Colloque du SNPDEN : pourquoi ne pas tendre vers des notes de 1 à 6 et mixer évaluation de connaissances et de compétences ?
Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 15 mai 2014.
Ne pas faire disparaître les notes mais réduire l'échelle de graduation, mixer évaluation des compétences et des connaissances en expliquant aux familles et élèves les compétences qui doivent être développées durant la scolarité, telles sont quelques-unes des idées qui ont été avancées pour faire évoluer le système de notation français.
Pour l'instant, pas question de faire disparaître les notes, selon Anne Barrère, professeure en sciences de l'éducation à l'université Paris-Descartes et sociologue de l'éducation, "un plaidoyer qui tombe à côté de la plaque" dans la mesure où "les enseignants sont aujourd'hui responsabilisés en première ligne sur la gestion de la classe et sur le bruit", observe-t-elle. "Or, la note donne un pouvoir à l'enseignant pour gérer sa classe". Selon la chercheure, "tant que cela ne bougera pas, on ne pourra pas les responsabiliser sur les résultats, pourtant plus importants".
Pour Anne Bourhis, proviseure à Paris et secrétaire nationale de la commission "éducation et pédagogie" au SNPDEN, et Roger François Gauthier, IGAENR, passer à un système d'évaluation comportant 4 et 6 degrés, avec un degré pour "insuffisant", un autre pour "bon" et quelques niveaux intermédiaires, permettrait de rendre compte des acquis des élèves tout en conservant un modèle de notation chiffrée. Une bonne manière de sortir du système de notation actuel qui va de 0 à 20 et d'en finir avec "une spécificité française très critiquable", celle de "fonctionner à la moyenne", estime Roger-François Gauthier. Selon lui, ce système "met potentiellement une moitié d'élèves [en dessous de 10/20, NDLR] dans les "pas bons" alors que dans d'autres pays, on note sur 5 ou 6 grades et qu'un seul d'entre eux est réputé pour être insuffisant".
Développer l'évaluation des compétences n'est pas incompatible avec la notation
L'évaluation des compétences a également été abordée. Une approche intéressante, selon Olivier Rey, responsable de l'unité de veille et analyses de l'Institut français de l’Éducation à l'ENS Lyon, parce qu'elle permet d'évaluer des "tâches complexes" et la "capacité à mettre en œuvre et à faire agir des savoirs de la façon la plus pertinente possible pour atteindre un objectif". Un système avec lequel "on ne peut pas tricher" alors qu'on le peut avec une note. Que signifie, s'interroge-t-il, un 10/20 en natation ? "Que l'on a à moitié su nager, ou que l'on s'est à moitié noyé ?" Néanmoins, pour tendre vers un tel système, il faut d'abord, selon lui, "identifier et exposer auprès de toutes les familles et élèves, de tous les milieux sociaux, les compétences que l'on doit développer". Des "clés de compréhension" qui permettraient de légitimer le socle commun de connaissances et de compétences, encore "caché" dans certains établissements.
Roger-François Gauthier estime de son côté que doivent être évaluées à la fois la "réalisation de tâches complexes" mais aussi les "ressources", à condition que celles-ci "soient comprises comme des étapes pour arriver à une fin". Il souligne par ailleurs que n'évaluer qu'un socle de compétences est aujourd'hui incompatible avec les procédures d'orientation et d'affectation qui "fonctionnent à coup de notes et de logiciels qui moulinent". Pour lui, l'élaboration des programmes dont a la charge le nouveau CSP ne doit pas être déconnectée d'une réforme de l'évaluation et "doit s'inscrire dans la logique du socle".
Camille Pons