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Santé à l'école : une problématique universelle, des réponses divergentes (Revue internationale d'éducation de Sèvres)

Paru dans Scolaire le mardi 07 juin 2022.

La question de la santé à l'école implique les élèves, les familles, les enseignants, les personnels médicaux et paramédicaux, constatent Hélène Buisson-Fenet (CNRS – ENS Lyon) et Yannick Tenne (IGERS) qui coordonnent le dossier du dernier numéro en date de la Revue internationale d'éducation de Sèvres. Avec la charte d’Ottawa (1986), "la promotion de la santé ne se borne pas seulement à préconiser l’adoption de modes de vie qui favorisent la bonne santé ; son ambition est le bien-être complet de l’individu" et cette ambition suppose de "reconnaître l’autonomie de l’individu, qui devient acteur de sa santé en cultivant son estime de soi, en aménageant son environnement, en prenant soin de ses liens civiques et sociaux", notent les deux auteurs.

Ils notent "des éléments de convergence", qu'il s'agisse de "l’approche des besoins spécifiques des enfants, élèves en situation de handicap ou en difficulté scolaire notamment, (laquelle) est présente désormais dans tous (l)es pays (évoqués)", ou des questions de prévention, d’hygiène, d’alimentation, des réponses à apporter à la difficulté scolaire ou de "la recherche du bien-être des élèves" perçue partout comme "une condition partagée pour améliorer l’environnement éducatif et par voie de conséquence les résultats scolaires". Toutefois, ajoutent-ils aussitôt, des problématiques similaires "ne produisent pas des réponses uniformes", d'autant que "les attentes des institutions et des familles ne convergent pas nécessairement", qu'on pense à la prévention de l’obésité infantile et juvénile, qui ne va pas sans contraindre les habitudes alimentaires familiales, ou à la scolarisation des élèves en situation de handicap...

Dans les écoles rurales de Shanghai, alors que "l’alimentation et le bien-être physique sont des éléments importants pour les autorités chinoises", les enseignants sont insuffisamment formés et les familles, "selon leur origine sociale, ne suivent pas les recommandations" des enseignants. Autant de sources de tension. Un enseignant déclare d'ailleurs: "Il est plus facile d'éduquer mes élèves que leurs parents."

Au Cameroun, où l'Etat veut doter les enfants dès les premières classes (l'équivalent de la grande section et du CP) "des outils essentiels à la compréhension des enjeux de la santé", prévention des maladies courantes, importance du repos et du sommeil, identification des maladies infantiles, règles élémentaires d’hygiène. Il compte sur eux pour faire passer le message à leurs parents : "les populations rurales semblent plus réceptives aux messages portés par les passeurs culturels (les élèves dans ce cas précis). Quant à celles des grandes métropoles, l’absence de confiance dans les messages de santé amène les communautés des parents à afficher une relative réticence car elles sont réceptives aux théories du complot."

En Turquie, "faute de pouvoir accompagner leurs enfants dans leurs apprentissages, certaines familles s’en remettent aux experts médicaux" et l’externalisation des "élèves problématiques" vers l’éducation spécialisée fait "le lit d’une définition biomédicale du handicap et d’un traitement médicalisé de l’échec scolaire", donc de "l’attribution des difficultés d’apprentissage à des limitations psycho-physiologiques".

Marie-Christine Brault et Emma Degroote ont comparé la situation au Québec et en Flandre en ce qui concerne les politiques de prévention mises en oeuvre pour dépister les TDHA (troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) : "De part et d’autre de l’Atlantique, les positionnements des enseignants divergent. Alors que les Flamands fondent leur approche du trouble sur une compréhension constructiviste, les Québécois favorisent nettement une action médicalisée. Ce parti pris a pour conséquence que 'l’origine du problème' réside dans l’enfant lui-même et que la solution médicale surpasse les solutions pédagogiques. Il induit aussi une surreprésentation des enfants provenant de familles défavorisées et une médicalisation de l’immaturité – puisque le TDAH semble davantage toucher des enfants" les plus jeunes.

A noter encore dans ce numéro la description des centres psycho-médicosociaux belges qui ont le mérite de réunir médecins, assistants sociaux, personnels infirmiers, orthophonistes... et avec lesquels les écoles doivent contracter pour assurer le suivi de leurs élèves, mais qui se situent "en surplomb des familles et des écoles" et dont les préconisations, par exemple le maintien d'élèves perturbateurs "dans le parcours scolaire le plus ordinaire possible", ne sont pas "forcément partagées par les enseignants".

Revue internationale d'éducation de Sèvres, n° 89, 188 pages, 17€

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