L’enseignement de la "morale laïque" : les opinions de deux philosophes dans la presse
Paru dans Scolaire le jeudi 25 avril 2013.
Mots clés : morale, laïcité
La morale laïque à l’école ? Deux philosophes, Robert Maggiori dans Libération, Pierre-Henri Tavoillot, président du Collège de philosophie dans le Monde abordent la question et témoignent de l’intérêt suscité à peine la proposition du comité d’experts remis à Vincent Peillon ( voir Touteduc ici).
Robert Maggiori considère que l’apprentissage des règles de cohabitation ensemble existait déjà avec le cours d’éducation civique et s’interroge : peut-on apprendre la morale ? Pour lui, la morale n’est pas une suite "de vertus axiologiques" qu’il y aurait à connaître en dehors de soi, extérieures à l’individu, mais elle est avant tout action. "Le bien ne me préexiste pas, c’est en me jetant à l’eau pour sauver quelqu’un que je crée un bien." Enseigner toute une série de notions comme le courage, l’honneur pourquoi pas? semble dire cet enseignant, mais enseigner la morale, "laïque ou pas" identique à "faire le bien" paraît être pour lui une gageure.
Pierre-Henri Tavoillot se demande comment éviter le "reproche possible d’une laïcité moralisatrice et sectaire", rappelant le refus de Condorcet de présenter la Constitution ou la Déclaration des droits "comme des tables descendues du ciel, qu’il faut adorer et croire".
Il suggère une méthode, la disputatio, celle où deux élèves plaident, l’un "pro", l’autre "contra", chacun devant "caser" un ou deux préceptes : "on arriverait au moins à montrer que les deux positions peuvent être soutenues avec des arguments raisonnables, audibles dans l’espace public." Pour le philosophe, on ferait faire ainsi l’expérience de "la suspension du jugement, de son ouverture à l’espace public, de l’effort de se rendre audible aux autres". Une expérience qui lui rappelle le "sens commun", c’est-à-dire "le penser ensemble" de Kant dans lequel il voit une définition de la laïcité.
L’intervention de Robert Maggiori est visible par vidéo (ici) ; l’article de P.-H Tavoillot est paru dans Le Monde daté du 25 avril.