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» La recherche en éducation est-elle scientifique ? et a-t-elle un impact sur les pratiques pédagogiques ? Un dossier de l'IFE

Paru dans Scolaire, Périscolaire le mardi 21 janvier 2014.

Les pays membres de l’OCDE dépensent 15,5 fois plus pour la recherche médicale que pour la recherche en éducation, et les résultats de PISA témoignent pourtant d'une certaine urgence. Mais quelle recherche pour l'éducation ? comment passer du laboratoire au terrain ? la recherche "scientifique" est-elle toujours scientifique ? la comparaison avec la médecine ne témoigne-t-elle pas de l'existence d'un arrière plan idéologique ? Ce sont toutes ces questions que se pose Olivier Rey dans un dossier de veille scientifique de l'IFE (institut français de l'éducation) à paraître dans quelques jours.

Il remarque d'abord qu' "en France comme dans la plupart des pays développés, la recherche en éducation 'traditionnelle' a mauvaise réputation" et que beaucoup, parmi les décideurs politiques comme parmi les journalistes, comme Maryline Baumard (Le Monde, auteure de La France enfin première de la classe chez Fayard) sont tentés par l' "’evidence-based education", un "concept controversé qui a largement débordé son aire anglo-saxonne d’origine".

En ce qui concerne les sciences de l'éducation "traditionnelles", elles mobilisent en France quelque 700 enseignants-chercheurs (rattachés à la 70° section du CNU), mais certains chercheurs préfèrent se définir sociologues, philosophes, historiens, psychologues, économistes, etc. De fait, les approches interdisciplinaires ou multi-référentielles sont de plus en plus fréquentes au sein des équipes de recherche: "Il paraît par exemple de plus en plus difficile de prétendre cerner une question comme 'l’échec scolaire dans les quartiers populaires' sans appréhender ce qui se passe dans la classe et hors la classe, ce qui se passe dans le processus de socialisation familiale comme ce qui se passe dans l’apprentissage de la lecture, sans élucider ce qui est dû à la forme scolaire forgée en d’autres temps et ce qui est dû aux organisations professionnelles et administratives liées aux politiques d’éducation prioritaire, etc."

La tentation du modèle médical

Mais, sans qu'Olivier Rey le dise explicitement, ces travaux s'inscrivent dans la logique du complexe, et ne donnent pas toujours des réponses simples, univoques qu'attendent les décideurs et les commentateurs. D'où la tentation de se rapprocher du modèle médical, d'autant que "les sciences cognitives et les neurosciences" reprennent "les protocoles des sciences expérimentales et miment autant que possible la situation du laboratoire (avec groupe témoin, variables contrôlées, etc.)". La démarche serait ainsi débarrassée "de toute valeur ou idéologie".

Mais est-ce possible ? "Si la médecine peut se donner comme objectif la guérison d’un malade, l’éducation ne peut se donner comme horizon que la formation –jamais achevée- d’une personne dont elle ne peut que partiellement entrevoir la réalisation (...) On peut certes vouloir améliorer la réussite scolaire d’un élève à tel niveau de scolarité, mais, sauf à restreindre les buts de l’éducation à des micro-performances (réussir un examen dans telle discipline), comment prétendre avoir réussi à former complètement un individu voire à l’éduquer ? (...) La recherche en éducation doit par conséquent toujours osciller entre chercher à s’approcher le plus possible du 'vrai', scientifiquement étayé, et du 'bien', qui est affaire de valeurs et d’éthique."

L'éducation fondée sur des preuves scientifiques

Quant à "l'Evidence Based Education" ou EBE, une expression difficilement traduisible en français, elle entend fonder les politiques et les pratiques éducatives sur les résultats, les "preuves" de la recherche, améliorer la qualité scientifique de la recherche en éducation et privilégier les démarches expérimentales ainsi que les méta-analyses (les revues systématiques de recherches). Cette ambition a été entérinée par le le No Child Left Behind Act, signé par G.W. Bush début 2002 : "cette loi exprime clairement la volonté d’orienter le financement public vers les recherches permettant des evidence-based strategies." Depuis, le débat "entre partisans et adversaires de l’EBE n’a pas cessé" depuis plus de 10 ans.

Il lui est reproché de postuler "qu’un lien de causalité peut être établi entre telle pratique ou tel dispositif et ses effets attendus sur une population" en se fondant sur des "randomized controlled trials" ou échantillons contrôlés, comme en médecine. Et pour certains, elle fait plus de mal que de bien. Un chercheur comme Claude Lessard estime que "plus on cherche à évacuer l’idéologie du débat (...) plus on lie en quelque sorte la science à une idéologie particulière qui refuse de se nommer comme telle (...) Le piège, c’est de réduire l’apprentissage à ce qui est mesurable (...) et la valeur de l’éducation à son instrumentalité."

L'enseignant n'est pas un fonctionnaire d'exécution

Mais, note le dossier, la question dépasse le cadre de l'EBE. L'importance donnée aux résultats des tests internationaux comme PISA témoigne d'une tendance à considérer les effets de l’école sous le seul angle des résultats scolaires. De plus, la recherche en éducation, quelle que soit son orientation, correspond-elle "aux situations ordinaires de l’enseignement" ou "à des situations extraordinaires correspondant à des expériences, des innovations ou des mobilisations exceptionnelles des acteurs" ? L'enseignant n'étant ni un technicien ni un "fonctionnaire d’exécution", comment peut-il développer sa réflexion et "prendre une distance critique par rapport à sa pratique"? Encore faut-il éviter que ce "praticien réflexif" ne développe une forme de pensée "très individualiste", "qui tourne sur elle-même, nourrie par sa seule créativité personnelle" alors qu'il s'inscrit dans une institution.

Et, continue d'interroger l'auteur de ce dossier, l'enjeu ne serait-il pas "moins d’imposer des procédures idéales et standardisées aux praticiens que de produire une zone de questionnement partagé entre la pratique et la recherche" ? On sait en effet que "les idées et les comportements des professionnels sont finalement plus influencés par leur expérience, par leurs collègues et par les pratiques de leurs organisations que par toute autre forme de preuve". C'est vrai des enseignants, des médecins ou des juristes. Une activité professionnelle "n’est pas une science, mais une pratique qui à voir avec l’incertitude, le jugement, l’utilisation de la science, l’utilisation de certains outils et technologies, les valeurs, etc. Les résultats de la recherche ne sont, dans ce cadre, qu’une source d’information en concurrence avec beaucoup d’autres."  Un groupe de chercheurs anglais qui travaillait sur l’évaluation des élèves et qui s'opposait à "l'implantation frénétique" des tests standardisés, a multiplié les articles scientifiques, mais aussi les guides pratiques, les brochures, les mémentos… et il a finalement au "plus d’impact sur les enseignants que sur les politiques, en modifiant les perceptions et les pratiques en profondeur". Conclusion "les universitaires doivent savoir traduire leurs résultats en différents discours appropriés aux différents publics : responsables politiques, éducateurs, chefs d’établissements, administrateurs scolaires, relais d’opinion…". C'est peut-être ce qui fait défaut à la recherche en éducation française.

Le dossier "Entre laboratoire et terrain : comment la recherche fait ses preuves en éducation" sera prochainement téléchargeable sur le site de l'IFE, ici.

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