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En cas de malaise cardiaque d’un élève à l’école, l’appel aux services de secours doit être immédiat (Conseil d'Etat)

Paru dans Scolaire le mercredi 10 mars 2021.

Un élève de 6 ans et demi, porteur d’une anomalie cardiaque rare et non détectée, est décédé d’un arrêt cardiaque dans la cour de son école, à la sortie de la cantine, pendant la pause méridienne, à Colomiers (31). Malgré les soins d’urgence prodigués d’abord par le personnel de surveillance, puis par les services de secours, la reprise de l’activité électrique de son cœur n’a pu être obtenue qu’au bout d’une heure et il est décédé à l’hôpital, quelques jours après, des suites des lésions cérébrales irréversibles causées par la privation prolongée d’oxygène.

Le TA de Toulouse, saisi par les ayant-droits de l’enfant, a d’abord estimé, dans un jugement avant-dire droit, que le fait, pour le personnel présent d’attendre dix minutes pour appeler le SMUR était constitutif d’un défaut d’organisation du service de nature à engager la responsabilité de la commune. Mais, après expertise, il a finalement refusé de donner satisfaction à la demande d’indemnité, en indiquant que la perte d’une chance de survie de l’enfant n’était pas établie et que la faute du service n’avait donc causé aucun préjudice.

La commune et son assureur ont cependant fait appel du jugement avant-dire droit devant la CAA de Bordeaux et la famille de l’enfant décédé en ont fait autant s’agissant du jugement définitif. L’expertise ordonnée par le TA avait révélé que l’enfant n’avait été découvert que 2 minutes après le malaise, à un moment où près de 90 enfants se croisaient pour quitter la cantine ou y entrer entre les deux services. La Cour a estimé, dans ces circonstances, que ce délai ne suffisait pas à caractériser un défaut se surveillance. L’enfant n’étant pas encore en arrêt cardio-respiratoire, il a été immédiatement placé en position de sécurité et la personne qui l’avait découvert, titulaire d’une attestation de formation aux premiers secours a assuré une surveillance de ses fonctions vitales. Le pouls s’étant rapidement arrêté, des manœuvres de réanimation ont immédiatement été mises en œuvre par plusieurs personnes, dont une était titulaire d’un certificat de sauveteur secouriste. C’est alors qu’un professeur était allé prévenir le directeur etr a récupéré un défibrillateur. Les secours ont été appelés par le directeur dès qu’il a été informé de la situation et deux chocs électriques ont été délivrés à l’enfant avant l’arrivée des secours.

Au total, il y a eu un délai de deux minutes entre le malaise de l’enfant et sa découverte. Trois minutes se sont ensuite écoulées avant la prise ce conscience de la gravité de la situation par le personnel présent et le début des massages cardiaques. Et dix minutes ont séparé la survenance du malaise et l’appel aux services du SMUR. Si l’un des médecins experts intervenus dans cette affaire a estimé que les personnels communaux n’avaient "pas d’entraînement suffisant" et que la situation a créé pour eux "un stress émotionnel difficile à maîtriser", il n’en a pas moins convenu, d’une part, qu’on ne saurait faire reproche aux personnels d’avoir mis plusieurs minutes pour apprécier la gravité de l’état de l’enfant, dès lors qu’il ne s’agissait pas de professionnels et surtout que l’arrêt cardio-respiratoire ne s’était pas installé d’emblée, et de l’autre, que, dès qu’ils ont été à même d’évaluer la gravité de la situation, "ils ont aussitôt mis en œuvre une prise en charge cohérente et adaptée". Quant au second expert, il a considéré que les manœuvres de réanimation avaient débuté immédiatement après la constatation de l’absence de pouls.

La Cour a donc conclu qu’aucune faute dans l’organisation du service ne pouvait être retenue contre la commune de Colomiers et rejeté les demandes d’indemnisation. Elle est contredite sur ce point par le Conseil d’Etat, saisi par les ayant-droits de la victime : il considère que la Cour a commis une erreur de qualification juridique, dès lors qu’il "appartenait aux personnels, même s’ils étaient en mesure d’apporter eux-mêmes les premiers secours, d’appeler immédiatement les services de secours, comme le prévoient d’ailleurs toutes les consignes en matière de premier secours". Le conseil approuve donc la position du TA sur trois points : il a eu raison d’ordonner une expertise, utile pour apprécier le taux de perte de chance de survie ; il a eu raison de conclure à une faute dans l’organisation du service ; et il a eu raison d’écarter l’existence d’une faute tenant à un défaut de surveillance.

Le Conseil estime en conséquence qu’il y a bien eu un délai excessif entre la constatation du malaise et l’appel aux services de secours ; mais il considère que ce caractère excessif n’a pas eu d’incidence sur les chances de survie de l’élève, en particulier du fait de la maladie cardiaque génétique dont il était atteint. Il annule l’arrêt de la CAA de Bordeaux, rejette toutes les requêtes présentées contre le jugement du TA et refuse la demande d’indemnisation.

 

André Legrand

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