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Un accès des mineurs enfermés à l’enseignement “loin d’être à la hauteur“ selon le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (JO)

Paru dans Scolaire, Justice le jeudi 01 février 2024.

“L’enseignement dispensé aux mineurs enfermés est loin d’être à la hauteur des enjeux et s’apparente à une scolarisation par défaut, inférieure, tant en volume qu’en qualité, à la scolarisation en milieu libre“, déclare le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, dans un avis publié au JO du 31 janvier 2024.

En effet, bien qu'ils soient “peu nombreux“ au regard des élèves en milieu libre, selon Dominique Simonnot “les enfants enfermés présentent le plus de difficultés cumulées, familiales, d’addiction, de santé, leurs parcours personnels et scolaires sont généralement marqués par de nombreuses ruptures“. L'ancienne journaliste regrette d'ailleurs qu' “aucune statistique nationale n’existe sur le nombre des mineurs enfermés en âge d’être scolarisés, leurs caractéristiques, leur évolution, alors qu’elle permettrait de mieux connaitre ce public et d’identifier ses besoins.“

Durée et conditions d'enseignement

Surtout, elle alarme sur des durées hebdomadaires d’enseignement “toujours inférieures à celles théoriquement prévues : moins de 5 heures en CEF (au lieu de 25 heures d’activités prévues), 15 heures en établissement pour mineurs (au lieu de 20), 6 heures en quartier mineur de prison (au lieu de 12), durée variable mais toujours très faible en psychiatrie où aucune durée théorique n’est prévue.“ Elle explique que le temps d’enseignement, “déjà limité“ est subdivisé en raison des “contraintes inhérentes à l’organisation du lieu d’enfermement“ qui s'associe à la “nécessité de constituer des petits groupes pour tenir compte de l’âge et du niveau des jeunes“.

De plus, l’accès à un établissement scolaire extérieur “n’est mis en œuvre qu’exceptionnellement“ tandis que l’enseignement, qui suit le calendrier général, “s’interrompt totalement pendant les congés scolaires, ce qui laisse les enfants et adolescents enfermés désœuvrés". Elle souligne encore des moyens insuffisants, qu'ils soient matériels (salles de classes trop petites, manque d’équipement élémentaires) ou qu'ils permettent de passer un examen, ainsi que des difficultés pour garantir “la continuité du projet pédagogique“ des élèves, notamment concernant les documents de bilan ou de suivi. Sont enfin mentionnés la faiblesse des effectifs enseignants dans l’ensemble des lieux de privation de liberté, la faible attractivité des postes en milieu fermé ainsi que le manque d'informations à ce propos.

Eric Dupont-Moretti a répondu à ces éléments en évoquant les orientations nationales, le renforcement des enseignements en milieu fermé, ainsi que sur l'identification des profils des mineurs détenus. Le Garde des sceaux a indiqué que 8 % des mineurs incarcérés sont non francophones, que 25 % étaient scolarisés au moment de leur incarcération, 60 % sont déscolarisés depuis un an au moins (dont 38,8 % au moins deux ans) quand 9,6 % ont moins de 16 ans et “sont donc soumis à l'obligation de scolarité, correspondant au cycle 4 des niveaux d'enseignement“.

Des services “mobilisés“ pour perfectionner l'offre d'enseignement

Il assure de plus que ses services sont “mobilisés“ pour que le droit commun “s'applique en détention et au sein des CEF“, et partage l' “avis de tendre prochainement vers les 12 heures de volume horaire en quartiers pour mineurs (QM) et 20 heures en établissements pour mineurs (EPM), compte tenu des moyens en personnels dévolus à l'enseignement auprès des mineurs détenus.“

A cela s'ajoutent des “moyens importants (qui) ont été engagés pour renforcer le suivi scolaire ces trois dernières années“, permettant “une augmentation de 3 heures hebdomadaires en moyenne de suivi scolaire, et un équilibre assuré entre les filles et garçons mineurs, même s'il restent inférieurs à ceux proposés en contexte ordinaire.“ Et selon les calculs du ministre de la justice, 777 ETP ont été au total attribués par le ministère de l'Education nationale en 2022-23 , contre 755 en 2019. Parmi eux, sont comptabilisé 138 ETP, soit 18 % des moyens mobillisés auprès des mineurs incarcérés (0,8 % de la population carcérale).

Autre point, “les contenus sont adaptés aux profils des mineurs incarcérés“, ajoute Eric Dupont-Moretti, à travers “un travail réalisé sur 40 semaines en EPM et 36 en QM, avec un incitation à aller au-delà“. Et si les enseignements sont bien à l'arrêt pendant les congés scolaires, cela “n'empêche pas les mineurs concernés de devoir réaliser des travaux en cellule remis ensuite aux enseignants“.

Concernant les 26 heures d'enseignement au collège, “il faut noter que les heures d'activités sportives et d'enseignements artistiques, (..) ne sont pas comptabilisés dans les heures de formation en détention“ poursuit-il, et “il en est de même du travail sur le Parcours Avenir“ dont les éléments ne sont pas pris en compte actuellement dans les volumes de scolarisation ou de formation.

Plus globalement, le Garde des Sceaux fait valoir les orientations nationales en cours, comme la “démarche d'actualisation des projets d'établissements des EPM et des QM“ ainsi qu'une “élaboration concertée d'emplois du temps individualisés et étoffés“ comme étant un des axes de travail prioritaires. Les objectifs à atteindre et la diversité des parcours, souligne-t-il également, “conduisent à mettre en œuvre de nouvelles solutions“, accès à la plateforme du CNED ou utilisation de logiciels de remédiation pour les mineurs.

Au final, il défend des travaux menés dans une “démarche d'amélioration de l'offre d'enseignement“, avec notamment l'idée d'un “règlement intérieur type“ ou d'un “référentiel de labellisation“, sans oublier une “convention de partenariat“ signée cette année entre les deux ministères (Education nationale et Justice) destinée à favoriser un “pilotage conjoint“ des mesures mises en place.

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