Rythmes scolaires : Le CNFPT crée de nouvelles formations pour accompagner la réforme
Paru dans Scolaire, Périscolaire le jeudi 27 février 2014.
Dès la parution du décret relatif à l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires en janvier 2013, le CNFPT, centre national de la fonction publique territoriale, a mis en œuvre des partenariats avec les DASEN (directions académiques de l'Education nationale) et avec les directions départementales de la cohésion sociale. Le centre a également participé aux comités locaux de suivi de la réforme, indique François Deluga, président du CNFPT. Il était auditionné par la mission commune d'information du Sénat sur les rythmes scolaires, hier mercredi 26 février. L’organisme capitalise ces retours d’expériences pour les formations qui seront mises en place en 2014. Il travaille également à de nouveaux partenariats avec le ministère de l’Education nationale pour renforcer la coordination entre les délégations régionales du CNFPT et les DASEN. "Dès que le décret est sorti, nous avons engagé un travail de réflexion pour accompagner la mise en œuvre de la réforme. Nous avons lancé des journées d'information, une à deux par région, pour présenter aux cadres de la fonction publique territoriale les enjeux et l'impact de la réforme des rythmes."
Ces journées de formation sont mises en place à destination des agents municipaux mais "nous avons invité les élus et notamment ceux en charge de ce secteur", insiste François Deluga. Le CNFPT a également lancé la révision d'un itinéraire métier de directeur des affaires sociales et de directeur de l’enfance-jeunesse. "Nous y avons introduit un module relatif au PEDT. Nous travaillons à faire évoluer nos formations de façon à ce que les agents puissent avoir dès 2014 une bonne connaissance du dispositif." Les itinéraires de coordination permettent d’avoir "une normalisation de l’ensemble de nos formations". "Nous allons sortir une plaquette d'information et de communication en direction des collectivités".
Formations sur mesure et gratuites
Le CNFPT offre également des formations sur mesure. "Nous sommes souvent consultés par les collectivités pour mettre en œuvre leurs projets éducatifs et la formations de leurs agents. La demande monte dans nos délégations." Cette "accélération" est toutefois "en-deçà des capacités d'accueil" du CNFPT. Pour 2014-2015, le CNFPT est en train de mettre en place un "itinéraire de la réforme des rythmes scolaires" destiné aux directeurs, coordinateurs, animateurs et ATSEM. Il s’agira notamment de travailler sur "le rôle éducatif des agents et le management des ressources". Il prévoit également d’expérimenter, dans certaines régions, d’autres qualifications que le BAFA et le BAFD.
Concernant globalement la mise en œuvre de la réforme, François Deluga estime que des difficultés persistent autour de la question de l’articulation de l’action éducative et périscolaire en maternelle, autour des spécificités des territoires d’Outre-Mer et du partage de locaux.
En banlieue, difficultés de recrutement des animateurs et absentéisme
"Dès 2013, nous avons réuni un groupe de travail avec la vingtaine de villes de banlieue qui ont décidé d’appliquer la réforme", raconte Danièle Carlier, adjointe au maire de Creil en charge de la citoyenneté et du bien vivre ensemble, auditionnée le même jour. Ces villes ont choisi de mettre en place la réforme à la rentrée 2013 pour que "les enfants ne soient pas un enjeu des municipales" et par conviction, "pour lutter contre les inégalités". Ces communes ont choisi cette organisation : classe le mercredi matin, TAP en fin de journée d’école, parfois regroupés en 1h30. Le principal problème rencontré est le recrutement d’animateurs qualifiés et l’absentéisme. Elle estime le coût de la réforme à 300 ou 390 euros par enfant.
Elle explique qu’en amont de l’application de la réforme dans sa ville à la rentrée 2013, "une concertation sous la forme d’un comité de pilotage" a été mise en place. Des femmes de ménage ont été embauchées pour que les ATSEM puissent "s’occuper davantage des enfants". Un travail avec les centres de loisir a été engagé. Des réunions avec les inspecteurs de l’Education Nationale, les directeurs d’école, les enseignants et les parents ont été organisées. Une "votation citoyenne" a été proposée aux parents pour trancher entre l’école le mercredi ou le samedi. Les parents ont tranché en faveur du mercredi. Philippe Raluy, directeur général des services, pour l’association "Ville et banlieue", estime que "les parents se sont d’abord positionnés en fonction de leur propre emploi du temps". Selon lui, certains reviennent sur leur préférence pour le mercredi matin car "un repos total le week-end aboutit à plus de fatigue des enfants. Les rythmes des enfants ne sont pas ceux des parents".
Par ailleurs, pour organiser les activités péri-scolaire, "nous avons posé un diagnostic pour savoir quels sont les locaux disponibles, les activités possibles, quel pourrait être le nombre d’élèves accueillis… L’Education nationale n’a pas su nous donner les cadres d’emploi de la méthode. Les corps intermédiaires, les inspecteurs et les DASEN, ont été absents du débat et de la méthode. Les enseignants et les directeurs d’école ont vu arriver un projet auxquels ils n’ont pas participé." D’où des blocages et des crispations. "L’absence de l’Education nationale fait que les jonctions entre le temps scolaire et périscolaire n’ont pas été creusées, alors même que l’enfant peut se retrouver en TAP dans l’école, voire dans sa classe. Mais qui gère alors le chahut ? Et jusqu’où fait-on respecter la discipline ?".
Valoriser le péri-scolaire comme du « temps éducatif »
Claire Leconte, chronobiologiste, a déploré pour sa part le fait que "le décret [relatif à l'organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires de janvier 2013] ne cadre que l’emploi du temps scolaire de l’enfant". Or, "il faut prendre en compte les temps dans leur globalité. L’emploi du temps scolaire représente moins de 10% du temps de vie global. Il faut s’intéresser au 90% restant si l’on souhaite que l’enfant réussisse mieux." La chronobiologiste estime que le périscolaire doit être valorisé comme du "temps éducatif". Selon elle, il faut réorganiser les temps d’apprentissages scolaires et les temps connexes, qui ont un impact sur les temps scolaires. Elle propose notamment de "faire débuter la matinée d’apprentissage le plus tôt possible, expliquant que "les enfants de maternelle et jusqu’au cours moyen sont des lève-tôt". Ensuite, il faudrait alterner les séquences pédagogiques portant sur les données abstraites, la motricité et la créativité. Mais également organiser des parcours éducatifs l’après-midi.
"Pourquoi cette réforme n’est portée que par l’Education nationale ? Elle fait bouger tout et tout le monde autour de l’école." Elle devrait être gérée en interministériel, y compris avec les ministères de la Santé et du Travail, estime Claire Leconte.