Scolaire » Actualité

Exclusif : Les projets des ESPE étaient particulièrement disparates, et leur réussite "reposera sur l’implication des acteurs"

Paru dans Scolaire le dimanche 01 septembre 2013.
Mots clés : ESPE, habilitations, fiches

Les arrêtés d'accréditation des ESPE ont été publiés au JO de ce 31 août. Ils sont l'aboutissement de plusieurs allers-retours entre les sites académiques et les ministères. ToutEduc a pu consulter les "fiches d'accompagnement" qui ont été retournées aux responsables des sites après qu'ils avaient envoyé aux deux ministères, Education nationale et Enseignement supérieur, leurs dossiers de préfiguration. Ces "fiches d'accompagnement" sont des documents brefs, d'une page, résumant les points forts et les points faibles de chaque dossier du point de vue des administrations centrales. Elles donnent une idée de la diversité des dispositifs qui vont se mettre en place dès lundi dans toutes les académies. Dans un courrier aux promoteurs du site de Créteil, les ministères mettent en avant la nécessaire "implication des acteurs" pour la réussite des ESPE.

A Aix-Marseille, "le lien avec la recherche est intéressant", mais "le lien avec l’académie n’apparaît pas (...). Des éléments sont attendus (...) sur les formations engageant une culture professionnelle commune". A noter que le projet de cet ESPE identifie "quatre blocs de savoirs", les SRF (ou savoirs fondamentaux de référence, les savoirs académiques), les SEE (ou savoirs enseignés à l’École, à savoir "les contenus disciplinaires à transmettre"), les SDP (savoirs didactiques et pédagogiques) et les SME (savoirs sur le métier d’enseignant), des distinctions dont la fiche ne qualifie pas la pertinence.

A Amiens, l'approche "semble guidée par les savoirs disciplinaires", ce qui est un point négatif, mais "l’organisation inter-académique (...) est à retenir" et "l’offre de formation au sein du cycle licence est très complète". En revanche, "l’offre de formation au sein du cycle master est à clarifier" et il faudra voir "comment favoriser la création d’une culture professionnelle commune".

Le dossier de Besançon était "de qualité" mais soulevait "de nombreuses questions". Parmi les points positifs figurent "l’intégration des corps de direction et d’inspection pédagogique aux groupes de travail" et "un partenariat avec le canton de Vaux (Suisse)", mais "l'ESPE doit garder un rôle de coordination qui n'apparaît pas" toujours.

Avec le dossier de Caen, "on est dans une approche très inspirée du fonctionnement des IUFM". L'intervention des enseignants des UFR est "limitée à une simple prestation de service".

A Clermont-Ferrand, "le cadre général est très intéressant avec de nombreuses spécificités". La fiche note surtout que "les problématiques relatives à la recherche, à la prise en compte de la spécificité des différents métiers [de l'Education nationale] et à leur évolution, et à la diversification des débouchés sont traitées".

Quant au projet Corse, il était, au printemps, "encore trop calé sur le modèle IUFM" et il fallait "impérativement que le contenu et le contenant se mettent en phase avec le projet de loi et le cadre national" et que le site prévoie l'organisation de l'alternance au niveau master. Mais le volet "environnement de la formation" était "de qualité", avec un projet "de licence sciences de l’éducation" et une "logique de continuité licence – master - formation continue".

Pour le projet de l'académie de Créteil, ToutEduc a pu se procurer la réponse apportée à la mi-juin par les deux ministères avant un ultime aller-retour. Le dossier était considéré comme "très solide, pensé, riche", même s'il subsistait "des flous" qu'il était "difficile d’éviter" : "La réussite des ESPE reposera sur leur capacité d’amalgame, sur l’implication des acteurs, sur des coopérations larges y compris hors académie, sur une approche de type horizontale et de la mise en réseau". Les administrations centrales demandaient notamment que soit précisée "la nature des liens avec les enseignants du secondaire, les inspecteurs, les chefs d’établissement (et les associations périscolaires voire les parents)" ainsi qu'avec "les services académiques concernés en matière de formation continue des enseignants". La fiche demandait aussi "quel type de suivi [serait] pratiqué pour les stagiaires (tutorat croisé, instance de pilotage et de suivi des stages (...)". Pourtant, lors de la phase précédente d'échanges, les trois directions d'administration centrale considéraient que "lle principe posé que chaque université élabore sa propre politique de formation post-licence [pour les futurs professeurs du second degré] n’[était] pas défendable dans un contexte de coopération et de cohérence académique".

Le dossier de Dijon donne à penser que les collaborations avec Besançon seront possibles. Les ministères ont apprécié "le dispositif de coordination de la recherche", tandis que la contribution des professionnels praticiens est "réellement à la hauteur d’un master professionnel". Autre point "très positif", "l'introduction d'un entretien d'orientation professionnelle post M1 pour les étudiants n'ayant pas validé le concours". Mais l'ESPE prévoit des binômes ESPE/UFR pour le pilotage de chaque parcours, au risque de s'en dessaisir.

Dans le dossier de Grenoble, "de très nombreux points ne sont pas abordés" et manquent "des précisions sur l’articulation de la formation entre équipes universitaires et praticiens de terrain (...), sur les formes de tutorat, la formation des formateurs, notamment en vue de la création d’une culture professionnelle commune". Le dossier ne donne "aucune information sur la structuration et l’offre de formation continue".

Le dossier de Lille "est en 'chantier' avec des avancements disparates". Il propose "une approche intégrée formation initiale/formation continue/formation tout au long de la vie sur la base d’une réelle démarche partenariale" et témoigne d' "une volonté d’ouvrir sur des publics très diversifiés, en particulier des EAP, avec une offre polymorphe appuyée sur un tutorat structuré, co-animé et pluri catégoriel. En matière de participation à des actions de formation continue des enseignants des premier et second degrés, on observe une réflexion sur le continuum de la formation (...)"

Le dossier de Limoges témoigne d' "une véritable volonté de s'inscrire dans la réforme" et "de constituer un corps de praticiens formateurs dotés d’une forte culture professionnelle commune". Quant à l'offre de formation, elle ouvre "sur de nombreux autres débouchés (handicap, prise en charge des seniors, e-learning, lien avec l'IPAG [Institut de préparation à l'administration générale, ndlr])".

Pour celui de Lyon, "les parties relatives à l’offre de formation et l’organisation pédagogique étaient très peu renseignées" et "la participation de l’ENS à l’organisation générale de l’ESPE n’[étaient] pas mentionnée". "Aucun élément ne permet de voir comment la formation sera structurée, aucun élément de préfiguration des maquettes des formations ne figurant pas dans le dossier".

Le modèle choisi pour la structuration de l’ESPE de Montpellier était considéré comme "innovant": "Il repose sur la création d’entités 'éducation' au sein de chaque université partenaire, y compris à Montpellier 2 où l’IUFM devient une UFR." Les deux ministères soulignent aussi "la qualité des dispositifs d’enseignement à distance". Mais il "n’est pas envisageable (...) de ne pas admettre en deuxième année de master les étudiants qui auront validé la première année de master sans avoir réussi le concours", même s'il "est possible de proposer une année de césure pour intégrer une préparation au concours".

Le dossier de Nice est "trop succinct" et il "milite aussi pour un lien fort L3/M1 à la limite du droit de sélection à l’entrée du M1 qui ne serait pas acceptable".

A Nantes, "l’offre de formation est réellement pensée au niveau de l’académie, avec même un principe d’égalité devant les examens d’un même parcours qui serait mis en œuvre par plusieurs universités" et "une réelle approche académique sur les filières à petits effectifs", mais "la recherche est totalement absente du dossier".

Le site de Paris "est très spécifique et très complexe avec (...) plus de 10 établissements concernés. Les acteurs impliqués dans l’ESPE sont à la recherche d’une gouvernance collégiale avec la mise en place d’un comité interuniversitaire de suivi qui sera l’organe politique (...) La diversité des partenariats qui vont au-delà des universités contribue à enrichir l’offre de formation". Mais "aucune proposition concrète sur l’architecture de la formation n’est formalisée".

Le site de Poitiers "présente de fortes spécificités" et "l’offre de formation présente de nombreux points intéressants, notamment au niveau de la formation continue des enseignants". Est notamment envisagé un partenariat avec le CNED et "les actions en faveur de l’ouverture internationale sont particulièrement intéressantes". Mais, ajoutaient les ministères, il faudrait veiller "à ne pas limiter l’adossement 'recherche' aux seules sciences de l’éducation" et envisager des partenariats avec l'ESEN et le CNDP.

A Orléans-Tours, "la question de la recherche est appréhendée sous le seul aspect, un peu réducteur, des sciences de l’éducation" et "le dispositif de coordination de la recherche est très interne à l’ESPE". Mais la fiche souligne, comme un point positif "le projet d’intégrer le service interuniversitaire de pédagogie (SIP) à l’ESPE". Manquent pourtant des données sur "les équipes pédagogiques", d'autant que se trouve privilégiée une "entrée disciplinaire".

La future ESPE de Reims est également invitée "à ne pas se laisser dépasser par les tendances disciplinaires des composantes" mais "la proposition d’un 'visiting committee' externe pour un audit régulier est intéressante", de même que la "focale" sur "le rôle de l’ESPE comme centre des ressources pour l’innovation et les TIC" et "l’organisation des stages et de l’alternance", même si "le rôle de l’ESPE doit être plus affirmé dans les actions de coordination de la formation des enseignants".

Le dossier de l'académie de Rennes est "très sérieux", les maquettes sont "bien détaillées", "les actions de sensibilisation et d’information au sein du cycle Licence, d’accompagnement du dispositif EAP ainsi que celles visant la formation continue des enseignants des premier et second degrés sont de qualité" et les débouchés sont diversifiés avec "la mise en place des parcours de M2 sans concours". Mais "des précisions sont attendues sur le devenir des moyens actuels de l’IUFM et de ses personnels ainsi que sur les actions en faveur de la coordination de la recherche". Là encore, les responsables sont invités à se demander "quelles modalités et quels contenus [mettre en place] pour créer une culture professionnelle commune".

A La Réunion, "les équipes pédagogiques doivent se reconstituer suite aux éclatements dus à la mastérisation", mais le dossier "affiche une véritable volonté de s'inscrire dans la réforme" et "l'offre de formation continue est articulée (voire intégrée) à l'offre de formation initiale". "La dimension sociale particulière de la population étudiante" est très bien prise en compte "en termes d'accueil mais aussi comme débouchés sur les autres métiers".

Le dossier de Rouen était "succinct", une quinzaine de pages, et ne donnait "aucune précision sur les praticiens professionnels intervenant en ESPE , ni sur l’interaction et la collaboration entre les équipes universitaires". Quant aux débouchés proposés en deuxième année de master aux étudiants qui auront échoué aux épreuves d’admissibilité, "ils ne développent qu’une dimension disciplinaire sans dimension professionnelle". Mais Rouen a engagé une réflexion "sur les filières à faibles effectifs" avec l'académie de Caen, "ce qui est très positif". Les équipes pédagogiques sont composées selon "un principe de mixité ESPE/UFR et sur des critères simples (au moins 25 % d'enseignants-chercheurs et au moins 25 % de professionnels)".

Le dossier alsacien est "de qualité", et il prévoit "un budget incitatif" pour "faire émerger une politique de recherche". Il prévoit aussi une sensibilisation des étudiants dès la licence, et organise pour partie la formation en ECTS, il aménage "une articulation avec les parcours agrégation".

"Le dossier de préfiguration de l’ESPE de Toulouse est un bilan d’étape de la réflexion actuellement conduite sur le site plus qu’un avant-projet" et "aucune proposition n’est avancée sur la structuration de l’offre de formation (seul l'existant est listé), les contenus des enseignements, les partenariats avec les autres compétences du site".

La fiche relative au projet de l'académie de Versailles est encore plus sévère. "Il n’y a pas de projet collectif (...) La question de la cohérence de l’offre au niveau académique n’est pas du tout abordée". Les administrations centrales considèrent qu' "on ne peut concevoir que [les actions de sensibilisation des étudiants en licence soient] mises en œuvre selon les choix de chacune des universités". Conclusion : "le dossier doit absolument être repris et retravaillé sur ces points avec tous les partenaires du projet".

ToutEduc n'a pu se procurer les fiches d'accompagnement des ESPE de Bordeaux, Nancy-Metz, Antilles-Guyane.

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →