Scolaire » Actualité

38 propositions pour endiguer les menaces et agressions contre les enseignants (rapport Sénat)

Paru dans Scolaire le jeudi 07 mars 2024.

Sur la question de la laïcité à l'école, il faut “un changement de paradigme“ estimait mercredi 6 mars le sénateur Laurent Lafont lors d'une conférence de presse de présentation des conclusions du rapport de la mission de contrôle sur le signalement et le traitement des pressions, des menaces et agressions dont les enseignants sont victimes.

38 propositions sont ainsi formulées face à la “hausse alarmante“ de la remise en cause des valeurs de la République qui se matérialisent à travers des contestations qui “ne se limitent pas aux matières traditionnellement sensibles“ (Histoire-Géographie, SVT) mais également durant les cours de sport, de littérature, de dessin... et sur tous les territoires. Le co-rapporteur (Union centriste) fait valoir qu'un quart des enseignants du secondaire dans des territoires ruraux ont constaté au moins une contestation.

A cela s'ajoute “un décalage entre le principe de laïcité voulu par l'institution et la perception par ceux auxquels il s'applique“ : les élèves la perçoivent comme étant “contre une religion“ et son côté émancipateur “est désormais placé au second rang“.

Des parents qui “souhaitent entrer dans l'école pour s'expliquer“, d'autres qui “viennent dans le bureau du proviseur avec leurs avocats“ ou qui “appellent pour connaître le contenu d'une représentation“ prévue lors d'une sortie scolaire. Que ce soit dans les secteurs public ou privé sous contrat, Jean Noël Buffet (LR), co-rapporteur de la mission sénatoriale fait état de formes variées de pression, d'agressions, allant de l'insulte misogyne, à l'agression physique, la menace (parfois terroriste “je fais lui faire une Paty“), la contestation de certains enseignements ou sanctions, d'où une forme de censure des professeurs, parfois même de résignation de ne pas pouvoir faire tout ce qu'ils devraient, ou de la part de proviseurs de voir leur établissement signalé comme “mal tenu“.

Le sénateur a en effet souligné la “terrible solitude vécue par les membres du personnel éducatif dans un quotidien marqué par de nombreuses tensions“. Son collègue Laurent Lafon explique que cela résulte d'une “histoire qui a été en partie voulue“ notamment au regard de la “liberté pédagogique“, seulement, poursuit-il, “quand on a un phénomène d'ampleur, profond et déstabilisant face auquel une personne seule ne peut faire face, même si elle peut être positive, cela peut sur certains aspect être un élément de fragilité“, d'autant que face à des réactions hostiles, les enseignants ne seraient pas “forcément formés“ pour y répondre.

Participe également à cet esprit “pas de vague“, le décalage entre “ce qui est vécu et ce qui est dit officiellement“, un manque confiance dû à une coupure entre les acteurs de terrain et les hiérarchies administratives. Par exemple, beaucoup de faits ne seraient pas déclarés et les chiffres ne seraient “que la partie émergée de l'iceberg“ car il serait très difficile de les obtenir en totalité. De même, la présentation des données par la DEPP entraînerait une “minimisation de la réalité“, la réduirait par l'utilisation de pourcentages : si seulement 0,2 % des enseignants collèges et lycées ont été menacés par arme en 2021, “ça peut paraître très faible“ explique-t-il, mais c'est une réalité importante quand on prend le chiffre brut, près de 900 enseignants touchés soit 4 faits par jour.

Dans les propositions apportées pour une “réponse ambitieuse, globale, rapide“ comme souhaitée par Jean-Noël Buffet de la part du Gouvernement, il est demandé de mieux former les enseignants à la question de la laïcité et à ses atteintes, par l'Education nationale en partenariat avec les universités (et non plus seule), en formation continue essentiellement mais aussi dès la formation initiale. Il faut aussi que les signalements d'incidents ne soient pas "pénalisants mais vus comme quelque chose de positif“ lors de l'évaluation des chefs d'établissements.

“Zones grises"

Un travail est encore à mener concernant la loi de 2004 sur les signes religieux car “20 ans plus tard nous constatons encore des difficultés à l'appliquer dans certains établissements“. Laurent Lafont indique qu'il existe “encore des trous dans la raquette à combler“, notamment pour les tenues des élèves lors de sorties scolaires (mais hors temps scolaire), la remise d'un diplôme suite à un concours, les sorties dans des salons... avec un “flou dans l'application de la loi qu'il semble nécessaire de préciser“.

Des mesures sont préconisées en matière de police et de justice, comme celle d'une protection fonctionnelle qui évolue et soit de droit quand un personnel est victime d'agression (contre un accord dans 80 % des cas aujourd'hui).

Pour les élèves perturbateurs est souhaité le développement de structures d'accueil dédiées aux élèves polyexclus, ce “qui concerne peu d'élèves mais a un impact fort sur établissement“. A donc été reprise la recommandation de Jean-Michel Blanquer qui s'était donné pour objectif de créer un établissement d'accompagnement par département, “mais nous n'y sommes pas“. Or "les cas les plus difficiles doivent être pris en compte et exclus“.

Si les parents “peuvent participer à ce qui se passe dans établissements“, cela ne peut se faire au même plan que les personnels éducatifs, il faut donc revoir la place des uns et des autres via une charte des parents qui serait “un acte“ pour qu'ils prennent connaissance des règles avec “clarté“.

La vidéo ici

Le rapport ici

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →