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La CFDT Education Formation Recherche Publiques (ex SGEN-CFDT) défend des personnels soumis à des injonctions contradictoires

Paru dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 24 mai 2024.

Le SGEN-CFDT était réuni en congrès la semaine dernière, il a reconduit sa secrétaire générale, Catherine Nave-Bekhti et il a changé de nom pour devenir la CFDT Education Formation Recherche Publiques.

ToutEduc. Pourquoi changer de nom ?

Catherine Nave-Bekhti. Ce changement répond à des attentes très fortes, exprimées depuis plusieurs années par des syndicats de la fédération, notamment dans le Nord-Pas-de-Calais, puis dans l’académie de Versailles et qui se sont révélées proches de la majorité en 2021. Le SGEN, qui réunit les "syndicaux généraux de l'Education nationale" a été fondé en 1937, alors que Jean Zay était ministre et qu'il était chargé de l'enseignement scolaire, de l'enseignement supérieur, de la Jeunesse, de la Culture... Depuis, le ministère a changé et l'appellation ne correspondait plus à notre champ de syndicalisation, très large. Nous avons aussi voulu signifier notre fierté d'appartenir à la CFDT en la mettant en tête de notre appellation et non plus en seconde position. Plusieurs syndicats dont les adhérents ne sont pas tous "Education nationale" souhaitaient aussi cette normalisation de notre appellation sur le modèle des autres fédérations.

ToutEduc. "CFDT EFRP", ce n'est pas un sigle très facile d'usage.

Catherine Nave-Bekhti. En effet, c'est pourquoi nous utiliserons le nom en entier au début de nos expressions pour identifier les domaines professionnels qui sont les nôtres et dans la suite des textes, nous utiliserons le sigle CFDT.

ToutEduc. Quelles sont les autres avancées du congrès ?

Catherine Nave-Bekhti. Nous avons adopté trois cahiers revendicatifs. Le premier, "faire une place à chacune et chacun pour les réussites de toutes et tous", part du constat que l'école n'est pas réellement inclusive, et il faut prendre ici l'inclusion au sens large, sans la limiter aux élèves en situation de handicap. Et cela génère beaucoup de tensions. Le cadre n'est pas fait pour inclure mais les personnels subissent une pression très forte pour l'inclusion. Nous avons besoin, pour accueillir tous les enfants, d'agir ensemble, que nous puissions avoir des temps de synthèse entre professionnels, comme dans le secteur médico-social. Il faut aussi plus de souplesse dans les programmes, que des adaptations soient possibles.

ToutEduc. Le second porte sur les conditions de travail ?

Catherine Nave-Bekhti. En effet et il s’intitule "pouvoir agir sur son travail". Là encore, nous partons d'un constat commun à tous les métiers que nous représentons, celui de l'inadéquation entre le temps de travail et l'inflation des missions que nous impose le Gouvernement. Le droit du travail prévoit d'ailleurs des temps de récupération dont nos collègues ne bénéficient pas. Travailler collectivement suppose qu'on puisse s'appuyer sur un dialogue entre professionnels. Il faut aussi compter avec les impacts du changement climatique...Notre troisième cahier porte sur le renouvellement de l'engagement syndical.

ToutEduc. La journée de manifestations intersyndicales de demain, 25 mai, a pour mot d'ordre le refus du "choc des savoirs" avec un slogan, "nous ne trierons pas nos élèves". Or notre système scolaire a longtemps revendiqué son élitisme et beaucoup d'enseignants adhéraient à cette définition de leur mission. Pensez-vous que nous assistions à un tournant dans la culture professionnelle des professeurs, notamment du second degré ?

Catherine Nave-Bekhti. Je dirais plutôt que les enseignants sont pris dans des injonctions contradictoires. Au collège, ils doivent à la fois faire acquérir le "socle commun de connaissances, de compétences et de culture" à tous les élèves et préparer leur spécialisation. Ils doivent à la fois respecter les principes de l'égalité républicaine et différencier leur pédagogie.

ToutEduc. Ce n'est pas nouveau.

Catherine Nave-Bekhti. Effectivement, le système éducatif trie, et donc avec lui les personnels qui interviennent dans les procédures d’orientation, les élèves qui sont orientés en SEGPA, ou, en troisième, vers la voie professionnelle en fonction d'éléments qui ne devraient pas jouer et qui jouent un rôle majeur. On laisse les personnels face à ces contradictions, à ces tensions.

ToutEduc. Voulez-vous dire que les réformes engagées depuis 2017 mettent plus particulièrement les enseignants en difficulté ?

Catherine Nave-Bekhti. Quand Jean-Michel Blanquer a justifié les dédoublements en CP et CE1, il a développé un projet : permettre aux élèves en difficulté, du fait de leur situation sociale, de rattraper le niveau de façon qu'ils soient ensuite tous sur la même ligne de départ et que la compétition scolaire soit "juste". Nous retrouvons le même discours idéologique avec les groupes de niveau : on aura mis tous les moyens pour compenser les défauts d'acquisition des fondamentaux, après, l'échec sera de la responsabilité des individus. C’est une vision de l’école et de la société à laquelle nous ne souscrivons absolument pas à la CFDT Education Formation Recherche Publiques, et au sein de toute la CFDT car ces enjeux sont aussi débattus, réfléchis au niveau confédéral.

ToutEduc. Vous dénoncez donc un système fondé sur la compétition des individus, alors qu'il affiche sa volonté de faire réussir tout le monde. Le vadémécum sur la constitution des groupes de besoin prévoit d'ailleurs que les objectifs soient les mêmes pour tous.

Catherine Nave-Bekhti. En effet, depuis 2017, rien n'a été fait pour valoriser les pédagogies collaboratives, la coopération. Tout ce qui était travail de groupe a été déconstruit. Cela vaut d'ailleurs aussi pour les enseignants, le professeur est seul dans sa classe.

ToutEduc. Avez-vous le sentiment que cette analyse soit partagée ?

Catherine Nave-Bekhti. Pas forcément dans ces termes, mais l'opposition au choc des savoirs est très large, elle ne concerne pas que les enseignants et nous nous en rendons compte dans les réunions confédérales, les autres professions soutiennent le mouvement, chacun sent bien ce que signifie ce "choc des savoirs" pour l’Ecole

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