La Lettre de ToutEduc n° 765
Paru dans La lettre le mercredi 02 juillet 2025.
La lettre du 2 juillet 2025
Le rapport d'enquête sur la prévention des violences dans les établissements met en cause les fondements du système scolaire, et nous prendrons le temps de l'analyse. En attendant, nous publions le 3ème épisode du 1er volet de notre "histoire secrète du ministère Blanquer", l'école à trois ans.
Le feuilleton. Nous avons vu que cette mesure a permis de passer d'un taux de scolarisation des 3 ans de 97,5 % à 99 %, les enfants arrivés illégalement en Guyane et à Mayotte n'étant vraisemblablement pas comptabilisés (malgré la loi, actuellement, 4 % des enfants allophones ne sont pas scolarisés). Nous avons vu aussi que le ministre croyait que la plupart des communes versaient déjà aux écoles maternelles privées, volontairement, "le forfait d'externat" et que le fait que cette contribution devienne obligatoire ne changeait rien pour elles. Erreur, elles n'en versaient souvent qu'une partie. Dès l'annonce présidentielle, les communes font valoir qu'il s'agit d'une "extension de compétences" qui devra être compensée par l'Etat. Le Gouvernement décide de limiter le remboursement "à l'augmentation des dépenses obligatoires", les municipalités qui versaient déjà la totalité du forfait ne peuvent donc prétendre à rien, ce qu'elles trouvent injuste. Quand je lui en fais la remarque, le directeur de cabinet, Christophe Kerrero me répond "dura lex sed lex". 46 M€ étaient inscrits au PLF 2024 à ce titre. Le mode de calcul du droit à compensation devrait entraîner une diminution de cette somme dans les années à venir et les communes éligibles devraient progressivement supporter la totalité de cette dépense.
Autre conséquence de la loi, les jardins d'enfants doivent disparaître. Ils accueillent quelque 10 000 enfants, notamment à Paris et en Alsace. Jean-Michel Blanquer exige leur disparition, il leur concède quelques années pour opérer la transition et se transformer en écoles. Ils avaient jusqu'en 2024 pour le faire. Finalement, l'année dernière, une loi pérennise leur existence, mais il ne sera plus possible d'en ouvrir de nouveaux.
Evidemment, ce que le ministre a en tête, ce sont les programmes. C'est pour lui, et pour la droite, une obsession. En 2002, la gauche avait publié, au terme d'une vaste concertation et avec l'appui des organisations syndicales, des programmes pour l'école primaire que la droite abroge en 2008, estimant qu'ils font la part trop belle aux apprentissages aux dépens de la "transmission de connaissances", la gauche en 2015 en publie de nouveaux que les syndicats applaudissent, mais qui, à nouveau, font sans doute la part trop belle à la créativité de l'enfant. La maternelle devenue obligatoire a besoin de programmes suffisamment prescriptifs pour fournir aux inspecteurs une liste de connaissances dont ils pourront apprécier l'acquisition.
La nouvelle présidente du Conseil supérieur des programmes, Souâd Ayada, est chargée de leur rédaction et elle publie au mois de décembre 2020 une "note" qui met le feu aux poudres. Malgré quelques précautions de langage pour affirmer qu'elle n'est pas "l’antichambre de l’école élémentaire", l'école maternelle doit néanmoins "permettre à tous les enfants d’accéder sans difficulté préalable aux apprentissages fondamentaux", et les tests de CP peuvent "dessiner l’esprit dans lequel le travail avec les enfants de maternelle peut être mené". Les observateurs notent surtout que ce programme, rédigé à plusieurs mains entre CSP et DGESCO est peu cohérent. Le texte finalement publié au mois de juin 2021 est moins prescriptif que ne l'aurait souhaité J-M Blanquer, mais les tests de début de CP rétro-agissent sur l'amont et dessinent effectivemeent l'esprit dans lequel les enseignants doivent travailler, la grande section, dédoublée en éducation prioritaire comme le CP et le CE1, est bien une propédeutique au CP.
Et ce que le programme de 2021 n'avait pu faire, les programmes pour le français et les mathématiques aux cycles 1 et 2 le réalisent au mois d'octobre 2024. Au mois d'avril de cette année, le nouveau "socle commun" parachève la destruction des cycles, et fragilise encore davantage l'autonomie de la maternelle.
LES DEPËCHES
Le système éducatif
Ecole "au dehors et en contact avec la nature", une proposition de loi et une note de la DEPP (la dépêche)
Un projet de loi pour l'éducation aux médias et à l'information (la dépêche)
Les personnels
CAPLP (concours externes publics) : 185 postes restent vacants (la dépêche)
CAPES, CAPET, CAPEPS, CPE : des déficits comparables à ceux de l'an dernier (la dépêche)
Le Pacte enseignant, un dispositif intéressant mais déjà menacé (Cour des comptes) (la dépêche)
Polynésie française : la Cour de cassation précise les limites de l'autonomie du territoire à l'aune du droit à la retraite des enseignants (la dépêche)
Les élèves
4 % des enfants et jeunes allophones ne sont pas scolarisés (DEPP) (la dépêche)
Instruction en famille : les résultats en demi-teinte de la loi (Cour des comptes) (la dépêche)
La revue des débats
Opinions sur l’École et l’éducation, Semaine du 22 au 28 juin 2025 (P. Watrelot) (la dépêche)
Officiel
Au JO des 25 et 26 juin, au BO, au BOAMP. La GRH de proximité (la dépêche)
Au JO du 27 au 29 juin : les infirmier.e.s, deux DASEN, l'enseignement privé, l'apprentissage, l'EMC... (la dépêche)
A l'agenda
Du 2 au 4 juillet - Sèvres. Éduquer dans un monde incertain : un enjeu mondial (Colloque international)
Du 7 au 9 juillet - Liège - Congrès international de l’AREF (Actualité de la Recherche en Éducation et Formation)
Du 19 au 22 août - Précieux (Loire) - Congrès de l'ICEM
Du 25 au 28 août - Ax-les-Thermes - 22ème édition de LUDOVIA (Université d’été du numérique éducatif)
Du 9 au 11 octobre - Roubaix. Les fonctions exécutives, de la théorie à la pratique (colloque de la FNAME)
Le 14 octobre - Dijon - Choisir, orienter et réussir dans le nouveau lycée général (IREDU)
Du 2 au 6 décembre - Evreux - Festival international du film d'éducation
Les 4 et 5 décembre - Aubervilliers - L’éducation et la formation des jeunes migrants au XXème et XXIème siècle (colloque international)
Du 22 au 24 avril 2026 - Paris - Biennale internationale de l'éducation, de la formation et des pratiques professionnelles
Le 11 juin 2026 - Nantes - "Devenir auteur, autrice de sa pratique, de son métier" (ICEM)