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Le feuilleton (II,4) : Comment "la science" a pris le pouvoir

Paru dans La lettre le vendredi 03 octobre 2025.

Nous poursuivons la publication de notre feuilleton, "Petite histoire des années Blanquer". Après une première saison consacrée à "la maternelle à trois ans" (ici, ici, ici), la seconde est titrée "comment la science et ceux qui prétendent l'incarner ont pris le pouvoir rue de Grenelle". Avec le 3ème épisode (ici) (les deux premiers ici), nous avons vu que n'étaient considérées comme scientifiques que les études publiées dans des revues scientifiques internationales, donc le plus souvent anglo-saxonnes. Mais quelles sont les principales conclusions de la recherche ainsi délimitée ? Aujourd'hui, la pédagogie doit être explicite, à venir, les méthodes de lecture et la "réponse à l'intervention". 

Les deux premiers épisodes  le 3ème

4ème épisode : explicite, structuré, progressif

Si les savoirs sur l'enseignement doivent être objectivable, comme nous l'avons vu avec l'épisode précédent, les savoirs enseignés doivent l'être également. Ils doivent être "explicites, structurés, progressifs", et ces mots forment un mantra, repris sans cesse comme s'il s'agissait d'une évidence, par les amis de Jean-Michel Blanquer.

Est-il nécessaire d'avoir acquis les notions de longueur, de largeur et d'angle droit avant de vouloir calculer la surface d'un rectangle ? de connaître les nombres entiers avant d'aborder les décimales ? de distinguer les noms et les adjectifs avant d'étudier les accords ? de savoir lire des lettres avant de lire des syllabes puis des mots ? Parfois n'est-ce pas parce que les élèves ont besoin de réaliser une opération complexe qu'ils vont découvrir des notions de base ? Je laisse aux didacticiens le soin d'en débattre. Je sais seulement que les sciences de l'éducation, au même titre que toutes les sciences, "dures" ou "molles", nous apprennent à nous méfier des allant-de-soi et des "évidences".

Comme l'indique la notice Wikipedia consacrée à la "pédagogie explicite", celle-ci est née aux USA, la notion a été reprise dans le domaine francophone par trois chercheurs québécois, Clermont Gauthier, Steve Bissonnette et Mario Richard, puis par l'équipe de l'université de Grenoble. Toujours selon Wikipedia, cette pédagogie veut mettre "le savoir au centre du dispositif de transmission des connaissances et des savoir-faire", contrairement aux "pédagogies constructivistes" ou aux "pédagogies traditionnelles". Les leçons ont toutes la même structure, en sept phases. Il n'y en a plus que cinq dans la brochure publiée en juin 2022 par le Conseil scientifique et les auteurs semblent, à bien des égards, un peu gênés. Ils affirment ainsi que "l’enseignement explicite ne constitue pas un modèle unique et rigide", qu' "aucune méthode d’enseignement n’est infaillible et ne peut garantir à elle seule le succès de tous les élèves (...). L’enseignement explicite a donc toute sa place dans la boîte à outils des enseignants, et ainsi servir leur professionnalité. Celle-ci s’exprime dans le fait d’avoir la flexibilité nécessaire et la capacité de savoir juger quand et comment agir à bon escient en classe."

Bref, ce n'est qu'une modalité parmi d'autres, qui est efficace "pour l’apprentissage de notions nouvelles", mais "lorsque les élèves ont déjà acquis une bonne maîtrise de la notion ou du domaine étudié", "un enseignement davantage axé sur la résolution de problèmes peut être profitable (...). Plus les apprenants ont une maîtrise de l’objet d’apprentissage, moins il est nécessaire de l’enseigner explicitement."

Finalement, le document (ici) se résume à une série de conseils de bon sens, correspondant à ce que font tous les enseignants, à la condition de ne les suivre que lorsqu'il y a lieu ; à d'autres moments, un temps magistral peut avoir tout son sens et, à d'autres, des temps de découverte et de socio-construction d'un savoir seront plus efficaces, la notion d'efficacité méritant d'ailleurs d'être très sérieusement interrogée, j'aurai l'occasion d'y revenir. Cela n''empêche pas les membres du CSEN de répêter sans cesse et sans craindre de se contredire, que tout enseignement doit être "explicite, structuré, progressif", même quand cela débouche sur des échecs, comme on le verra la semaine prochaine avec la querelle des méthodes de lecture.

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