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Formation des enseignants : des questions pratiques et théoriques non résolues (dossier de l'IFE)

Paru dans Scolaire le vendredi 26 mai 2023.

Les enjeux de la formation des enseignant.es se cristallisent dans le quotidien professionnel de leurs formateur.rices et le dernier Dossier de veille de l'IFE est consacré aux mutations et aux tensions qu'ils connaissent. Ils ont en effet subi "trois réformes de la formation initiale des enseignant.es en dix ans (2010, 2013 et 2019)", auxquelles s'ajoutent "de nouvelles modalités de formation continue à l’école primaire avec les plans mathématiques (2018) et français (2020)" et la création des EAFC (Écoles académiques de la formation continue) en 2022 !

L'autrice, Claire Ravez, précise : la création des ESPE et des masters MEEF a eu des effets divergents selon les niveaux d'enseignement, elle a "accentué l’universitarisation de la formation des professeur.es des écoles et la professionnalisation de la formation initiale des professeur.es des collèges et des lycées". En 2019, les concours de recrutement ont été placés en fin de seconde année de master, ce qui a accru "les difficultés à conjuguer ancrages disciplinaire, didactique, pédagogique et professionnel."

Des difficultés pratiques ... et des problèmes conceptuels

Il faut aussi compter avec des difficultés pratiques, "d’alignement des calendriers autant que des contenus". Les priorités nationales définies par le ministère croisent les offres de formation de divers opérateurs (Inspé, Réseau Canopé, France Éducation International, Ih2ef, etc.). "Depuis une dizaine d’années, les plans de formation académiques intègrent inégalement les plans départementaux et de circonscription, qui structurent le pilotage de la formation continue dans le premier degré." Dans le second degré, les formations d’initiative locale ajoutent à la complexité du processus d’ingénierie. S'y ajoutent depuis 2018 et 2020 les plans mathématiques  et français et l'organisaton en constellations".

S'y ajoutent aussi des problèmes conceptuels. Les formateur.rices d’enseignant·es doivent à la fois aider et évaluer, transmettre et faire réfléchir sur le métier. L'entretien qui suit l’observation d’une séance de classe est l'occasion de prodiguer des conseils, mais ceux-ci ont une portée limitée : "Les conseils les mieux reçus sont ceux qui impactent peu les habitudes, qui ont des répercussions directes et immédiates sur le déroulement de la classe en apportant plus de confort." Dès lors, faut-il privilégier "l'acquisition de gestes professionnels considérés comme efficaces", ou s'inscrire dans une perspective socioconstructiviste qui ouvre sur des controverses professionnelles ?

Faut-il viser "l’efficacité des apprentissages (de meilleures performances), leur équité (une progression plus rapide des résultats des élèves dont les performances initiales sont les plus faibles), leur efficience, soit le rapport entre son coût pour les enseignants (réorganisation cognitive, surcharge de travail, investissement émotionnel...) et ses bénéfices (satisfaction due aux progrès des élèves ou à l’accroissement du sentiment de compétence de l’enseignant)" ?

A l'échelle internationale, on constate qu'entrent en tension deux modèles, "l’enseignant.e responsable de ses choix pédagogiques" et qui est "peu supervisé.e hiérarchiquement, mais isolé.e dans sa classe" ou davantage collégial : travail collectif, responsabilités partagées, projet commun, formation sur le lieu de travail en communautés d’apprentissage". S'opposent aussi deux autres modèles : dans "l’approche instructionniste, la part laissée à l’enseignant quant aux choix didactiques et pédagogiques n’est que peu présente" tandis que dans une approche (socio)constructiviste, "l’identification et la formalisation des pratiques (...) ne sont que peu évidentes ; ces démarches nécessitent une collaboration forte entre enseignants, formateurs et chercheurs pour analyser et coconstruire ces pratiques."

Les apports de la recherche sont assez minces

Mais qu'en est-il des apports de la recherche ? "La base empirique soutenant les recommandations des experts concernant la conception de dispositifs (...) capables d’améliorer l’apprentissage des élèves est assez mince (voire quasi inexistante dans le monde francophone) et les résultats sont loin d’être toujours convaincants au sujet des impacts sur les élèves."

Le dossier examine aussi les questions que pose la formation à l’enseignement du français au CP et CE, alors qu'interviennent des acteurs très divers, "des enseignants-chercheurs et des professeurs de lettres du second degré plus ou moins familiarisés avec ce niveau scolaire comme avec la didactique de l’écriture, des inspecteurs le plus souvent généralistes, des conseillers pédagogiques très expérimentés ou faisant nouvellement fonction dans la certification de formateur, des professeurs des écoles maitres formateurs (PEMF) ayant ou non enseigné dans ce cycle (...)". Et qu'en est-il des outils numériques ? La plateforme M@gistère offre des parcours de formation à distance ou hybrides. Amène-t-elle une "évolution profonde de la formation continue", ou constitue-t-elle une "réponse institutionnelle à un souci de rentabilité".

Le dossier "Former à enseigner : activité(s), mutations, tensions" (Claire Ravez, Dossier de veille de l’IFÉ, 143, mai 2023. ENS de Lyon) ici

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