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L'apprentissage en distanciel peut-il se substituer au présentiel ? (revue Dialogue)

Paru dans Scolaire le dimanche 15 août 2021.

“A distance, du sens est produit, des idées s'expriment mais désincarnées“ estime Geneviève Guilpain dans le dernier numéro de la revue Dialogue (Groupe français d'éducation nouvelle) consacré aux effets suscités par les enseignements à distance et en présentiel. La professeure de philosophie, qui témoigne de son expérience du distanciel, décrit l' “impossibilité de percevoir les réactions que suscite (s)on propos“, et explique : “dans cet espace neutralisé, désert, ma parole ne rencontre aucun corps sensible qui vient l'accueillir, l'amortir, ou la renvoyer; elle se perd, je ne sais où. Je comprends soudainement ce que signifie ‘parler dans le vide‘.“ Si le cours est vu comme un espace qui se charge progressivement de sens, elle explique qu'a contrario “l'écran ne laisse pas passer l'énergie humaine. Celle-ci s'y cogne et meurt.“

Saloua Kaabeche, professeure d'espagnol en collège, confirme que la limite du distanciel “c'est justement l'accès à l'élève". Selon elle, “en bouleversant l'école et les rapports humains qui se jouent dans les situations d'apprentissage, la 'continuité pédagogique' (mise en place pendant le confinement, ndlr) a eu l'avantage de révéler au grand jour une problématique, des défaillances qui existaient déjà mais que nous n'avions alors pas besoin ou pas envie de voir.“ Elle ajoute que “pour beaucoup de familles, notamment parmi les plus défavorisées socialement mais pas seulement, ce virage numérique pris par l'école est difficile à accepter“, et elle constate que les ENT (espaces numériques de travail, ndlr) “permettent certes de faciliter la transmission des informations mais pas celle des savoirs“..

Pour Stéphanie Fouquet, le confinement a été l'occasion de réinterroger l'emploi du numérique. Au travers de l'exemple d'ateliers d'écriture en distanciel, elle se demande si l'acte pédagogique doit uniquement être pensé en présentiel, dans une logique vivante et incarnée. Elle explique que lors de ces ateliers “des interactions ont manqué“, alors qu' “en présentiel, les actions ont un impact émotionnel“. Elle ajoute que durant les différentes étapes du projet (écriture de mots selon des thèmes donnés, écriture de commentaires sur les autres récits) “l'enseignant n'a pas pu apporter les régulations possibles en présentiel, et presque impossibles à anticiper en distanciel.“. Elle évoque la dimension humaine de l'enseignement dans un “collectif agissant“, chacune des étapes nécessaires à toute conceptualisation ne peut se passer d'altérité (l'autre, sa fragilité, sa force). De plus, selon elle “tout apprentissage d'une nouvelle notion entraîne une part de déstabilisation cognitive.(..) Apprendre ne laisse pas indemne.“

Cette idée, Michel Baraër la traite dans son édito: “Nous apprenons avec et par d'autres personnes : parents, pairs, enseignants.. et il est clair que ce processus a besoin de la coprésence pour que les échanges se développent dans la complexité de leur mise en œuvre : essais, erreurs, hésitations, contradictions, régressions, avancées...“ Comme Saloua Kaabeche, qui évoque l'enseignement à distance comme un “sentiment de solitude permanent“, il note que “si l'apprentissage individuel n'a sans doute pas trop été affecté par le confinement, l'enseignement, lui, en a beaucoup souffert.“ Pour lui, l'apprentissage à distance fonctionne si il est un prolongement, articulé avec la vie en commun.

Revue Dialogue N°181 : Perspectives sur l'enseignement à distance – Penser la présence, 8€, le site ici

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