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Exclusif. Formation des enseignants : vers un consensus que soutient la CDIUFM

Paru dans Scolaire le jeudi 04 octobre 2012.

Alors que s'achève la concertation pour la refondation de l'Ecole, Pierre Statius, 1er vice-président de la CDIUFM (Conférence des directeurs d'IUFM) fait le point pour ToutEduc sur ce qui fait, à peu près, consensus, et les réactions de certains universitaires qui voient la création des ESPE comme une menace. 

ToutEduc : Vous avez participé à la concertation préalable à la refondation de l'Ecole. Quel regard portez-vous sur ces débats ? 

Pierre Statius : La concertation s'est déroulée dans un climat très serein, la parole était très libre, des personnes qui ne se rencontraient jamais ont pu se parler. Et, sur la formation des enseignants et des personnels d'éducation, nous nous retrouvons tout à fait dans les points de convergence que le recteur Boissinot a mis en évidence. Il était admis, avant même qu'on en débatte, qu'elle se ferait dans des écoles placées au sein de l'Université, et non pas indépendantes des universités comme en Suisse, et que le recrutement se ferait au niveau master. Cela n'a pas été remis en cause, et on a vu disparaître, au fur et à mesure des débats, de faux problèmes, comme l'opposition entre la professionnalisation et la formation disciplinaire. Les deux vont de pair.

ToutEduc : Cette formation professionnelle est-elle conçue comme un compagnonnage ?

Pierre Statius : Non, comme une alternance, et ce n'est pas la même chose. Dans un compagnonnage manque le cadre pour l'analyse des pratiques et la réflexion épistémologique. Mais il faut bien le reconnaître, cette professionnalisation, nous devons la construire. Jusqu'à présent, nous n'y sommes pas parvenus. Mon analyse personnelle est que nous vivons davantage une crise de l'idée de formation, qu'une crise de la formation elle-même. Il faudrait plutôt parler de "réussite contrastée" que d'échec des IUFM, mais de fait, ils ne sont pas parvenus à faire émerger une nouvelle idée de la formation, sans doute parce qu'ils étaient mal installés, à mi-chemin entre les universités et les rectorats. 

ToutEduc : Où situez-vous le concours de recrutement ?

Pierre Statius : La CDIUFM [voir ToutEduc Formation des enseignants : la CDIUFM comme D. Kambouchner plaident pour un concours en fin de M2, ndlr] s'est prononcée, avec nombre d'organisations syndicales, pour un concours en M2. Nous craignions que le placer en M1 impose un modèle consécutif, d'abord le disciplinaire, puis la pratique, notamment pour le second degré. Mais il faut bien admettre, avec Alain Boissinot, que ce n'est pas l'essentiel. C'est surtout la nature du concours qui importe. Si les ESPE, les  "écoles supérieures du professorat et de l'éducation", organisent la formation des enseignants, elles feront marcher du même pas théorie et professionnalisation. L'Université aura essentiellement pour tâche la vérification des savoirs disciplinaires.

ToutEduc : Mais cette formation ne doit-elle pas commencer bien avant le parcours en master ? Les ESPE ne devraient-elles pas intervenir au niveau licence ?

Pierre Statius : C'est effectivement un des points qu'a souligné, dans sa synthèse, le recteur Boissinot. L'existence des ESPE oblige à remettre à plat la licence, donc à reconfigurer le paysage universitaire. On peut imaginer des modules à l'intérieur de la licence, ou des licences "métiers de l'enseignement" co-gérées par les universités et les ESPE. 

ToutEduc : Les universités ont, avec la réforme de la "masterisation", récupéré la formation des enseignants, chacune à sa façon...

Pierre Statius : Effectivement, et la "crise du vivier" est, pour partie, due à cet éclatement de la formation, devenue illisible. Il faudra un cadrage national et une instance nationale de régulation pour rétablir de la cohérence.

ToutEduc : Les UFR littéraires et les UFR scientifiques ont, par la voix des présidents des conférences de leurs doyens, CDUL et CDUS, pris violemment parti pour une limitation du rôle et des missions des ESPE. Leur existence pourraient sinon mettre "en péril l'économie de la connaissance", "déposs[éder] l'Université de ses missions fondamentales" et même contribuer à "sa désorganisation". Comment comprenez-vous leur inquiétude ?

Pierre Statius : C'est plus qu'un inquiétude, c'est une déclaration de guerre. Ces universitaires se méfient de toutes les composantes hors UFR [unités de formation et de recherche, ndlr], certains vont même jusqu'à dénoncer les écoles d'ingénieurs universitaires. Ils préféreraient une simple coordination, un service commun inter-universitaire. De plus, les UFR ont récupéré les formations disciplinaires au CAPES qu'assuraient précédemment les IUFM, et elles voudraient bien les conserver, avec les étudiants de master. Ceux qui se destinent à l'enseignement s'inscriront dans les ESPE, qui seront des écoles au sein de l'Université, et non plus auprès des UFR. A mon sens, on assiste à la défense d'un pré carré, à une conception frileuse de l'Université. Mais ce n'est pas la position de la CPU [conférence des présidents d'université, ndlr], qui joue un rôle très positif.

ToutEduc : Sur l'année universitaire qui commence, ce sont 43 000 futurs enseignants qui seront recrutés. Les IUFM, qui continuent d'exister en attendant les ESPE, vont-elles pouvoir constituer le vivier nécessaire ?

Pierre Statius : Ce sera très compliqué... 

Entretien relu et amendé.

 

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