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Associations : Le conseil constitutionnel valide le contrat d'engagement républicain

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le vendredi 13 août 2021.

La liberté d'association mise à mal ? C'est ce que pensent plusieurs députés qui souhaitaient voir censurer plusieurs articles de la loi confortant le respect des principes de la République conditionnant les subventions aux associations  au respect d’un contrat d’engagement républicain.

Les obligations prévues au titre de ce contrat sont : “respecter les principes de liberté, d'égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République au sens de l'article 2 de la Constitution, c'est-à-dire l'emblème national, l'hymne national et la devise de la République, celle de ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République et, enfin, celle de s'abstenir de toute action portant atteinte à l'ordre public.“

Le conseil constitutionnel précise qu'il résulte des travaux parlementaires que cette dernière obligation vise les actions susceptibles d'entraîner des troubles graves à la tranquillité et à la sécurité publiques. Pour les sages, les dispositions de la loi “prévoient que l'autorité ou organisme refuse cette subvention ou procède à son retrait lorsque l'objet de l'association ou de la fondation, son activité ou les modalités d'exercice de celle-ci sont illicites ou incompatibles avec le contrat d'engagement républicain.“

Les députés auteurs de la saisine, explique le conseil constitutionnel, “critiquent le caractère imprécis des obligations que ces associations doivent s'engager à respecter et le renvoi à un décret en Conseil d'État de la détermination des modalités d'application de ces dispositions“; ils estiment que cette imprécision “serait de nature à conférer aux autorités compétentes un pouvoir d'appréciation arbitraire pour attribuer des subventions publiques ou en exiger le remboursement en cas de non-respect du contrat d'engagement“. En résulterait ainsi “une méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence, de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ainsi que de la liberté d'association.“

Dans sa décision, le conseil constitutionnel assure que “la liberté d'association est au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et solennellement réaffirmés par le Préambule de la Constitution. En vertu de ce principe, les associations se constituent librement et peuvent être rendues publiques sous la seule réserve du dépôt d'une déclaration préalable“. Il précise que “l'obligation faite à une association de souscrire un contrat d'engagement républicain lorsqu'elle sollicite une subvention publique n'a pas pour objet d'encadrer les conditions dans lesquelles elle se constitue et exerce son activité.“

Cependant, l'obligation de restituer des subventions publiques déjà versées est, estiment les sages, susceptible d'affecter les conditions dans lesquelles une association exerce son activité. Ils rappellent alors que “les dispositions contestées prévoient que, en cas de manquement au contrat d'engagement, il est procédé au retrait de la subvention publique, à l'issue d'une procédure contradictoire, sur décision motivée de l'autorité ou de l'organisme, et qu'un délai de six mois est imparti à l'association pour restituer les fonds qui lui ont été versés. Toutefois, ce retrait ne saurait, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'association, conduire à la restitution de sommes versées au titre d'une période antérieure au manquement au contrat d'engagement“ et conclut que “sous la réserve figurant au paragraphe précédent, le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'association doit être écarté“, et déclare conforme à la Constitution l'article de loi attaqué.

L'article 16, lui, modifie les cas dans lesquels une association ou un groupement de fait peut faire l'objet d'une décision administrative de dissolution. Il ajoute que peuvent être imputés à l'association ou au groupement de fait certains agissements commis par ses membres, et permet la suspension, à titre conservatoire, de ses activités.

Concernant la dissolution administrative des associations ou groupements de fait, les députés “reprochent à ces dispositions de prévoir un nouveau motif de dissolution tenant à la provocation à des agissements violents à l'encontre des personnes, mais aussi des biens. En outre, ils considèrent que ces dispositions, en permettant de dissoudre les associations et groupements de fait à raison d'agissements commis par un ou plusieurs de leurs membres, introduiraient une présomption de responsabilité du fait d'autrui contraire aux ‘principes gouvernant la responsabilité pénale des personnes morales‘. Ces dispositions entraîneraient ainsi ‘des restrictions disproportionnées‘ à l'exercice de la liberté d'association“, selon les députés.

En quatre points, le conseil constitutionnel assure qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public ; que les dispositions contestées ne prévoient la dissolution que d'associations ou groupements de fait dont les activités troublent gravement l'ordre public car d'une part, “elles visent uniquement les associations ou groupements de fait qui provoquent à la commission d'agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens“, et de plus, “elles ne permettent d'imputer aux associations et groupements de fait les agissements de leurs membres que lorsqu'ils les ont commis en cette qualité ou que ces agissements sont directement liés aux activités de l'association ou du groupement, et que leurs dirigeants, bien qu'informés, se sont abstenus de prendre les mesures nécessaires pour les faire cesser, compte tenu des moyens dont ils disposaient“ ; que par ailleurs la décision de dissolution est prise par décret du Président de la République (décision qui doit être écrite et motivée et ne peut intervenir qu'après que l'association ou le groupement, assisté ou représenté le cas échéant par un conseil ou un mandataire, a été mis à même de présenter des observations écrites et, sur sa demande, des observations orales) ; enfin, qu'une telle décision peut faire l'objet d'un recours devant le juge administratif, y compris par la voie du référé, qui s'assure qu'elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité de sauvegarde de l'ordre public poursuivie, eu égard à la gravité des troubles susceptibles de lui être portés par les associations et groupements de fait visés.

Le conseil constitutionnel considère donc que le législateur n'a pas porté à la liberté d'association une atteinte qui ne serait pas nécessaire, adaptée et proportionnée, et il précise que “la dissolution administrative d'une association ou d'un groupement de fait constitue une mesure de police administrative et non une sanction ayant le caractère d'une punition. Le grief tiré de la méconnaissance du principe de personnalité des peines doit donc être écarté comme inopérant“. Il conclut en assurant que les mots "agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens" ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle.

Concernant la décision de suspension des activités d'une association ou d'un groupement de fait, les députés dénoncent le caractère excessif de la procédure de suspension, introduite par les dispositions contestées, qui méconnaîtrait la liberté d'association.

Les sages posent le constat que “le nouvel article L. 212-1-2 permet au ministre de l'intérieur de prononcer la suspension des activités d'une association ou d'un groupement de fait faisant l'objet d'une procédure de dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure en cas d'urgence et à titre conservatoire, pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une fois. Elle porte ainsi atteinte à la liberté d'association“. Or, “en permettant au ministre de l'intérieur de prendre une telle décision pour une durée pouvant atteindre six mois dans l'attente d'une décision de dissolution, ces dispositions ont pour objet de suspendre les activités d'une association dont il n'est pas encore établi qu'elles troublent gravement l'ordre public. Il résulte d'ailleurs des travaux préparatoires que cette décision de suspension vise à permettre aux autorités compétentes de disposer du temps nécessaire à l'instruction du dossier de dissolution.“

Ils estiment ainsi qu' “en permettant de prendre une telle décision, sans autre condition que l'urgence, le législateur a porté à la liberté d'association une atteinte qui n'est pas nécessaire, adaptée et proportionnée“, et que ces éléments de l'article 16 sont contraires à la Constitution.

La décision du Conseil constitutionnel ici

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