Scolaire » Actualité

Le rapport Mathiot - Azema s'inscrit dans la logique de la refondation de 2014

Paru dans Scolaire le mercredi 06 novembre 2019.

"Privilégier une approche progressive", être attentif "à la nécessaire stabilité générale d’un édifice d’éducation prioritaire dont la refondation est récente" et qui "n'a pas encore fait l’objet d’une évaluation", mais qui "rencontre l’adhésion de ses divers acteurs, y compris d’une large part des collectivités locales concernées"... Ces quelques formules donnent le ton du rapport qu'Ariane Azéma, inspectrice générale, et Pierre Mathiot, professeur des universités ont remis hier 5 novembre à Jean-Michel Blanquer (voir ToutEduc ici). Ils préconisent notamment de "reconduire à l’identique la carte nationale des réseaux d’éducation prioritaire renforcée Rep+" et de "prévoir un dispositif spécifique défini nationalement au bénéfice des écoles des petites villes et bourgs en difficulté sociale et scolaire".

S'agissant de la carte de l’éducation prioritaire renforcée (dite Rep+), la mission relève son adéquation "à la réalité des difficultés sociales et scolaires, en lien avec la géographie de la politique de la ville", ce qui n'est pas "pas toujours" le cas pour les REP. Les auteurs estiment que les mesures de ressources humaines ont eu "des effets apparemment légèrement positifs sur la stabilité des équipes enseignantes", malgré "la persistance de problèmes de recrutement et d’affectation dans une partie des établissements de l’éducation prioritaire (turnover, poids des non titulaires)" et "les insuffisances de la politique en matière de formation initiale ou continue des personnels". Ils soulignent "l’intérêt des expérimentations en cours de mixité au collège" et "l’utilité et l’intérêt du référentiel de l’éducation prioritaire", mais aussi "une articulation encore trop ponctuelle des politiques territoriales scolaires avec les politiques interministérielles et avec les politiques éducatives et de sectorisation des collectivités".

Les réseaux REP+ devraient pouvoir "se doter d’un programme de recherche-action centré sur l’accompagnement progressif des enseignants et sur leur outillage à la lutte contre la difficulté scolaire". Les auteurs s'inquiètent de la situation des lycées qui doivent "prendre en compte des situations locales difficiles" et ils considèrent que "des moyens pourraient être affectés aux lycées qui accueillent un pourcentage significatif d’élèves en provenance de collèges de Rep+ pour mettre en place des Cordées de réussite" et "gérer tous les enjeux périscolaires", les personnels pouvant "bénéficier de primes spécifiques et d’une prise en compte dans leur promotion".

Ils ajoutent qu' "à la différence de l’éducation prioritaire, il n’existe pas à proprement parler de politique scolaire rurale dédiée dans la mesure où les élèves résidents ou scolarisés dans les espaces ruraux ne connaissent pas de sous-performance scolaire significative", même si "les parcours scolaires post-collège et post-baccalauréat d’une partie des jeunes résidents dans les territoires ruraux sont marqués par des écarts à la moyenne voire des difficultés, selon une ampleur comparable à ceux qui caractérisent les élèves de l’éducation prioritaire". Quant aux conventions ruralité, leurs effets seraient "limités et contrastés selon les départements concernés", faute notamment de critères d’intervention "harmonisés au niveau national" et projections démographiques solides.

Les deux rapporteurs portent un intérêt particulier à la question des transports, dont "les éventuelles incidences sur la réussite et le parcours des élèves sont peu étudiées" alors, que du fait de leur nouvelle organisation territoriale (loi NOTRe), "on pourrait assister à l’avenir à un allongement des temps de transports, voire à une dégradation des conditions de transport, tout particulièrement dans les territoires ruraux en périphérie des grandes agglomérations". Ils préconisent "d’engager conjointement avec les collectivités en charge (...) un bilan national sur les transports d’élèves afin de disposer de données de référence nécessaires au pilotage académique et local en matière de carte scolaire et d’offre de formation".

Ils s'intéressent aussi à "l’écart de recrutement social moyen entre enseignement public et l'enseignement privé sous contrat" qui "s’est accentué ces dernières années", un constat qui "ne s’applique pas également à tous les territoires" puisque, là où il est fortement implanté, "la composition sociale des écoles et des établissements tend à être assez proche de celle du public". "À l’inverse, dans nombre d’académies très urbaines (...), l’enseignement privé sous contrat d’association participe de mécanismes accentuant, parfois fortement, les écarts sociaux et scolaires entre écoles et établissements."

Le rapport souligne encore la "diversité des politiques territoriales académiques, voire infra-académiques", le faible développement des "formes de contractualisation ou de planification concertée de nature territoriale". Ariane Azéma et Pierre Mathiot préconisent d'ailleurs "que, dans certaines configurations territoriales à enjeux, puisse être expérimentée une contractualisation tripartite associant l’enseignement privé sous contrat, les autorités académiques et la(les) collectivité(s) concernée(s) définissant des objectifs pluriannuels d’évolution en faveur de la mixité sociale et scolaire".

Ils préconisent également d'étendre à quelque 150 écoles des territoires ruraux en difficulté sociale et scolaire le dédoublement des CP et CE1 ,"soit préférentiellement d’envisager un dispositif similaire à Plus de maîtres que de classes". Ils regrettent par ailleurs que les politiques éducatives et les politiques d’aménagement du territoire, qui "ressortent de compétences croisées entre État et collectivités", ne fassent pas nécessairement l’objet d’une coordination. Dans "les territoires de très faible densité, on pourrait expérimenter, au sein de certains collèges par exemple, des politiques de mutualisation des services publics telles que celles qui sont développées dans le cadre des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASAP) et des maisons France service".

Au-delà des REP+ et du système scolaire en milieu rural, "la mission préconise que les académies puissent concentrer leurs marges indemnitaires au bénéfice des postes recensés comme non attractifs géographiquement", et elle suggère "de substituer (avec clause de sauvegarde) à l’actuel dispositif indemnitaire de la Rep, un dispositif finançant, par exemple, une prime d’installation pour l’affectation à titre définitif sur ces postes non attractifs". S'agissant des élèves, elle préconise que "soit mis en place dans chaque académie un plan de lutte contre le non-recours aux bourses scolaires", que "soit renforcée la formation des personnels des établissements à l’accompagnement des familles les plus fragiles", que "la politique sociale académique constitue un volet du dialogue de gestion annuel académique" et "que l’usage des fonds sociaux fasse l’objet d’un bilan académique au regard des politiques sociales déployées par les collectivités locales". Elle préconise également "qu’un vademecum soit élaboré conjointement entre le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, auquel pourrait s’associer le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, et les associations nationales de collectivités, en associant les organisations représentatives des personnels, des élèves et des parents d’élèves" pour "traiter du patrimoine, des services et des organisations territoriales propres aux politiques scolaires et éducatives".

Le rapport "Mission Territoires et réussite" ici

 

 

 

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →