Réforme d'Affelnet : un “pari réussi“ pour l'académie de Paris, mais la mixité reste “plus timide“ dans certains établissements parisiens
Paru dans Scolaire le lundi 29 août 2022.
“Le pari est réussi“, se félicitait lundi 29 août Christophe Kerrero à propos de la réforme de la plateforme Affelnet, chargée de l'affectation des élèves au lycée dans la capitale. Même si les données ne seront consolidées par le comité de suivi de la réforme qu'en décembre, le recteur de l'académie de Paris, qui présentait ce 29 août à la presse les priorités et les enjeux de cette rentrée 2022, a indiqué que les résultats entrevus à la rentrée 2021 (voir ToutEduc ici) “se confirment“ avec davantage de mixité sociale dans les établissements. Car Paris c'est, comme il le souligne, “l'académie du grand écart“ avec comme faiblesse principale une forte ségrégation sociale et scolaire.
Il n'y aurait ainsi pour ce début d'année scolaire aucun boursier non affecté, et un meilleur taux d'affectation général (baisse de 42 % des élèves non affectés). En outre, 68,7 % des élèves seraient satisfaits de leur affectaction sur le 1er vœu (+ 7,7 points) et le nombre de recours (275) aurait été divisé par quatre en un an. Sont soulignés les résultats à Henri IV et Louis-Le-Grand, dont le rattachement à Affelnet avait suscité beaucoup de débats en début d'année (voir ToutEduc ici) avec pour les deux établissements réunis 17,4 % de boursiers comptabilisés pour 2022 contre 8,4 % l'an dernier, et une moyenne pour les admis en hausse à 17,87 sur 20. De même, le vivier a été largement élargi (taux de pression), par exemple à Louis-Le-Grand où le nombre de candidats à IPS faible aurait augmenté de 72 %.
La réforme d'Affelnet, “cette année les familles s'en sont saisies“ estime pour sa part Claire Mazeron, DASEN, qui note un lissage dans les demandes entre les établissements. Par exemple le taux de pression du lycée Voltaire (nombre de vœux/ nombre de places), autrefois peu choisi, serait passé de 0,42 à 0,68 alors qu'à Charlemagne à l'inverse il aurait évolué de 2,04 à 1,26.
Interrogée par ToutEduc, Claire Mazeron explique que “la réforme dans un premier temps a beaucoup bénéficié aux lycées intermédiaires, ceux où il n'y avait aucune raison qu'ils soient évités. Pour certains lycées en périphérie, il peut y avoir des problèmes bâtimentaires, pour Rabelais par exemple (dans le 18ème arrondissement, ndlr), qui a été déplacé à plusieurs reprises c'est plus compliqué. Mais même dans ces lycées, on a eu beaucoup plus de vœux 1, 2, 3. Rabelais est plein, on n'a jamais connu une telle situation de remplissage, même avant la réforme.“
Elle reconnaît cependant que la mixité dans ces établissements (du nord ou de l'est parisiens) est “plus timide. Il y a encore des réticences parce que les familles parisiennes sont très investies sur l'éducation et expriment facilement des craintes, mais elles aussi en bénéficient. On le voit sur le niveau scolaire qui augmente, sur l'attractivité et sur la mixité sociale mais dans l'autre sens. C'étaient des lycées où il y avait énormément de boursiers, je pense à Bergson (19ème arrondissement, ndlr), de 60 % en 2020 on est tombé à 30 %, donc ça veut dire aussi qu'on cherche à attirer un autre public.“
Cette priorité d'agir sur “l'orientation et affectation pour lutter contre inégalités de destin“ se joue au lycée Général et Technologique mais également dans la voie professionnelle, jugée “pas attractive“ par le recteur et qui désigne ainsi l'autre faiblesse de l'académie.
Malgré un “regain d'orientation“ vers la 2nde professionnelle, avec 280 élèves supplémentaires inscrits, pour Christophe Kerrero “on ne changera pas l'image de la voie pro en une année ni deux“ et la transformation passe par la mise en valeur des créations (chef-d'oeuvre), de la qualité de l'enseignement, des débouchés. D'où l'idée de “rayonner“ à la fois sur le collège et le lycée professionnel car “ce qui pêche, c'est le manque d'intéractions“ entre les deux, mais aussi d'aider les LP “parfois en déficit de stage“ à rencontrer de nouveaux acteurs, ou encore via les conseils locaux école-entreprise (avec une gouvernance et un pilotage par les chefs d'établissement et d'entreprise) pour mieux faire connaître certaines filières.
Dernière priorité mise en avant par Christophe Kerrero, “lutter contre déterminismes sociaux“ via l'école primaire et les savoirs fondamentaux. Il indique que dans la capitale, la baisse démographique se poursuit dans le 1er degré avec 3 500 élèves en moins à la rentrée, après celle de 6 000 constatée l'an dernier, mais que celle-ci ne sera affectée par aucun retrait d'emploi. 207 contractuels ont été recrutés, dont un tiers étaient déjà présents l'an passé et ont obtenu un avis positif pour qu'ils prolongent ; Plus de 100 contractuels sont déjà affectés. Le taux d'encadrement dans les classes est en moyenne de 20 élèves par classe, tous niveaux confondus, contre 24 en 2015.
Le recteur estime que “les progrès de la recherche nous ouvrent de nouveaux horizons“ et qu'il faut ainsi “partir de la science“ pour inventer de nouvelles pédagogies. Est notamment cité un groupe académique qui s'informera des recherches scientifiques avec pour objectif de développer les sciences socio-comportementales.
Trois projets “innovants“ sont encouragés et font l'objet de développement, celui des écoles bilingues à Paris commencé en 2018 et qui passeront de 20 à 32, le lancement de 5 écoles “CAP maternelle“ (pratiques pédagogiques et gestes professionnels nouveaux) ainsi que des écoles “innovation“.
A noter que ce sont 3 400 AESH qui officieront dans l'académie de Paris à la rentrée 2022, soit 10 % des personnels de l'EN et 50 de plus sur un an. Si les besoins sont en train d'être recencés par les MPDH, le directeur de l'académie de Paris Antoine Destrès a fait la promotion du recrutement de ces personnels, car se pose la question du vivier de candidats.