Les arts et la culture à l'école, un combat qui reste à gagner (Pierre Baqué)
Paru dans Scolaire, Culture le jeudi 03 mai 2012.
La vie de Pierre Baqué s'identifie au combat pour l'enseignement des arts et de la culture. Il nous en donne un récit qui s'achève lorsqu'en janvier 2008, il remet au ministère son projet pour "un enseignement obligatoire de l'histoire des arts pour tous les élèves" des premier et second degrés. Il a été professeur de dessin en lycée, il a inauguré en 1967 la première option "arts", il a participé à la création du CAPES d'arts plastiques, en 1982, il est "chef de la mission des enseignements artistiques", et raconte comment le texte de loi auquel il travaille "disparaît dans les abysses", comment se met en place avec René Monory une politique en art et culture, comment se succèdent les ministres, comment il est plusieurs fois renvoyé à ses chères études, rappelé, sommé de travailler alors qu'il n'a "ni bureau, ni secrétariat, ni collaborateurs, ni budget", et sans pouvoir abandonner ses fonctions universitaires, puisqu'il est professeur à Paris-I..., comment les projets se montent, s'égarent dans l'interministériel, repartent, retombent, sont relancés, comment tout dépend d'une rencontre, d'un mot lancé un peu fort qui fait sortir dans le couloir un directeur de son bureau dont on vous refusait l'entrée, d'un concours de circonstances, de volontés politiques incertaines, de contraintes budgétaires ou d'enthousiasmes non dénués d'arrières pensées, comment deux ou trois lettres, "histoire de l'art" ou "histoire des arts" peuvent tout changer...
"En matière d'arts et de culture à l'école, des progrès considérables ont été réalisés au cours des quarante dernières années", mais "il reste encore beaucoup à faire". Ce récit, subjectif, "vécu de l'intérieur", est évidemment destiné à tous ceux qu'intéressent les relations entre l'Education et la Culture, mais il permet aussi, par ce prisme, de comprendre comment fonctionne l'administration française, dont Pierre Baqué décrit toutes les strates, montrant comment l'anecdotique et la marche du monde se combinent au quotidien, d'autant que, avec un style plein de retenue le plus souvent, il n'hésite pas à ponctuer son texte de jolies "vacheries" et de réflexions assassines, telle celle-ci, à propos des "plumes" ministérielles ou présidentielles : "Que se passe-t-il lorsque la pensée du rédacteur est floue, que sa culture est 'moyenne', que ses informations sont fragmentaires (...) Réponse : il ne se passe rien."
"40 ans de combat pour les arts et la culture à l'Ecole, 1967 - 2007), préface de Luc Ferry, L'Harmattan, 450 p., 39,50 €