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ESPE d'Aix-Marseille : "Ca s'est très bien passé avec beaucoup de difficultés" (J. Ginestié)

Paru dans Scolaire le jeudi 03 avril 2014.

Il faut arriver "à ce que les acteurs se parlent", résume d'une formule Jacques Ginestié qui était entendu ce 3 avril par la mission sénatoriale d’information sur les ESPE (écoles supérieures du professorat et de l'éducation). Le directeur de l'école d'Aix-Marseille décrit un ESPE à quatre sites, celui de Digne ne comptant qu'une centaine d'étudiants. Mais il plaide pour son maintien, avec son observatoire de l'école rurale. Quant aux 300 du site d'Avignon, ils iraient sinon à Grenoble ou à Montpellier, pour éviter la vie chère à Aix et Marseille qui a une mauvaise image et dont le site doit d'ailleurs quitter la Canebière et rejoindre le campus "Marseille Etoile". Evoquant la mise en place de l'ESPE qui a succédé à l'IUFM, il a cette formule, "ça s'est très bien passé, mais avec beaucoup de difficultés". Car s'il était "facile de rédiger un projet", la mise en oeuvre était plus complexe. Il a d'abord fallu faire face à l'inquiétude des étudiants qui ont comme référence la préparation au concours. Celui-ci est modifié et les enseignants leur ont dit "faites-nous confiance", ce qui n'a pas empêché un "petit mouvement fin novembre début décembre". Mais les épreuves du concours correspondront-elles effectivement à ce qui a été annoncé ? Si ce n'était pas le cas, donc si les étudiants pouvaient penser qu'ils y ont été mal préparés, les conséquences seraient très lourdes pour l'année prochaine.

Pour les éviter, il faut aussi que se mette en place un dispositif qui leur montre qu'ils peuvent "faire autre chose" que l'enseignement, ce qu'ils n'imaginent pas toujours. Cela passe par une formation professionnelle conçue sur quatre ans, de la L2 au M2, ce qui n'est pas encore fait. Car se pose une question, "c'est quoi, former un enseignant?" Jacques Ginestié souligne la nécessité d'oeuvrer au "rapprochement de cultures très différentes". Pour que le dialogue ait lieu, l'ESPE a mis en place presque autant de "conseils de perfectionnement" que de formations, chacun comprenant des enseignants (de l'université, de l'ESPE et venus des établissements scolaires), des représentants des employeurs, le rectorat, mais aussi les associations, des représentants des étudiants et des "professionnels de terrain" n'intervenant pas dans la formation. Un enseignant-chercheur en mathématiques qui souligne l'importance de tel chapitre de sa discipline devant quelqu'un qui enseigne dans un collège des quartiers nord est bien obligé de tempérer son discours, explique le directeur de l'ESPE. Mais les difficultés du dialogue sont aussi d'ordre pécuniaire, administratif et culturel.

Ordres de mission et frais de déplacement

Quand une université recrute un enseignant vacataire, celui-ci accepte ses conditions. Quand un enseignant de terrain est envoyé par le rectorat participer à la formation de ses futurs collègues, c'est avec un ordre de mission, et des frais de déplacement, ce qui suppose un budget, mais aussi toute une administration. A une culture de l'autonomie du supérieur s'oppose une culture de la hiérarchie dans l'enseignement scolaire. "Nous avions affiché un objectif de 25 % de professeurs du terrain, nous sommes à 10 %, dont la moitié sont des personnels de direction ou d'inspection."

Et plutôt que d'avoir 3 professeurs d'EPS qui viennent faire 25 heures chacun, mieux vaut peut-être un seul professeur partiellement déchargé... Car aux problèmes de disponibilité pour les cours et pour toutes les réunions de préparation s'ajoute la difficulté de comptabiliser le service fait : une heure d'enseignement dans le second degré et une heure d'enseignement dans le supérieur ne représentent pas la même charge de travail...

Quel recrutement pour l'enseignement technique et professionnel ?

Jacques Ginestié évoque deux autres questions qui l'inquiètent, celle des "petites disciplines" comme l'arabe qui compte 3 étudiants et pour lesquelles il "arrive à bricoler", et surtout celle de l'enseignement technique et professionnel, "qui mériterait d'être pensée différemment". D'une part, les DUT ne débouchent pas sur des licences, sinon professionnelles, lesquelles ne permettent pas l'accès en M1, d'autre part chaque formation compte très peu d'étudiants, 12 pour le secteur de la production industrielle, et ils préparent 7 concours différents ! L'ESPE a renoncé à envisager les formations du type plomberie ou esthétique...

Au total, le projet de l'ESPE, de l'année L2 au M2 représente 42 millions d'euros, 32 pour le périmètre M1-M2, soit 10 000 € par an et par étudiant. Les ESPE sont assez inquiets de la position de l'Education nationale qui souhaite que, à la rentrée prochaine, les étudiants stagiaires ne paient pas de frais d'inscription. Cela représenterait pour Aix-Marseille un manque à gagner de quelque 250 000 € soit 15 % de son budget de fonctionnement.

A noter que l'audition de Jacques Ginestié était ouverte à la presse, contrairement à celle, un peu plus tôt dans la matinée, des parties prenantes à l'ESPE de l'académie de Versailles, Pierre-Yves Duwoye, le recteur, Béatrice Cormier, la directrice et les présidents (ou administrateur) des universités Paris-X, Paris-XI, Cergy, Evry, Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Les échos qu'a pu en recueillir ToutEduc témoignent de l'importance de la formule de Jacques Ginestié, faire en sorte que "les acteurs se parlent", même s'il semble que la situation s'améliore. L'ESPE est rattachée à de 5 universités, qui ont chacune leurs intérêts et leur logique, alors qu'à Aix-Marseille, l'université du Vaucluse et l'académie ne représentent que quelque 12 % du budget, et le président de l'université d'Aix-Marseille a davantage de pouvoir de décision face au recteur.

 

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