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Centre national d'enseignement à distance : vers un retour de la confiance (Michel Reverchon-Billot, interview exclusive)

Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 03 juillet 2017.

Après "une période compliquée", les personnels du CNED "se sont remis dans une dynamique positive", estime Michel Reverchon-Billot, le directeur général du Centre national d'enseignement à distance, fonction qu'il occupe depuis six mois. Le changement est aussi marqué par une nouvelle signature "Au service de toutes les réussites", et la redéfinition de sa mission, "garantir à chacun, quelle que soit sa situation, les moyens de sa réussite scolaire et professionnelle".

ToutEduc : La signature du CNED était jusqu'à présent "Connecté à votre avenir". Que signifie ce changement ?

Michel Reverchon-Billot : La formule précédente évoquait le tournant numérique qui est aujourd'hui bien engagé. Il était désormais important de redonner du sens dans le cadre d’un nouveau projet, d’affirmer les valeurs portées par le CNED pour mieux affirmer sa mission et son positionnement "devenir l’établissement le plus ouvert sur la diversité des situations de vie".

ToutEduc : Sans doute, mais non sans difficultés. ToutEduc s'est fait l'écho des souffrances des personnels du CNED ces dernières années...

Michel Reverchon-Billot : Effectivement, cette transition du papier vers le numérique a généré beaucoup d'inquiétudes, elle a impacté de nombreux métiers, ne serait-ce que les métiers de l’imprimerie. Elle a impacté également les inscrits. Certains de nos publics n'ont pas facilement accès à internet : les élèves scolarisés à l'étranger dans certains pays, ou les inscrits sous-main de justice, les enfants des familles itinérantes, ou certains demandeurs d'emploi... Nous devons proposer une hybridation des supports et le développement du numérique ne peut pas être porté de façon idéologique, il doit prendre en compte la situation de nos apprenants. Le CNED doit être ouvert sur la diversité des situations de vie. C'est une question de valeurs, celles qui nous animent.

ToutEduc : Vous avez travaillé à leur redéfinition ?

Michel Reverchon-Billot : Le travail était engagé depuis deux ans déjà, et nous sommes parvenus à une formulation stabilisée avec trois termes forts, "réussite", "accessibilité" et "utilité sociale", sur lesquels nous pouvons nous appuyer pour la rédaction, cet été, de notre contrat d'objectif et de performance, que nous voudrions boucler et voir approuvé par la tutelle avant la fin de l'année.

ToutEduc : Quels en seront les grands axes ?

Michel Reverchon-Billot : Nous devons d'abord accroître la visibilité et la lisibilité de l'offre. Ce n'est pas simple : Nous proposons quelque 600 formations, du CAP petite enfance aux études de notariat en passant par l'agrégation et les programmes scolaires... Cette offre se déploie aussi avec des services numériques, comme D'COL dans le cadre de la stratégie numérique ministérielle [un dispositif numérique d'aide aux élèves de sixième en difficulté, ndlr]. Accroître la lisibilité de l’offre c’est aussi affirmer notre présence en appui des politiques éducatives : par exemple comment proposer des services dans le cadre du dispositif "devoirs faits" annoncé récemment par le Ministre, ou proposer les services du CNED en appui des écoles ou établissement dans une forme "d’hybridation" de la scolarité.

ToutEduc : Vous parlez de produits nouveaux. Disposez-vous de toutes les compétences voulues ?

Michel Reverchon-Billot : Chacun a bien compris qu'un CNED qui se porte bien, c’est un CNED qui prospère et qui se développe mais ce sont aussi des emplois pérennisés et des compétences capitalisées. Nous devons nous appuyer sur l’inventivité des personnels et leur engagement, ne serait-ce que pour garantir la qualité de notre offre de formation, aussi bien en termes de contenus que de forme. Un travail sur les interfaces est essentiel dans une démarche "d’expérience utilisateurs", c’est dans cette perspective qu’un groupe d’échange de bonnes pratiques a été mis en place.

C'est d'ailleurs un de nos axes prioritaires, avec l'accompagnement de nos élèves. On s'imagine toujours qu'ils sont seuls devant leur cours ou leur copie, papier ou numérique. En réalité, on n'apprend jamais seul, et nous pourrions davantage mobiliser les fonctionnalités du web social, envoyer un SMS d'encouragement, rappeler avec un courriel une date de remise d'un devoir..., créer une présence chaleureuse, un lien, des communautés d'élèves, mais aussi des communautés d'enseignants. Faire en fait de la distance une proximité. Le CNED doit accompagner l’évolution des métiers et la montée en compétence des personnels mais aussi devenir une référence en matière de formation à distance.

ToutEduc : Vous voulez individualiser les formations ? C'est difficile avec quelque 240 000 inscrits.

Michel Reverchon-Billot : Nous devons, même si l'expression est paradoxale, "industrialiser la personnalisation". Nous nous sommes rapprochés du laboratoire LORIA (qui réunit l'université de Lorraine et l'INRIA) pour travailler sur l'exploitation des données, des traces que laissent les apprentissages (learning analytics). Cela suppose aussi, mais c'est une autre démarche, que nous améliorions notre système d'information, avec un seul logiciel –en cours de déploiement - pour la gestion de l'ensemble des aspects de la formation (pédagogique, administratif, budgétaire, commercial).

ToutEduc : Quels sont vos autres leviers de croissance ?

Michel Reverchon-Billot : De nombreux pays francophones recherchent un adossement au CNED pour garantir une qualité de scolarisation sur la base d’un programme et d’un modèle français mais aussi pour assurer une montée en compétences de leurs enseignants. C’est une piste.

Nous devons aussi être plus présents sur le marché de la formation professionnelle continue. Nos formations n'étaient pas référencées sur Datadock [sur lequel sont inscrits les organismes de formation qui respectent les critères de qualités fixés par le décret du 30 juin 2015, ndlr]. Nous avons en urgence monté une cellule de crise pour fournir les éléments de preuve nécessaires avant l'échéance. Les dossiers de 34 formations ont été finalisés, et ce sera l’ensemble des formations (194) qui seront référencées d'ici le 1er septembre.

Une autre piste serait de proposer des services aux universités.

ToutEduc : Ce sont, pour l'essentiel, des offres dans le secteur concurrentiel que vous envisagez.

Michel Reverchon-Billot : C'est pourquoi nous réfléchissons à une structure juridique qui les porte, de façon à bien identifier les deux périmètres, du secteur de service public et du secteur concurrentiel, et que nous ne prêtions pas le flanc à un risque de concurrence déloyale. Cela suppose aussi de revoir notre système de contrôle de gestion en lien avec notre comptabilité analytique. J'ai également mis en place un organigramme fonctionnel, de façon à ce que chacun sache quelle est sa place et qui fait quoi...

ToutEduc : Nous revenons au point de départ de cet entretien, la crise de confiance qu'a connue le CNED et qui a alimenté un conflit social rarement médiatisé, mais qui n'en a pas moins été important.

Michel Reverchon-Billot : Tout n'est pas réglé, on ne règle pas tout en 6 mois, mais on sent une évolution positive, les personnels ont davantage confiance en l'avenir et dans la direction générale. Nous avons un important chantier à mener en termes de gestion des ressources humaines, d'autant que les enseignants qui sont détachés au CNED sont souvent fragiles. Il faut les accompagner. Il faut pouvoir offrir aux personnels du CNED des perspectives d'évolution de carrière, leur proposer des formations dans notre école interne, accompagner leur parcours. Récemment pour plus de transparence, une grille de rémunération des contractuels a été élaborée, elle est le fruit d’un remarquable travail entre les services RH et les représentants des personnels. Il y a beaucoup à faire, mais nous sommes sortis du conflit social, et, ce n'est qu'un signe, mais il me paraît important, lorsque nous avons présenté notre nouvelle campagne TV, les applaudissements ont été spontanés. Le dialogue est rétabli.

 Sur le CNED, lire notamment ToutEduc ici, ici, ici, ici, ici...

Propos recueillis par P. Bouchard, relus par M. Reverchon-Billot

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