Classes préparatoires à l’enseignement supérieur : l'enseignement secondaire se sent-il suffisamment concerné ?
Paru dans Scolaire le mercredi 15 janvier 2014.
"Profitez à fond de vos tuteurs!", "On prend une claque mais c’est normal", "On apprend à gérer"… A la tribune de l’amphithéâtre Descartes de l’ENS Lyon (Ecole normale supérieure), hier 15 janvier 2014, ces paroles d’anciens élèves des CPES (Classes préparatoires à l’enseignement supérieur) adressées à 200 élèves de terminale, montrent combien ces dispositifs destinés à des bacheliers issus de l'éducation prioritaire ou boursiers ont atteint leurs objectifs. Elles jouent en effet le rôle de "classes passerelles" avec une prépa ou toute autre formation de l'enseignement supérieur.
Dans le cadre des Journées nationales des "cordées de la réussite", du 13 au 18 janvier, Jacques Samaru, président de l’EN, a fait le bilan des trois années écoulées depuis leur création. Il évoque aussi d’autres actions comme "Trait d’union" qui a permis l'an dernier à 66 tuteurs de l’ENS d’aider plus de 400 élèves de 5 lycées et de 2 collèges de Vénissieux, Vaulx-en-Velin, Villeurbanne et Bron. Il insiste sur deux différences avec d’autres "cordées de la réussite" : "les élèves ne sont pas recrutés sur leur excellence mais sur leur motivation; ces classes ne sont pas un vivier réservé à l’ENS de Lyon mais ouvrent sur des formations longues et diversifiées dans l’enseignement supérieur." Eric Bordas, vice-président en charge des études, en liste les points forts : accompagnement individualisé, résidence obligatoire à l’ENS, participation aux activités associatives et tutorat par des étudiants et des professeurs. "On vient ici pour apprendre à travailler, on devient autonome pour que l’année suivante on puisse poursuivre ses études." La plupart des enseignants, issus de l’ENS sont des agrégés doctorants. Le taux d’encadrement est élevé : une trentaine d’enseignants pour une vingtaine d’étudiants.
Le recrutement se fait par la voie nationale de l’APB, mais les meilleurs dossiers scolaires ne sont pas pris ! Par exemple, en CPES scientifique, pour 160 dossiers, 70 élèves dont les notes se situent entre 9 et 12 de moyenne seront reçus en entretien de 20’ afin d’évaluer leur niveau de motivation. Les orientations seront très diverses. Pour la CPES littéraire, environ 1/3 d’une promotion poursuit en CPGE (1ère ou 2ème année) et les 2/3 à l’université, certains préparant les concours des IEP. Un nombre important aimerait… être enseignant !
Si le dispositif semble exemplaire à tous points de vue pour les élèves concernés, il reste à généraliser les observations pédagogiques disciplinaires et générales, comme le lien évident entre l’acquisition de l’autonomie et l’accompagnement personnalisé. Françoise Moulin-Civil, rectrice de l’académie de Lyon, salue ce qui correspond à un axe fort du projet académique : atteindre un domaine d’excellence, ouvrir le champ de tous les possibles. Et elle insiste sur le rôle de relais des élèves, de leurs délégués, de leurs élus au sein des CVL (conseils de la vie lycéenne) et du CAVL (conseil académique de la vie lycéenne). Mais ToutEduc s'interroge : comment les corps d’inspection pédagogique, les personnels de direction et plus généralement les personnels enseignants des établissements, peuvent-ils tirer les leçons de ces expérimentations éducatives? Il y a sans doute encore d’autres passerelles à consolider.
Claude Baudoin