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L'Etat et la Région Ile-de-France "main dans la main" pour lutter contre les inégalités dans l'enseignement professionnel

Paru dans Scolaire le vendredi 05 avril 2013.

H. Zoughebi et F. Robine (dr)Florence Robine, rectrice de Créteil, et Henriette Zoughebi, vice-présidente de la Région Ile-de-France en charge des lycées, ont affirmé leur volonté de "travailler main dans la main" pour lutter contre "les inégalités de recrutement, de filières et de genre dans l’enseignement professionnel". Elles concluaient ensemble le 3ème atelier de l’ "Observatoire de la mixité sociale et de la réussite scolaire", hier 4 avril. L'élue demande que "la refondation permette de construire l'école à partir de ceux qui ont le plus besoin d'elle" et affirme la nécessité d' "un peu plus de coordination" entre les différentes administrations en charge de ces enfants en difficulté, par exemple avec les Départements et l'ASE (aide sociale à l'enfance). Le proviseur du lycée professionnel Hector Guimard qui accueillait l'atelier avait d'ailleurs indiqué avoir bon nombre de ses élèves qui étaient ainsi sous tutelle de la collectivité.

La rectrice a, pour sa part, souligné la complexité de la situation. La voie professionnelle est-elle une voie de relégation ou de réussite ? Dans l'académie de Rouen où elle était précédemment, "les gens se battent pour y aller". Mais, demande Henriette Zoughebi, faut-il que des jeunes fassent des formations "pressing" qui ne permettent aucune poursuite d'étude ? Ne faudrait-il pas les réserver aux adultes en reconversion ? Florence Robine fait remarquer que certaines sections, comme la productique, sont vides, alors que les besoins sont réels, mais que, pour répondre à la demande sociale, on pourrait multiplier les formations en coiffure, qui n'offrent que peu de débouchés au niveau CAP. Et si on ne doit pas répondre nécessairement à la demande, il ne faut pas non plus chercher une adéquation formation-emploi introuvable. Emmanuelle Moreno, du service des lycées de la Région, et Brigitte Colin, du rectorat de Versailles, prennent l'exemple des CAP vente. Les jeunes veulent tous aller en "vente de produits d'équipement courant", et faire des stages chez Darty ou à la FNAC. Mais les compétences qu'ils auront acquises seront aisément transférables dans d'autres domaines, moins courus, mais où ils auront plus de chances de trouver un emploi.

Florence Robine évoque "la joie de vivre dans les établissements". Le premier souci de l'Education nationale doit être "le développement personnel" des jeunes, donc éviter le décrochage, les maintenir en formation pour qu'ils aillent "au bout", au diplôme, qui seul permet que les compétences acquises soient valorisées, éventuellement dans un autre métier que le débouché immédiat prévu. Emmanuel Sulzer, chercheur au CEREQ, signale d'ailleurs que "la plus grande boulangerie d'Allemagne, c'est Mercedes", qui, pour une raison inconnue, embauche des jeunes qui ont appris à faire du pain, et non des voitures. "Il faut ruser pour que les gens soient diplômés", ajoute Jean-Claude Lafay, qui intervenait au nom de SNPDEN (le syndicat UNSA des personnels de direction), et son homologue de la CGT, Alain Vrignaud, confirme : "nous formons des gens pour 40 ans, pas pour une adéquation immédiate à l'emploi".

Mais comment lutter contre les stéréotypes de genre et améliorer l'image des formations professionnelles ? C'est dès l'école primaire que se jouent les parcours scolaires et qu'il faut agir, sans attendre les stages de découverte des métiers en 3ème, où l'on voit trop de jeunes filles dans les salons d'esthétique, souligne la rectrice, qui évoque les ambiguités de la société française. Quand on paiera 4 000 € par mois des compétences manuelles pointues, les représentations changeront. Ne faudrait-il pas aussi mêler les publics ? Daniel Pezzin, proviseur du lycée agricole Bougainville (voir ToutEduc ici) explique que lorsque les élèves de différentes voies vivent ensemble, "l'image des bacs pro change", les élèves des autres voies se rendent compte qu'ils savent faire des choses dont ils sont incapables, qu'il s'agisse de la sono ou de la gestion de la fête de l'établissement. C'est une perspective que refuse Thierry Hennique, du SNETAA (le syndicat FO de l'enseignement professionnel). Il ne veut pas de "campus des métiers" ou de lycées polyvalents, qui accueilleraient par exemple l'AFPA ou qui loueraient leurs plateaux techniques, hors temps scolaires, à des organismes privés de formation. Henriette Zoughebi confirme la volonté de la Région d'aller "vers la polyvalence", à la condition que les trois voies ne soient pas juxtaposées dans des bâtiments communs, sans passerelles, mais aussi de "garder de petits lycées", notamment professionnels.

Encore faut-il que l'enseignement professionnel ne subisse pas le mépris de l'institution elle-même. Jean-Claude Lafay calcule que les rectorats ne lui donnent pas les moyens réglementairement prévus pour son fonctionnement, ce qu'ils ne se permettraient pas de faire pour l'enseignement général et technologique.

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