De la terminale à l'enseignement supérieur, des choix d'orientation genrés malgré des combinaisons de spécialités similaires (SIES, DEPP)
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 21 mai 2024.
Comment évolue l'orientation des filles et des garçons lors du passage de l'année de terminale, ponctuée par la phase d'inscription sur Parcoursup, à l'entrée dans l'enseignement supérieur ? C'est à cette question que tentent de répondre les services statistiques des ministères de l'Education nationale et de l'enseignement supérieur dans une note publiée le 21 mai.
Déjà, à l'entrée en terminale, “les garçons choisissent plus souvent des spécialités scientifiques, en particulier les mathématiques“, le pourcentage de filles variant a contrario de 35 % pour la combinaison mathématiques/ physique‑chimie à 86 % pour humanités, littérature et philosophie (HLP)/ langues littérature et cultures étrangères et régionales.
Mais si les différences de choix d’orientation dans l’enseignement supérieur entre les filles et les garçons “découlent en partie de celles observées dans les spécialités suivies au lycée“, des différences s’observeraient aussi au sein d’une même combinaison d’enseignements. Par exemple, on constate davantage de différences dans les choix d’orientation lorsque la spécialité sciences de la vie et de la Terre (SVT) a été suivie en terminale. Et c'est dans la combinaison mathématiques/physique-chimie que la différenciation des parcours après la terminale entre filles et garçons est parmi les plus fortes de toutes les filières.
Pour comprendre ces effets, la DEPP et le SIES étudient les choix des 321 100 élèves lors de la phase principale de Parcoursup, entre la phase de confirmation (phase 1) et celle d'acceptation des vœux (phase 3).
Ils ciblent en premier lieu la doublette de spécialités mathématiques/physique-chimie. Bien que 27 % des propositions d’admission en CPGE sont acceptées par les élèves de ce groupe, la probabilité que les filles ont d’accepter définitivement cette orientation est deux fois inférieure à celle des garçons à niveau de mention au baccalauréat et niveau social équivalent. De même, les écoles d’ingénieurs “attirent également plus de garçons que de filles“, de quoi estimer que “de manière générale, les filles ont une probabilité plus faible de se diriger vers des filières scientifiques sélectives“, sachant qu'elles ont à l'inverse bien plus de probabilité d'intégrer un parcours accès santé spécifique (PASS) ou une licence avec option santé (LAS) que leurs camarades masculins.
D'ailleurs, pour les filières de santé “la différenciation des vœux entre filles et garçons se renforce entre la phase de confirmation de vœux et celle d’acceptation des propositions dans Parcoursup“, indiquent les auteurs de la note, notamment au regard de ce que les filles acceptent plus souvent que les garçons une proposition pour ces filières, parmi les étudiants ayant reçu au moins une proposition d’admission en LAS.
Pour la plupart des filières, il apparaît peu d'évolution entre la phase de confirmation des vœux (phase 1) et celle de propositions d’admission (phase 2), à niveau scolaire et social équivalents. Ce qui “va plutôt dans le sens d’une absence de discrimination lors de la phase de propositions d’admission par les établissements“, plaide le document. Les disparités de choix entre filles et garçons évoluent donc légèrement mais restent très importantes en CPGE scientifiques, en BUT production, en écoles d'ingénieurs et en licence sciences et technologies (garçons surreprésentés), contrairement aux PASS, LAS, Licence SHS ou autre PASS-Licence santé dans lesquelles les filles sont largement plus présentes au terme de la 3ème phase.
Autre exemple, avec la combinaison physique-chimie/SVT, où “les filles ont plus tendance à aller vers des filières relatives à la santé et les garçons à aller vers des filières de production ou des écoles d’ingénieurs.“ Ainsi les PASS “sont choisies à peu près dans les mêmes proportions en phase 3 par les filles et les garçons (..) même si cela va toujours dans le sens d’une légère surreprésentation des filles, qui se crée au moment de la phase 1 mais se résorbe pour partie au fil des phases.“ Quant à la filière Licence Sciences-Technologie, elle a deux fois plus de probabilités d'être choisie par les lycéens, tandis que les diplômes d’État (D.E) du secteur sanitaire, principalement constitués des formations en soins infirmiers, ont une cote presque trois fois plus forte chez les filles.
En mathématiques/SVT, les garçons sont également surreprésentés dans les licences Sciences-Technologie, les quatre autres débouchés principaux (Licences Santé, Sciences humaines et sociales - SHS, Droit-économie-gestion - DEG, D.E secteur sanitaire) sont davantage investis par les filles.
Enfin en SVT/SES, trois des quatre principaux débouchés de la combinaison sont particulièrement genrés, les garçons vont davantage en licences Sciences-Technologie, les filles davantage en licences SHS et en D.E secteur sanitaire. Ces écarts sont dus principalement aux choix différents des filles et des garçons lors de la phase de confirmation des vœux et n’évoluent pas significativement entre les différentes phases de la procédure d’admission pour une même filière.
Pour expliquer en quoi les garçons “privilégient des filières scientifiques sélectives, en priorité les classes préparatoires et les écoles d’ingénieurs“ et les “filles ont des probabilités beaucoup plus élevées de choisir leur poursuite d’études à l’Université et dans les filières, sélectives ou non, de santé“, il est question de deux grands types de mécanismes, un lié “aux stéréotypes de genre, par lesquels les filles ont plus de difficultés à se projeter dans des filières majoritairement masculines, et réciproquement“, l'autre à “une moindre confiance en elles-mêmes, à compétences équivalentes, notamment en mathématiques“.
La note ici