Enseignants: une dernière "génération sacrifiée" avant le "redressement de la République" (V. Peillon)
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 28 août 2012.
"Nous ne sommes aucunement satisfaits de la situation actuelle des enseignants, en dépit des mesure d'urgence que nous avons prises." Vincent Peillon a ouvert la réunion d'accueil des enseignants stagiaires du second degré de l'Académie de Créteil hier, 27 août 2012. Il a reconnu que son auditoire formait "une génération sacrifiée", la dernière promotion "victime de la réforme de la masterisation".
Les professeurs du second degré qui entrent en fonction cette année ne profiteront pas du rétablissement d'une année complète de stage intégrée à leur formation, prévue pour la rentrée 2013. Ils bénéficieront d'une mesure palliative avec 3 heures de décharge hebdomadaire . "Je suis le premier à reconnaître que c'est insuffisant", a regretté V. Peillon.
Evoquant la valeur des enseignants, et décrivant l'Ecole comme "le futur de la France", l'ancien professeur de philosophie a annoncé la venue d'un "temps nouveau" qui permettra de "mieux reconnaître le statut des enseignants, mieux les former, mieux les recruter".
Tous les départs à la retraite remplacés en 2013
Pour mettre un terme à la"véritable saignée" provoquée par le gouvernement précédent, V. Peillon a annoncé que tous les départs à la retraite seraient remplacés à la rentrée 2013. 22 100 nouveaux enseignants seront donc recrutés par concours externe. Selon l'entourage du ministre, le nombre de postes offerts sera sensiblement le même en 2014.
Alors que 15 % des postes à pourvoir sont restés vacants lors de la session 2012 du CAPES (voir Touteduc CAPES: 15 % des postes non pourvus), V. Peillon a rejeté l’idée d’une désaffection pour le métier. "Il ne faut pas confondre crise du recrutement et crise des vocations" a-t-il affirmé. Le rétablissement d'une "véritable formation initiale" devrait attirer davantage de candidats. "Cette année, il y aura plus d'inscrits au concours parce que les étudiants ont compris que le regard porté sur le métier va changer."
A la rentrée 2013, les futurs enseignants bénéficieront d'une année complète de stage, comme c'était le cas avant la masterisation. Elle se déroulera entre les épreuves écrites et orales du CAPES, séparées d'un an. Le principe du tutorat sera maintenu. V. Peillon a fait l’éloge des tuteurs, de "véritables pédagogues" qui offrent aux nouveaux enseignants une "entrée progressive dans le métier et un accompagnement indispensable".
Professeur, un "emploi d'avenir"
L'évolution de la formation initiale des enseignants implique une meilleure prise en charge des étudiants modestes. Pour le ministre, "la diversité des enseignants devrait répondre à la diversité des élèves de l'Académie de Créteil". Les concours de l'enseignement doivent redevenir un moyen de "dépasser ses origines sociales et intégrer la plus importante institution de l'Etat, celle qui mérite le plus d'attention, l’Ecole".
Dans cette optique, le gouvernement Ayrault a prévu de créer 18 000 "emplois d'avenir professeur" (voir Touteduc Emplois d'avenir professeur : l'article du projet de loi concernant les futurs enseignants). Ils visent à "accompagner des jeunes qui, souhaitant poursuivre des études et se destiner aux métiers de l’enseignement, ne peuvent le faire faute de moyens".
Pour V. Peillon, "c'est la première fois que l'on met en place une mesure de cette ampleur": les anciennes écoles normales d'instituteurs et le système d’IPES "ne concernaient qu'un nombre réduit d'élèves". En élargissant leur public cible à "tous les boursiers du supérieur", les emplois d'avenir doivent pallier les insuffisances du système des bourses scolaires. "Les bourses n’ont pas permis à certains d'aller jusqu'au bout de leur formation car ils étaient obligés de travailler, parfois au détriment de leurs études", a rappelé le ministre de l’Education.
D'après le projet de loi qui sera présenté mercredi 29 août à la presse, seuls les établissements publics pourront recruter un étudiant sur la base d'un "emploi d'avenir professeur". Pour la FEP-CFDT, cette décision pénalise les élèves boursiers qui voudraient préparer les concours de l'enseignement privé.