Les adolescents et l'information, loin des idées préconçues (CLEMI - CEMEA)
Paru dans Scolaire le dimanche 02 juin 2024.
"Contrairement au mythe des 'digital natives' et à la représentation ordinaire selon laquelle les adolescents publieraient à tout va sur les RSN (réseaux sociaux numériques), dans leur majorité les adolescents déclarent être prudents quand il s’agit de partager leurs 'opinions' sur les plateformes numériques. 70 % ne le font jamais. Les filles un peu moins encore (74%)." C'est ce que montre une enquête sur les pratiques informationnelles de lycéens scolarisés en 1ère GT, 1ère professionnelle ou 2ème année de CAP. Celle-ci a été commandée par le CLEMI dans le cadre du projet européen DE FACTO.
Ont été analysées 1 284 réponses à un questionnaire distribué par les CEMEA de Normandie lors d'interventions dans les classes concernées. Et le premier résultat mis en évidence par Sophie Jehel et Jean-Marc Meunier (Paris 8) est que l'intérêt pour l’actualité est présent chez les adolescents, "à un niveau élevé". Une autre étude, menée auprès d'élèves de seconde (OPNAN 2023) a d'ailleurs montré que "seuls 3% des jeunes interrogés déclarent ne pas s’informer de l’actualité". L'enquête auprès des élèves de première précise : "la presse en ligne comme hors ligne occupe une place importante de leur système informationnel : 13% disent acheter de la presse écrite et autant disent lire des journaux gratuits."
Et quand on leur demande de citer un sujet d’actualité particulièrement marquant survenu au cours des six derniers mois, seuls 15% des jeunes n’y répondent pas ou ne peuvent pas en citer (21% pour les filières professionnelles, 12% pour les filières GT, 19 % parmi les enfants de chefs d’entreprise et d’agriculteurs, 10% des enfants de parents cadres et 14% des enfants de classes populaires : "Les classes favorisées ne développent pas des comportements homogènes vis-à-vis de l’information. L'évènement le plus cité est la guerre en Ukraine. "Les garçons vont citer davantage de sujets liés au sport, et particulièrement le foot, ou aux jeux vidéo (19% vs 10% des filles) (...). Les filles (8% vs 2% de garçons) sont plus sensibles aux faits divers."
Le journal télévisé plus que les réseaux sociaux
La télévision reste pour 43% des adolescents la source principale d’information. Viennent ensuite "les stories sur Instagram" (17%) mais quand on leur demande à quel média ils font confiance, le journal télévisé est encore en tête. Parmi les élèves de la voie professionnelle, 20 % ne font confiance à aucun média d’information et seuls 14 % font confiance à l’information diffusée sur les réseaux socionumériques. Il leur est en effet proposé sur les RSN "un assemblage de contenus structurés par les algorithmes de recommandation (...). La lecture des RSN construit de ce fait un flux sans cohérence véritable qui peut pour certains ressembler à un chaos."
Mais tous n'ont pas les mêmes pratiques de vérification de l'information. Les premiers (la moitié de l'échantillon) font confiance aux médias les plus connus, les seconds (un tiers) s'intéressent à l'auteur de l'article et se méfient quand le titre est racoleur, d'autres enfin (17 %) s'interrogent sur la cohérence du contenu médiatique.
A noter que seuls 50% des élèves de première, un tiers des élèves de Cap ont "déjà suivi un ou plusieurs cours en Éducation aux médias et à l’information" ou ont "participé à un média scolaire". Or "les élèves des filières Pro sont plus de 90 % à penser que ces cours les ont aidés (...) à mieux s’informer, mais aussi (...) à être capables de repérer des fake news et à être plus prudents dans leurs propres publications." De plus, "l’élargissement du cercle de discussion (au-delà du cercle familial ou amical, ndlr) autour des sujets d’actualité est un facteur crucial pour approfondir l’évaluation de l’information et pourrait constituer un levier éducatif important".
L'étude ici