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Les "semaines de l'engagement lycéen", un révélateur de la réalité du fonctionnement des établissements

Paru dans Scolaire le lundi 18 août 2014.

"La démocratie lycéenne est encore très diversement vécue à l’intérieur même du système scolaire"; pour les élèves, le lycée "n’est pas un lieu de vie"; pour les enseignants, la formation du jugement critique "passe prioritairement, voire exclusivement, par la transmission de savoirs disciplinaires", tandis que "l’engagement est loin d’être unanime parmi les chefs d’établissement". Quant aux outils de communication, ils sont largement sous-utilisés, et les sites d'établissement ne sont parfois mis à jour qu'une fois tous les 3 mois... La note d'étape de l'IGEN (Inspection générale de l'Education nationale) sur "les semaines de l’engagement lycéen" mises en place à la rentrée l'an dernier révèle assez crûment la distance entre les textes officiels sur la "vie lycéenne" et la réalité quotidienne.

Les auteurs prennent quelques précautions. L’organisation des ces semaines a été "celle d’un événement ponctuel dans un calendrier très resserré puisque fixé trois semaines à peine après la rentrée par une circulaire publiée au cœur de l’été" et les conclusions du rapport doivent "se lire dans le contexte de cette temporalité quelque peu précipitée", mais elles dessinent "des éléments d’appréciation sur la vie lycéenne". Celle-ci est parfois riche. Dans certains établissements, "on a pu noter une floraison d’initiatives", des forums, des "cafés philo", des expositions, la création "de sets de table pour la cantine"... Ce sont ceux qui ont déjà noué des partenariats solides avec "la Ligue de l’enseignement, l’AROEVEN, l’UNICEF, la LICRA, la Ligue des droits de l’Homme", mais aussi les pompiers, les élus...

Une communication parallèle, des enseignants revêches

La tonalité du rapport est toutefois largement négative. La qualité du "kit de communication" mis à disposition par le ministère est reconnue par tous les acteurs, mais se pose la question "de la réception effective des messages par les élèves". Leurs délégués déplorent "la sous-utilisation des panneaux lumineux et le statisme du site internet de l’établissement", au point qu'ils ont parfois "pris en charge une communication parallèle" et "conçu une campagne officieuse d’affichage dans les toilettes". Mais "on peut donc se demander s’il y a un seul lycée où deux heures de formation ont été effectivement prodiguées à toutes les classes", alors qu'elles étaient "requises" par la circulaire. Leur utilisation a été très diverse. "Dans un lycée, les CPE et les assistants d’éducation sont passés dans les classes expliquer à quoi servait l’équipe de vie scolaire ; dans un autre, c’est le proviseur qui a disserté sur la notion de respect. C’est l’idée même de formation qui apparaît ployable en plusieurs sens, qui va de la description d’un fonctionnement institutionnel à la leçon de morale, en passant parfois – mais les exemples que nous avons observés sont rares – par une réflexion sur la notion même d’engagement lycéen."

De plus, les élèves délégués ont été rarement impliqués dans ces semaines de l'engagement lycéen. Pourtant, là où ils l'ont été, "leur enthousiasme" est plus efficace que "l’attitude souvent décrite comme revêche d’enseignants se contentant de lire des documents académiques, sans souhaiter les expliquer ni en débattre avec la classe, refusant même parfois de répondre aux questions". Dans un lycée de l’académie de Bordeaux, l’ensemble des professeurs principaux a signé une pétition pour refuser d’assurer ces deux heures de formation et "dans plusieurs lycées, les délégués se sont heurtés à des refus des professeurs de leur ouvrir leur classe (...) De tels incidents reflètent le manque de confiance de l’enseignant dans la parole de l’élève (...) les semaines de l’engagement ont confirmé la difficulté des enseignants à reconnaître les capacités d’initiative des élèves".

Des élèves consommateurs de cours

Mais on aurait tort de considérer que le désir d’engagement des lycéens "peut être immédiatement réalisé et investi dans le cadre réglé des institutions de la représentation lycéenne (...) un certain nombre d’élèves pourraient dire avec leurs professeurs : 'Notre priorité reste les cours' (...) Il arrive que le lycéen rejette l’idée d’être au lycée autre chose qu’un consommateur de cours". Il est vrai que la "brièveté du rythme triennal du lycée décourage ces élèves soucieux de rentabiliser leur engagement (...) Il manque à l’élève l’abnégation de s’engager pour améliorer non sa propre vie au lycée, mais celle de ses successeurs."

Et surtout, les élèves attendent qu'on leur démontre "les effets bénéfiques et concrets des institutions" et de l’efficacité de la démocratie lycéenne. Au total, ces semaines "n’ont pas rempli leur objet premier, c’est-à-dire une augmentation du taux de participation aux élections pour le renouvellement partiel des conseils des délégués pour la vie lycéenne", mais "ce constat globalement négatif cache une réalité très inégale selon les académies et les types d’établissements, avec, çà et là, des hausses du taux de participation aussi spectaculaires que les baisses".

Le rapport est téléchargeable ici

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