Pourquoi les enfants d'enseignants sont-ils bons élèves ? (Thèse)
Paru dans Scolaire, Orientation le samedi 02 février 2013.
Le fait d’avoir au moins un parent enseignant est "l’effet parental le plus favorable de tous sur la réussite scolaire" puisqu' "’être enfant de deux enseignants ou d’un enseignant et d’un cadre produit un impact plus positif sur les performances scolaires qu’être enfant de deux cadres". Mais pourquoi ? s'est demandé Annie Da-Costa Lasne dans la thèse qu'elle a soutenue fin 2012.
D'une part, les parents enseignants "promeuvent intensément l’éclectisme et le cumul des pratiques culturelles", de façon "à former un être complet". En termes de style éducatif, ils s'appliquent "à combiner des pratiques alliant affection et contrôle, encadrement et encouragement à l’autonomie, reconnaissance des autres et estime de soi". De plus, relève l'auteure, ils "oeuvrent stratégiquement à l’optimisation de [la] réussite scolaire" de leurs enfants et installent "une remarquable continuité entre la vie scolaire et la vie familiale".
Ils font aussi un "travail permanent de prise d’informations sur le fonctionnement du système scolaire, de l’établissement et de la classe", ils connaissent les forces et les faiblesses de leur enfant et de ses enseignants. "A la différence des parents cadre(s) d’abord soucieux du climat scolaire ou de la composition sociale de l’établissement fréquenté", les parents enseignants se soucient des effectifs, de l'implication de leurs collègues, des filières sélectives et des options : " la qualité des conditions d’apprentissages prime sur celle de l’environnement social".
Au total, Annie Da-Costa Lasne évoque un "haut niveau d’investissement, tant des parents que des enfants", la "mobilisation des acteurs familiaux" et une forme de "transmission familiale".
L'auteure n'est pas assurée que cet "effet enseignant" joue pour les parents enseignant dans le premier degré aussi fortement que pour ceux qui sont en collège ou en lycée. Sa recherche, qui porte sur les niveaux à l'entrée en 6ème et en 3ème, ne lui permet pas non plus d'affirmer que cet effet se maintient au lycée et dans l'enseignement supérieur. D'autre part, la libéralisation actuelle du système scolaire, si elle se confirme, ne va-t-elle pas favoriser "les plus forts capitaux sociaux et économiques" aux dépens "des élites culturelles dont font partie les enseignants" ? En effet, "une ouverture plus grande au pouvoir décisionnel des parents pourrait renforcer l’importance des ressources financières et sociales dans l’accès aux écoles".
"La singulière réussite scolaire des enfants d’enseignants : des pratiques éducatives parentales spécifiques ?", sous la direction de Marie Duru-Bellat (université de Bourgogne)
La thèse d'Annie Da-Costa Lasne est accessible sur le site de l'université, ici.