Service d'accueil des élèves en cas de grève : les difficultés des municipalités et les faiblesses du dialogue social (inspections générales)
Paru dans Scolaire, Périscolaire le mardi 13 août 2013.
Mots clés : SMA, grève, collectivités, éducateurs, periscolaire, syndicats
"Unanimement, le manque évident de culture du dialogue social [dans l'Education nationale] est constaté par les différents partenaires." Le rapport sur l'accueil des élèves des écoles primaires en cas de grève, instauré par une loi de 2008, est aussi l'occasion, pour les inspections générales de l'Education nationale et de l'Intérieur, de pointer les défaillances de la gestion des ressources humaines et des organisations syndicales de ce ministère. Elles estiment que le service d'accueil instauré par Xavier Darcos est "maintenant admis et largement mis en place", même si ce n'est que par "environ un tiers des communes disposant d’au moins une école". Ce service d'accueil n'est pas, "bien que le terme soit couramment utilisé", un "service minimum" comme à la SNCF, il apparaît "comme la continuité de l’exercice du droit d’accueil, dont le caractère de service public a été reconnu par la jurisprudence notamment constitutionnelle".
La proportion des élèves accueillis "peut être estimée en moyenne entre 10 et 20%" des enfants dont les enseignants font grève, mais "avec toutefois des disparités considérables" puisque "les taux varient de 3 % à 49 % [selon les communes], sans qu’il soit possible d’établir de corrélation avec un critère démographique ou géographique". Quant aux modalités pratiques, elles varient aussi sensiblement. En ce qui concerne les personnels, la circulaire évoque "les agents municipaux, les assistantes maternelles, les animateurs d'associations gestionnaires de centre de loisirs, les membres d'associations familiales, les enseignants retraités, les étudiant s, les parents d'élèves... Dans les faits, les agents municipaux, ATSEM et animateurs, sont logiquement les plus sollicités mais, là encore, on peut rencontrer, notamment dans les communes rurales, tous les cas de figure, y compris un accueil assuré par le maire lui-même ou son épouse."
Les activités proposées varient : elles "peuvent aller de la simple garderie à des activités de centre de loisirs". La mission considère qu' "une qualification spécifique des encadrants (du type BAFA ou CAP petite enfance) [serait] de nature à augmenter la qualité et la sécurité du service", d'autant que la loi "ne fixe pas de taux d’encadrement minimal.
Compensation financière
Le rapport évoque longuement la compensation financière versée par l'Etat aux communes. Elle "reste d’un coût budgétaire modeste [qui] est amplement couvert par les retenues sur salaire", 2,6 millions en 2008 pour 31,2 millions de retenues sur salaire, et en 2011, 12,8 millions pour 22,3 (enseignement public uniquement). D'ailleurs, les maires "expriment souvent leur inquiétude de voir leur responsabilité mise en cause en cas d'accident dans le cadre du service d'accueil" alors que, "en tel cas, la responsabilité administrative de l’État se substituerait à celle de la commune".
Si la mission semble donc considérer que ce service d'accueil ne pose pas, en l'état actuel, de réels problèmes, elle n'en souligne pas moins la fragilité. "En cas de grève prolongée des professeurs des écoles, le service d'accueil pourrait se trouver en situation tendue, alors même que la demande des parents irait certainement en s'accroissant du fait des difficultés à trouver des solutions alternatives de garde dans la durée. L'organisation du service d’accueil pourrait également s'avérer particulièrement délicate en cas de grève simultanée de la fonction publique territoriale, dès lors que les communes comptent surtout sur leurs employés municipaux pour assurer le service d'accueil."
Dialogue social
Mais les difficultés tiennent surtout à l'obligation de déclaration d'intention préalable, les enseignants devant déclarer s'ils ont l'intention de faire grève de façon que la commune sache si elle doit organiser un accueil, et de quelle ampleur. Mais elle est "considérée par les syndicats comme une atteinte au droit de grève", même si elle a un caractère confidentiel. On peut d'ailleurs s'interroger sur le devenir de ces déclarations : "il s'avère que le principe de la non-conservation, admis par tous, n'a manifestement pas de traduction effective et homogène sur le territoire. Ce qui devrait être détruit dans un délai court est souvent, aux dires des intéressés, 'quelque part'."
Mais surtout, la mission s'interroge sur la qualité du dialogue social qui devrait permettre d'éviter les grèves. "Les sujets eux-mêmes de cette négociation sont souvent ailleurs (...) On peut citer à titre d'exemple des préavis de grève dans lequel la revendication était le maintien des RASED, la formation initiale et continue des professeurs des écoles, la revalorisation des enseignants ou la mise en place d'un dialogue social." L'UNSA ajoute que "le ministère tarde régulièrement à recevoir les syndicats", qu'il "délègue des représentants sans réelle autorité" et qu'il "ne présente aucune offre crédible". Résultat, "la négociation consiste donc davantage en un échange de positions (...) Il y a eu 60 négociations depuis l'entrée en vigueur de la loi. Aucune n'a abouti au niveau central."
Le rapport "La mise en place du droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire, institué par la loi n° 2008-790 du 20 août 2008" est téléchargeable sur le site du ministère, ici.