Scolarisation d'enfants d'origine Rom : le Conseil d'Etat condamne à la fois l'Etat et la commune de Ris-Orangis
Paru dans Scolaire le lundi 11 décembre 2023.
"Des adultes, accompagnés d'enfants, de nationalité roumaine et d'origine rom, se sont installés sans autorisation dans le courant de l'année 2012 sur un terrain situé sur le territoire de la commune de Ris-Orangis (...). Ces enfants, après que le maire eut, au mois de septembre 2012, d'abord refusé de les inscrire sur la liste des enfants à scolariser, ont été scolarisés dans un local de la commune de Ris-Orangis, attenant à un gymnase, à compter du 21 janvier 2013, ces modalités de scolarisation, hors de tout établissement scolaire, ayant pris fin le 19 février 2013, date à laquelle les enfants ont été, sur réquisition du préfet de l'Essonne, scolarisés dans des écoles de la commune."
Les parents et plusieurs associations s'étaient adressés à la justice administrative. Le tribunal administratif de Versailles avait annulé la décision du maire en 2017, en 2020,la cour administrative d'appel de Versailles avait rejeté l'appel formé par la commune qui se pourvoit en cassation.
Le Conseil d'Etat rappelle que "l'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'Etat". Il souligne que "lorsque le maire dresse (...) la liste des enfants résidant sur le territoire de sa commune qui sont soumis à l'obligation scolaire, il agit au nom de l'Etat. En revanche, il agit au nom de la commune lorsqu'il décide de l'inscription d'un enfant dans une école de la commune en fonction de la sectorisation définie par délibération du conseil municipal (...)".
La Haute juridiction note que la décision de scolariser dans un local dédié ces élèves a été précédée d' "un échange de courriels entre la directrice des services académiques de l'éducation nationale et le maire", la DASEN "a indiqué confirmer la mise à disposition d'un enseignant spécialisé ayant les compétences requises dans la prise en charge des élèves à besoin éducatif particulier et a relevé que ceux-ci seront scolarisés dans un local dédié (...), le maire ayant pris, pour sa part, acte de ce que sera garantie la présence d'un personnel dédié et spécialisé." La décision a donc bien été prise conjointement par le maire et par l'Etat. "En jugeant que la décision, révélée le 21 janvier 2013, devait être regardée comme prise seulement par le maire de Ris-Orangis au nom de la commune (...) la cour administrative d'appel s'est méprise sur la nature de la décision attaquée."
Or la scolarisation "de douze enfants de nationalité roumaine et d'origine rom, âgés de cinq à douze ans, dans un local attenant à un gymnase municipal, aménagé en salle de classe au moyen d'équipements sommaires, hors de tout établissement scolaire et à l'écart des autres enfants scolarisés de la commune, alors que des places étaient disponibles dans des écoles de la commune, les privant ainsi en particulier de l'accès au service de restauration scolaire et aux activités complémentaires ou périscolaires organisées au sein des écoles, méconnaît le principe d'égalité de traitement des usagers du service public, quelle que soit leur origine. Les requérants sont donc fondés à soutenir que cette décision qui, ainsi qu'il a été dit, a été prise conjointement par le maire au nom de la commune de Ris-Orangis et par l'Etat, est illégale."
L'Etat et la commune sont donc condamnés "solidairement".
La décision 441979 et 438289 du 8 décembre 2023 ici et ici