Laïcité et esprit critique : "une certaine idée de l'humanité" (N. Vallaud-Belkacem)
Paru dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 09 décembre 2016.
Le "Prix de la laïcité de la République française" a été remis, ce 9 décembre à la FOL (fédération des oeuvres laïques) du Var pour son opération "Les Ambassadeurs du vivre ensemble". Jean-Louis Bianco, le président de l'Observatoire, a également remis 5 mentions spéciales, au Conseil départemental de Haute-Garonne pour son "parcours laïque et citoyen" (voir ToutEduc ici), aux "Régies de quartier", à l'association Co-exister pour sa vidéo qui présente la laïcité "en 3 minutes" (ici), à Laïque'cité pour "Les Jeux de la Marmotte" (ici) et aux élèves du lycée Monnet-Mermoz d'Aurillac qui ont travaillé sur la laïcité en slam, en tag et en vidéo.
Ces prix étaient remis à l'occasion de la "journée de la laïcité", créée l'an dernier pour le 110ème anniversaire de la loi de 1905, mais Najat Vallaud-Belkacem rappelle que la laïcité à l'école date de 1882, un an après la loi sur la gratuité. Il fallait que soient réduits les obstacles matériels puis spirituels avant de décréter l'obligation scolaire, et que l'Ecole accueille "tous les enfants", qu'elle reçoive la mission de "former des citoyens". La République a fait "le choix de donner à chacun une même place", "d'instaurer un espace de rassemblement", et de porter ainsi "une certaine idée de l'humanité, du progrès". La ministre de l'Education nationale a également rappelé la ligne de "fermeté" de son administration : "ne laisser aucune atteinte à la laïcité sans suite, mais sans jamais s'interdire de penser" pour "redonner à chaque acte sa dimension", voir s'il relève de la volonté de s'attaquer à la laïcité, ou "de l'adolescence".
L'esprit critique suppose de la persévérance et de la modestie
Elle fait le lien entre "laïcité" et "esprit critique", et justifie l'ajout du verbe "penser" au "lire, écrire, compter", notamment avec l'EMI (éducation aux médias et à l'information) et l'EMC (enseignement moral et civique); elle appelle à "renouer avec le débat", avec l'Humanisme et les Lumières, avec "l'esprit critique" dont elle fait l'éloge, il n'a rien à voir avec "l'esprit qui toujours nie", mais il suppose de la persévérance, de la curiosité, de la modestie et de l'écoute.
Ce sont les valeurs portées par plusieurs projets retenus par la DGESCO (direction générale de l'enseignement scolaire), le CorteX qui propose aux enseignants des formations à l'esprit critique (ici), un "atelier philo" en maternelle animé par un enseignant "plus de maîtres que de classes", le projet Forccast de Sciences-po qui propose aux élèves de distinguer polémiques et controverses, une enseignante du lycée Van Gogh (Aubergenville) quidemande à ses élèves de prouver que ce qui est dit et écrit est vrai...
Auparavant, lors d'une table ronde, Anne-Marie Chartier avait défini l'école comme le lieu où "il n'y a pas de secret des sources", où l'on doit toujours pouvoir dire d'où l'on tient telle ou telle affirmation. Patrick Weil avait estimé qu'il était de la responsabilité des programmes d'histoire de faire en sorte que "tous les enfants y aient une place", or l'Histoire de France évoque plus souvent les épisodes européens qu'africains ou ultra-marins. Il ajoute qu'on ne peut développer son esprit critique si on n'est pas "de plain pied" avec celui avec qui on converse, si on n'est pas sûr de son identité.
Photo DR, Illustration reproduite avec l'aimable autorisation de l'Association Aristide Briand- Saint-Nazaire