scolaire, les images médiatiques, et la culture religieuse de certaines familles;

-Une difficulté à généraliser les expériences qui fonctionennt à d'autres établissements.

"Le problème des discriminations relève d'un problème de civilisation, celui de la place de l'école par rapport à la famille et aux culture dominantes. L'école est là pour donner le sens de la dignité", a souligné Jacqueline Costa-Lascoux, directrice de recherche au CNRS, associée au CEVIPOF-Sciences-po Paris et co-auteur du rapport sur les discriminations remis le 24 septembre au ministère de l'Education nationale (voir sur ToutEduc du vendredi 24 septembre 2010: Discriminations à l'école: le ministère rend public son rapport.). La chercheuse a par ailleurs fait part de son inquiétude face à certains enseignants "visiblement gênés par l'idée de culture scolaire". "Or si on la nie, on va vers des conflits d'opinions, de traditions, de cultures familiales, vers des violences qui mènent à des discriminations. Il faut démonter les discriminations avec les outils de l'école."

La chercheuse a interrogé des lycéennes de Vénissieux (banlieue sud de Lyon) sur les questions de genre: "Pour ces filles ce qu'on apprend à l'école est avant tout formel. Ce n'est pas la vraie vie, disent-elles. Même si nous essayons de travailler sur les intégrismes, en montrant que ce sont des pratiques imposées par des traditions, survit l'idée que cela est juste car transmis par leurs ainés. A l'inverse, ces élèves ne sont pas intéressées par le discours sur la tolérance de Voltaire, sous prétexte que ce n'est pas la vie. Cela remet en question le poids de la culture scolaire." La chercheuse précise que les dénonciations de principe contre la discrimination ne sont véritablement reçues que "par les élèves qui ont déjà amorcé un processus de réflexion. A nous de montrer que des valeurs, des idées peuvent permettre de vivre autrement, au quotidien, en utilisant des images ou des procédés concrets lors des interventions".

Dans ce sens, la mise en place d'ateliers-théâtre ou de cafés parents a été préconisée. "Il faut ouvrir l'école aux parents. A partir de là, on peut travailler sur la culture familiale, interroger les valeurs des mères par exemple: Pensez-vous vraiment que votre fille soit faite pour être esthéticienne?", a ajouté Jacqueline Costa-Lascoux, jugeant que la création de Café des parents était "une bonne initiative".

Nelly Julien, du CFA académique de l'académie de Créteil, a initié un programme de sensibilisation en direction des lycées professionnels de son académie. En 2009, 21 interventions ont réuni 240 jeunes. Une formatrice de l'association Eveil a rappelé le cadre réglementaire aux classes , mais également tiré parti du principe du jeux de rôle. Objectif des ateliers-théâtres: permettre aux jeunes de toucher du doigt la discrimination, et de se poser des questions en situation: Si au travail mon chef est une femme, si dans mon équipe il y a un homosexuel, comment vais-je me comporter, comment vais-je accueillir cette différence? "A la suite de ce travail de questionnement concret, les enseignants ont pu prendre le relais", a commenté la coordinatrice pédagogique, précisant que ces derniers avaient "accueilli ce programme avec beaucoup de soulagement".

L'enjeu semblerait davantage d'impliquer les élèves que les équipes enseignantes, pour un chef d'établissement présent dans l'assemblée. "Dans mon lycée profesionnel, caractérisé par une forte mixité, quand nous soumettons la question de la discrimination de genre, les élèves rétorquent que ce n'est pas le problème. Le vrai problème leur semble plutôt être la question du racisme, en particulier lorsqu'il s'agit de trouver un stage en entreprise". Pour Jacqueline Costa-Lacoux, il s'agit aussi pour l'école de préparer les jeunes aux entretiens. "Les enseignants doivent aborder en amont la question de la ponctualité, de la présentation de soi. Il ne faut pas tant travailler en terme de catégories de jeunes, qu'en terme de mises en situation".

Les intervenants ont précisé qu'au niveau du rectorat, les cellules FSE (Fonds social européeen) pouvaient aider les établissements qui le souhaitent à monter un dossier de subvention des projets et interventions de lutte contre les discriminations.

Mais sur  le cautionnement plus ou moins inconscient de la part des enseignants des stéréotypes de genre, on pourra lire sur ToutEduc Pourquoi 74 % à 89 % des collégiens punis sont des garçons... (Publication)

 

 

 

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