Les "conventions ruralité" sont-elles encore d'actualité ? C. Montin, président des maires du Cantal en doute (interview)
Paru dans Scolaire le mercredi 15 février 2023.
En quoi les réactions aux annonces de "carte scolaire", le nombre d'ouvertures et de fermetures de classes, sont-elles, cette année, différentes de celles des autres années ? Christian Montin, maire de Marcolès (Cantal) et président de l'association des maires du Cantal répond à ToutEduc
Christian Montin : Depuis 2014, le Cantal a perdu 8 postes d'enseignants, à la prochaine rentrée, nous en perdons 10 ! La baisse démographique ne s'est pourtant pas amplifiée brutalement. Le moment où sont connues les mesures de carte scolaire est toujours difficile, mais cette année, c'est particulièrement brutal.
ToutEduc : N'est-il pas normal qu'une baisse démographique se traduise par une baisse du nombre de postes. Bien sûr, la fermeture d'une classe ou d'une école précipite le déclin d'un village, mais ce déclin était déjà là.
Christian Montin : Oui, une telle fermeture est à la fois cause et conséquence de la démographie en berne d'un territoire, mais cette année, outre l'importance de la saignée, nous sommes confrontés au fait du prince, l'annonce n'a été précédée d'aucune réflexion partagée. En janvier 2014, le Cantal a été le premier département rural à signer avec le ministre de l'époque, Vincent Peillon, une convention qui prévoyait le gel pendant 3 ans du nombre des postes d'enseignants en échange d'une réflexion sur la structuration du réseau scolaire. Elle a été renouvelée avec des avenants en 2017 et en 2019, et les fermetures de classe avaient fait chaque fois l'objet de discussions longues et approfondies, elles se référaient à la philosophie de la convention. Celle-ci arrivait à échéance, et elle n'a pas été renouvelée.
ToutEduc : Y a-t-il, à votre connaissance, une raison à ce non-renouvellement ?
Christian Montin : Non. C'est une décision unilatérale. Dès que nous en avons été informés, nous avons fait des propositions pour améliorer le dispositif, nous n'avons pas eu de réponse.
ToutEduc : Savez-vous s'il en va de même pour d'autres départements qui ont signé le même type de convention, comme le Gers qui l'a fait après vous ?
Christian Montin : Non, je n'ai pas d'informations très précises à ce stade, mais il semble bien qu'elles soient mises à mal partout. Au total quelque soixante départements avaient passé des conventions de ce type, avec une différence toutefois, contrairement à la nôtre, elles ne prévoyaient pas un maintien systématique des moyens par période de trois ans, mais comme la nôtre, elles permettaient de sortir de la logique de la calculette. Nous y revenons.
ToutEduc : Sur quoi peut porter "une réflexion sur la structuration du réseau scolaire en milieu rural" ?
Christian Montin : Nous devons offrir aux enfants une école de proximité, un enfant de maternelle ne peut pas faire 3/4h ou une heure de car matin et soir, mais aussi une école de qualité, ce qui suppose qu'elle compte suffisamment d'élèves pour avoir plusieurs classes, une offre périscolaire de qualité, des locaux adaptés, des équipements en quantité suffisantes, le tout porté par une collectivité ou un groupement de communes, de façon à éviter l'isolement de l'enseignant et des élèves... Ce sont deux impératifs contradictoires et nous avons trouvé, depuis 2014, des réponses équilibrées. Ce travail est nié quand notre convention est mise au panier, c'est une manque de considération à l'égard du monde rural.
Sur les conventions ruralités, voir ToutEduc notamment ici, ici, ici