Refondation de l'éducation prioritaire : des voix discordantes (FO, SUD, la sénatrice B. Gauthier-Maurin). Le SE approuve
Paru dans Scolaire le vendredi 17 janvier 2014.
"Le ministre parle d'unanimité en faveur de son plan pour la refondation de l'Education prioritaire, mais il n'y a pas eu de vote; Vincent Peillon ne nous a pas exposé son plan, au prétexte qu'il était déjà dans la presse, il est resté un quart d'heure et il est parti avant que quiconque se soit exprimé." C'est ainsi que le représentant de la FNEC (fédération FO de l'enseignement) relate à ToutEduc la tenue du CSE (Conseil supérieur de l'éducation) hier 16 janvier. Et il conteste qu'il y ait unanimité. Il considère que ce plan s'inscrit dans le cadre de la loi de refondation et dans un processus de territorialisation de l'Education nationale. C'est ainsi que les maîtres surnuméraires du "plus de maîtres que de classes" verront leurs missions définies localement. De plus, ce poste pourrait servir de prétexte à l'administration pour refuser une ouverture de classe, donc pour augmenter les effectifs, alors que les créations de postes ne suffisent déjà pas à compenser l'augmentation du nombre des élèves (un poste pour 31 élèves supplémentaires).
Le ministre se donne de plus comme objectif la stabilisation des équipes, mais au prix d'une différenciation des revenus selon la géographie. Quant à l'amélioration des perspectives de carrière, elle est territorialisée et "on préférerait une augmentation du point d'indice" qui profiterait à tous. Les APS (assistants de prévention et de sécurité) dont le nombre sera doublé, sont des personnels contractuels. FO dénonce donc une augmentation de la précarité, et au total, une "austérité aggravée".
De même SUD Education estime que "les mesures annoncées sont très insuffisantes". Elles permettent certes d' "espérer une amélioration pour un tout petit nombre de collègues, pour les 350 réseaux ECLAIR (qui ne seront plus que 100 l’an prochain) concentrant effectivement des difficultés, mais rien pour tous les autres" et "pour les élèves, il n’y a aucun changement substantiel" puisque "rien n’est prévu sur les effectifs, les seuils, le temps de travail pour le plus grand nombre… " La fédération s'oppose également "à la volonté de créer de nouvelles divisions entre les personnels avec le GRAF (grade d’accès fonctionnel)" et elle voit dans le soutien aux "innovations pédagogiques" et "la nomination d’experts de terrain pilotés par les corps d’inspection pour conseiller les équipes (...), un faux-nez pour développer la pression hiérarchique et l’autonomie des établissements sous l’autorité du chef d’établissement ?" Il met en regard du coût de ces mesures le milliard donné "à Dassault pour le Rafale" et les "30 milliards de nouveaux cadeaux au patronat".
Le SE au contraire considère que ce plan "représente un effort massif pour les territoires qui concentrent la difficulté scolaire" et un choix "social et politique" qu'attendait le syndicat UNSA des enseignants. Il considère notamment que c'est "dans la mise en œuvre concrète du continuum de la maternelle à la fin du collège que se joue le succès de ce plan", mais il y ajoute une nécessaire "dimension interministérielle" puisque "ces territoires de l’éducation prioritaire souffrent de multiples maux : logement, emploi, insécurité, santé, ghettoïsation…"
La sénatrice Brigitte Gonthier-Maurin (groupe communiste, républicain et citoyen) considère qu' "on ne peut que soutenir" l'objectif de réduction de l’échec scolaire que s'est donné Vincent Peillon, mais que "cette réforme va se construire sur l’organisation de l’éducation prioritaire mise en place par la droite qui, avec le programme ECLAIR avait poussé vers plus d’autonomie des établissements (...) il faut rompre avec cette logique et lui substituer la mise en route d’apprentissages et de pédagogies permettant de faire progresser tous les élèves vers un haut niveau de connaissances et de culture". Elle semble miser davantage pour cela sur les ESPE et la formation des enseignants "pour leur permettre de déconstruire les mécanismes de l’échec scolaire et donc de l’enrayer".