Surveillants et AED : mêmes fonctions, mais deux contrats (Conseil d'Etat)
Paru dans Scolaire le lundi 12 février 2024.
Mme A... enchaine pendant 18 ans des CDD de surveillante puis d'AED. De 1997 à 2009, elle est "surveillante d'externat" dans un collège et dans un lycée, puis, pendant six ans, de 2009 à 2015, elle est "assistante d'éducation" dans ce même lycée. En 2015, son contrat n'est pas renouvelé. Elle demande à être indemnisée "des préjudices qu'elle estime avoir subis" du fait du recours abusif à des CDD. Le recteur refuse, le tribunal administratif confirme la décision du recteur, la Cour administrative d'appel de Bordeaux juge abusif le recours à des CDD, mais uniquement pour la période de 2003 à 2009. Le ministère demande au Conseil d'Etat l'annulation de ce jugement. Celui-ci rejette son pourvoi.
Il rappelle que les fonctions de maîtres d'internat et de surveillants d'externat "cessent de plein droit après six ans de services effectifs", mais que, en cas de renouvellement abusif de tels CDD, le droit à une indemnisation peut être évalué comme si l'agent "avait été employé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée". Le Conseil d'Etat confirme donc le jugement de la CAA, Mme A... a bien droit à une indemnisation, mais celle-ci est calculée sur les six années pour lesquelles elle aurait pu être en CDI.
Le CE reprend là implicitement le raisonnement de la CAA qui considère que pendant les 12 premières années, l'Etat était son employeur, et qu'il n'aurait pas dû renouveler ses CDD après les six premières années, donc de 2003 à 2009. Mais à partir de 2009, c'est le lycée qui est son employeur. Bien que "les fonctions exercées étaient de même nature", le changement d'employeur fait que le recours à des CDD pendant six années, de 2009 à 2015, "ne saurait être regardé comme étant abusif". Au bout de six ans, les dispositions de "l'article L. 916-1 du code de l'éducation faisaient obstacle à ce que le chef d'établissement (...) renouvelle le dernier contrat de Mme A (...). L'administration était ainsi tenue de mettre fin aux fonctions de Mme A."
La CAA avait également rejeté l'indemnisation d'un préjudice moral. Mme A "ne pouvait ignorer" qu'elle avait été recrutée sur le poste de surveillante d'externat bien qu'elle ne remplissait pas les conditions d'âge et qu'elle ne se destinait pas à l'enseignement, "par mesure de faveur afin de la soustraire à une situation financière précaire à la suite du décès de son mari enseignant". Le Conseil d'Etat confirme donc qu'elle a droit à une indemnisation de quelque 7 000 euros alors qu'elle en demandait près de 29 000.
La décision 459446 du 6 février 2024 ici, la décision de la CAA ici