M. Gauchet: L'Ecole doit bénéficier d'un "minimum de consensus social" sur ses objectifs
Paru dans Scolaire le samedi 18 juin 2011.
L'Ecole "ne retrouvera pas sa légitimité sans un minimum de consensus social sur les objectifs qu’elle doit poursuivre et sur le caractère indispensable des apprentissages", estime Marcel Gauchet dans un entretien qu'il donne à "La Vie". Le philosophe évoque pour partie ses rapports avec l'Eglise et la Chaire du Collège des Bernardins qu'il préside jusqu'en décembre, mais il donne un condensé de sa réflexion sur le système scolaire. Pour lui, nous sommes "dans un moment de confusion maximale". On demande à l’école "à la fois de rendre les enfants heureux et de former des traders performants" et "plus personne ne détient l’autorité du savoir".
"Il y a 30 ans, on a fait le procès du modèle méritocratique", mais on a "tordu le bâton dans l’autre sens, laissant le champ libre à la reproduction des inégalités sociales". De plus, alors que notre société "valorise une certaine forme d’hédonisme", il revient à l’école "d’enseigner des savoirs qui ne génèrent ni utilité directe ni plaisir immédiat".
Marcel Gauchet ne plaide pas pour un retour en arrière, impossible, mais pour une implication plus grande des parents et des "responsables publics" et il attend de la société qu'elle "instaure un contrat social sur lequel l’école pourra s’appuyer pour exercer une autorité légitime".
Toutefois, pour lui, cette autorité est nécessairement fondée sur "la continuité avec le passé", et l'Ecole doit montrer "aux élèves qu’ils sont les dépositaires temporaires de quelque chose qui vient de loin et qui mérite d’être poursuivi". C'est pour lui, ce "mystère qui donne du sens à la vie."