Ne pas agir pour l'éducation, un coût démesuré pour les Etats (UNESCO)
Paru dans Scolaire, Orientation le lundi 17 juin 2024.
“Nous n'avons pas atteint les résultats espérés“ déplorait lundi 17 juin la numéro 2 de l'ONU, Amina Mohammed, à l'occasion d'une réunion des ministres de l'Education à Paris autour du quatrième objectif de développement (ODD4) fixé par les Nations Unies pour 2030.
La tendance est confirmée par Audrey Azoulay qui évoque, malgré de nombreux progrès enregistrés ces dernières années, les “250 millions enfants qui restent exclus des bans de l'école“ dans le monde en 2023, soit 6 millions de plus en comparaison avec 2021. De même, 70 % des enfants des pays à revenus faibles ou intermédiaires ne sont pas en mesure de comprendre un texte simple à l'age de 10 ans. Mais alors que le temps presse, “faisons-nous tout ce qui est en notre pouvoir ?“, demande la directrice générale de l'UNESCO au regard du manque d'investissement dans l'éducation.
Car la déscolarisation et le manque de compétences de base a un coût énorme pour l'économie mondiale : 10 000 milliards d'euros par an, selon un rapport qui, pour la première fois, quantifie “le prix de l'inaction“ (le PIB mondial global serait de 100 000 milliards en 2023, ndlr) en termes d'éducation.
Par exemple, explique Matthias Eck (spécialiste du programme Education à l'Unesco, co-auteur du rapport avec Justine Sass), réduire de 10 % les taux d'abandon scolaire précoce et d'insuffisance des compétences de base entraînerait une hausse de 1 à 2 % du PIB annuel. Et les coûts ne sont pas que monétaires : l'insuffisance des compétences de base augmente de 57 % la prévalence des homicides. Chez les filles, elle serait même associée à une augmentation des grossesses précoces de l'ordre de 69 %.
Parmi les questions posées à travers ce rapport sont soulignés les compétences socio-émotionnelles, l'accès à la préscolarisation ou encore la corrélation entre l'arrêt des études et le travail des mineurs. La première des 12 recommandations consiste à ce que les gouvernements allouent 4 à 6 % de leur PIB à l'éducation, afin d'offrir aux enfants 12 années d'instruction gratuite.
Pour le président chilien Gabriel Boric Font, qui concluait la rencontre, les objectifs fixés par l'ONU pour 2030 sont “ambitieux mais réalisables“, si tant est que l'on considère l'éducation comme un investissement et non comme une dépense. D'ailleurs certains exemples le prouvent, comme la transformation du système d'éducation qui s'est opérée en Finlande “en très peu de temps“, ou encore l'expérimentation innovante d'un échange de services de la dette contre des financements pour l'éducation en Côte-d'Ivoire. Mais il estime qu'un pays ne peut affronter seul les difficultés, qu'il est nécessaire de partager les succès comme les échecs, tout comme il est capital de “réactiver la transformation éducative“, notamment à travers le renforcement de l'école publique à but non lucratif et en améliorant les conditions de travail des enseignants, tout en les impliquant dans la définition des politiques éducatives.
Le rapport ici