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"L'école maternelle est devenue un peu plus grise" (V. Bouysse, IGEN)

Paru dans Petite enfance, Scolaire le jeudi 25 octobre 2012.

"Autrefois, les murs des salles de classe des écoles maternelles étaient couverts des productions colorées des enfants. Ils sont à présent envahis d'écrits. L'école maternelle est devenue un peu plus grise." Viviane Bouysse, inspectrice générale de l'Education nationale, intervenait hier dans le cadre des rencontres de l'OZP sur le thème de l'école maternelle et du rôle qu'elle peut jouer dans l'éducation prioritaire et pour les publics en difficulté. Elle se demande d'ailleurs si l'école maternelle n'est pas "victime de son succès" : "elle réussit très bien avec les enfants qui y arrivent avec un langage avancé, on n'a jamais vu autant d'enfants qui 'savent lire' en entrant au CP." L'école maternelle s'est "primarisée", les formes pédagogiques la rapprochent de celles des classes élémentaires, mais du coup, l'écart se creuse avec les enfants "qui ne sont pas entrés dans le système" et qui sont déjà considérés comme "en difficulté", alors qu'ils "sont dans la moyenne de leur âge".

Il faudrait privilégier les petits groupes, mais les enseignants ont la tentation de traiter leur classe comme un grand groupe, au risque de voir les enfants comme un ensemble uniforme. L'inspectrice souligne aussitôt que l'école maternelle dans les zones d'éducation prioritaires, n'a pas bénéficié de ressources supplémentaires, et qu'on voit "des classes de 28 élèves dans des secteurs difficiles".

Elle rappelle que toutes les classes n'ont pas droit à un(e) ATSEM (agent spécialisé des écoles maternelles) et que, même si c'est le cas, on ne peut pas définir un taux d'encadrement en divisant le nombre d'enfants par le nombre d'adultes. Elle se demande d'ailleurs si on ne pourrait pas faire évoluer le dispositif, par exemple confier les tâches de nettoyage à une entreprise, et réserver aux ATSEM le soin d'assurer la continuité des fonctions éducatives avec les temps d'accueil du matin, de la restauration scolaire... On pourrait d'ailleurs imaginer d'autres intervenants rémunérés par la commune dans l'école. "Pourquoi pas une EJE [éducatrice de jeunes enfants, ndlr] par école ?" 

Comment faire pour que l'école maternelle soit utile aux enfants qui en ont le plus besoin, sa mission étant de "réduire les conséquences scolaires des différences [socio-culturelles, ndlr] entre les enfants". Cette école doit être "l'école du langage", et il faut privilégier les interactions individuelles, la reformulation des mots et des phrases des enfants, trouver des instants avec chacun d'entre eux. Elle n'apprécie pas le mot d'ordre d'Alain Bentolila, "un mot par jour", ce qu'elle trouve d'ailleurs être un objectif très limité, mais elle n'est pas hostile à des moments "où on rebrasse des mots qu'on a appris". Interrogée sur le programme PARLER et la "méthode Zorman" (voir ToutEduc "Il n'y a pas de méthode Zorman" déclare à ToutEduc Michel Zorman), elle refuse de se prononcer sur un sujet sur lequel elle prépare un rapport. Elle souligne pourtant la faiblesse du nombre des élèves qui l'ont expérimenté, mais considère que "ça donne à penser, ça fait réfléchir sur les formes pédagogiques et sur ce que peuvent apprendre des élèves". 

Aménager des moments d'interaction avec les enfants, pour parler avec chacun d'eux, et reformuler leurs propos, suppose que "les autres aient des choses à faire", qu'ils aient des activités, et qu'on parle ensuite avec eux de ce qu'ils font. Ils doivent "agir, prendre des initiatives, construire des choses, faire des essais, prendre des risques", "éprouver le plaisir de la réussite", et comprendre ce qui fait qu'ils ont réussi, adopter "une posture réflexive". Elle ajoute que "les enfants sont intéressés par les mots", qu'ils ont envie d'avoir "du pouvoir sur la langue". En revanche, Viviane Bouysse met en garde contre les enseignements précoces : "le travail sur les sons et les lettres, s'il intervient trop tôt, peut générer des inhibitions."

La formation des enseignants doit leur permettre de "voir où en sont ces enfants" et de "témoigner de leurs évolutions". Ils ont "besoin du regard de l'adulte". Elle ne cache pas qu'elle "espère que les livrets d'évaluation vont évoluer" au profit de portfolios qui conservent les traces de l'évolution de l'enfant. Celui-ci pourra mesurer le chemin parcouru, et ses parents avec lui. "Travailler avec les parents, ça ne s'improvise pas, c'est un travail qui doit être pris en compte [dans le travail des enseignants, ndlr]. Comment on les accueille dans la classe, comment on leur montre que jouer avec un enfant n'est pas du temps perdu, comment on regarde un livre avec un enfant même si on ne sait pas lire..."

Mais avec les enseignants, ce sont les inspecteurs de circonscription qui doivent être formés. Il y a "un regard à construire." Et elle serait assez favorable à ce que, dans chaque circonscription, "un conseiller pédagogique au moins puisse répondre à ces besoins là".

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