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Pourquoi 74 % à 89 % des collégiens punis sont des garçons... (Publication)

Paru dans Scolaire le mercredi 08 septembre 2010.

Dans treize collèges enquêtés récemment, avec des publics sociaux différents, les garçons représentent de 74 % à 89 % des élèves punis et de 85,2 % à 100 % des élèves sanctionnés pour violence physique. Comment expliquer cette distinction de genre?  " La sanction scolaire n’a jamais été véritablement interrogée à la lumière des rapports sociaux de sexe", estime Sylvie Ayral (Université de Bordeaux II) qui rappelle que si la sanction est liée à la hiérarchie des relations entre adultes/élèves, on oublie souvent "une autre asymétrie invisible: celle liée aux rapports sociaux de sexe (genre)".

Elle note que l’école est un lieu de confrontations entre les sexes, où s'activent des stéréotypes de genre (représentation de soi en tant qu’homme ou en temps que femme). "Garçons et filles partagent la classe en deux espaces distincts, ne mangent pas ensemble, ne fréquentent pas les mêmes endroits dans la cour, même si cela n’empêche ni les amitiés, ni les flirts, ni les amours".  Plus qu'un apprentissage de l'autre sexe ("une coéducation des sexes"), la mixité scolaire poserait des problèmes pédagogiques "rarement pris en compte" estime t-elle.


A l’adolescence la prise de conscience de l’identité corporelle sexuée se fait par affirmation de la différence avec l’autre. "Le fait de perturber l’ordre scolaire et de se faire punir, le défi, l’insolence, la violence qui se montre ne relèvent-ils pas, en fin de compte, chez les garçons, d’une parade sexuée masculine pour se démarquer des filles et se faire admettre au passage dans le groupe des vrais hommes ?", s'interroge l'auteur qui souligne que  la classe est un public et, à l’intérieur de celle-ci, le groupe de pairs constitue un public dans le public: "Les élèves ont entre eux des liens de camaraderie, de solidarité, de séduction ou d’inimitié qui ne seront pas sans influence dans les moments de tension disciplinaire". Les garçons se retrouveraient pris entre deux contraintes: celle fixée par le règlement intérieur de l'établissement, et celle de la virilité  qui doit être afffirmée devant les autres garçons et "devant un public de filles". "C’est précisément ce stress que semblent rechercher nombre de garçons dans la transgression, car il leur procure des sensations fortes et une certaine excitation".

 L’injonction à la virilité et à l’hétérosexualité qui est faite aux garçons encouragerait également chez eux la violence physique, sexiste ou homophobe. 

Comment les adultes de la communauté éducative appréhendent-ils ces transgressions et cette violence manifestement masculines? "Les entretiens révèlent une tendance à naturaliser les comportements sexués. ('L’instinct masculin refait toujours surface'; 'Les gènes ?' )". L'auteur regrette l’explication naturalisante des acteurs qui viendrait renforcer l’inégalité entre sexes et étayer "la conviction qu’il existe une nature masculine et une nature féminine". Elle souligne aussi "l’ignorance voire le déni institutionnel à l’égard du sexisme et de l’homophobie ambiants": "Tout au plus parle-t-on d’insolence". Au final, enfreindre le règlement intérieur permettrait aux garçons d’afficher leur virilité ( "La sanction confère un nouveau statut : c’est une médaille de virilité"), et l’école, qui les stigmatise par la sanction," les consacrerait dans leur identité masculine", "construisant finalement ce qu’elle prétend corriger".

"Sanctions et genre au collège",  Slvie Ayral, Socio-logos. Revue de l'association française de sociologie

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