Scolaire » Actualité

Colloque du SNPDEN : se fonder sur les acquis des neurosciences pour concevoir les évaluations et les modalités d'apprentissage

Paru dans Scolaire, Orientation le vendredi 16 mai 2014.

Et si l'on expliquait le fonctionnement du cerveau aux enseignants et personnels d'encadrement afin que soient mises en place des modalités d'apprentissage et des systèmes d'évaluation adaptés aux capacités d'apprentissage du cerveau ? Telle est en substance, l'idée qui a été avancée par Jean-Luc Berthier qui intervenait, ce mercredi 14 mai 2014, à l'occasion du colloque "Évaluation des élèves et démocratie" organisé par le SNPDEN de l'académie de Besançon, à l'ENSMM (École nationale supérieure de mécanique et des microtechniques).

 

Cet ancien personnel de direction et ancien responsable national de la formation des personnels d'encadrement de l'Éducation nationale à l'ESEN s'est appuyé sur les travaux menés depuis plusieurs années dans le domaine des neurosciences. Un domaine dans lequel "les connaissances ont explosé ces quinze dernières années". L'un des indicateurs étant le nombre de publications  "validées", qui, en 15 ans, est passé de 10 000 à 1 million par an.

 

 

 

Les dispositifs d'évaluation pourraient, selon lui, tenir compte de deux grandes observations : le cerveau a besoin de plusieurs rappels et de réapprendre pour "savoir". Un test mené en 1re ES, en AP (accompagnement personnalisé), a ainsi montré que l'enseignant devait effectuer entre 3 et 6 essais durant la séance pour que tous les élèves aient compris et appris 7 concepts. Lors d'un contrôle effectué 3 semaines après, "sans prévenir", seulement 2 de ces 7 concepts pouvaient être expliqués par les élèves. Le résultat passait à 5 sur 7, lors d'un même test répété encore 3 semaines plus tard.

 

 

 

"L'oubli n'est pas une paresse"

 

 

 

"L'oubli n'est pas une paresse", explique cet ancien personnel de direction, "c'est un mécanisme naturel pour que l'on puisse vivre correctement avec l'immensité des savoirs et des informations que l'on ingurgite". "Le même bac passé trois mois plus tard par les mêmes élèves aboutirait à des résultats au moins inférieurs de 20 %", poursuit-il.

 

 

 

Explication : les neurones se connectent quand se crée une connaissance et l'arborescence neuronale se consolide si on la réactive. De facto, ce test qui illustre les "effets de dissipation et de reconstruction" liés au fonctionnement du cerveau, interroge sur le sens même de cette évaluation.

 

 

 

Il pose également la question des formes d'apprentissage. Les travaux des neurosciences ont montré que l'on "réapprend mieux" et que "plus on sait, plus on a répété et plus on est capable d'apprendre et de penser vite", poursuit Jean-Luc Berthier.  "L'apprentissage ne peut donc se passer de la reprise, de la répétition." Or, observe-t-il, "l'apprentissage des acquis par l'entraînement a été trop négligé" pour passer "trop vite à des connaissances plus complexes". L'apprentissage par la répétition est d'autant plus indispensable, selon lui, qu'il y a des élèves qui ne peuvent pas colmater ces "structures neuronales fragiles" grâce à leur environnement socio-culturel.

 

 

 

Le cerveau a besoin d'indices pour se rappeler

 

 

 

L'intervenant présente par ailleurs les résultats d'une deuxième expérience qui montre que le cerveau a besoin d'indices pour restituer ce qu'il sait. D'anciens élèves à qui l'on demandait de se souvenir d'une de leur classe des décennies plus tard, éprouvaient de très grandes difficultés à se rappeler les noms des autres élèves. La même expérience, réitérée avec une photo, donc "avec des indices", montrait que ces mêmes personnes arrivaient à se souvenir de 70 à 80 % des élèves. Pour lui, les évaluations peuvent donc être pertinentes si elles prennent en compte "la façon dont on a fait apprendre" et "mixent les modes de rappel : libres et avec indices".

 

 

 

Pour faire changer les pratiques des enseignants, il est donc indispensable, selon lui, que l'on apprenne aux acteurs de l'éducation, enseignants, cadres du système et personnels d'encadrement, comment fonctionne le cerveau. Afin que, au-delà des modalités d'évaluation, soient mises en place "les modalités d'un apprentissage durable" et que "la voilure des programmes" soit adaptée pour être "compatible avec le cerveau moyen". Pour lui, "avant de démocratiser l'accès aux établissements, il serait bien de démocratiser l'accès à l'acte d'apprendre".

Camille Pons

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →