Relations Ecole - Entreprises : des obstacles à franchir (rencontre organisée par le recteur d'Ile-de-France)
Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 06 décembre 2023.
En ce qui concerne la relation Ecole - Entreprises, "les choses ont changé de façon incroyable en cinq ans", estime Daniel Weizmann, président du Medef - Ile-de-France. Il était invité ce 6 décembre à une rencontre sur la "voie professionnelle" par Christophe Kerrero, recteur de la région académique qui trouve lui aussi que l' "on progresse bien". Mais si les convives, responsables de "bureaux des entreprises", doyen des IEN "voie professionnelle", conseillère du recteur, adjoint au DAFPIC (délégué académique à la formation professionnelle initiale et continue), co-fondatrice de "Myjobglasses" (ToutEduc ici), se sont tous félicité des avancées récentes dans ce domaine, ils ont aussi pointé quelques difficultés.
La relation des responsables de BDE avec les enseignants est compliquée par des questions matérielles d'emploi du temps, "on se voit entre deux portes, entre deux cours". Au-delà se pose la question de la formation des enseignants. Interrogé par ToutEduc sur la possibilité pour l'Education nationale d'envoyer un professeur, notamment un professeur de collège qui va jouer un rôle important dans l'orientation de ses élèves, vivre pendant quelques semaines la vie d'une entreprise, Christophe Kerrero estime que c'est "une nécessité", mais que c'est aussi, en termes de moyens, un choix qui revient au politique.
Mais c'est surtout l'absence de "culture de la mobilité" qui pose question. On connaît, dans les territoires ruraux, les "CAP mobylette", les cursus choisis dans un lycée professionnel non pas pour l'intérêt que le jeune y trouve, mais parce qu'il est à portée de deux roues. C'est moins connu en ville, mais pour un jeune en région parisienne, passer le périphérique, dans un sens ou dans un autre, est une difficulté. Même changer de quartier est une épreuve. Cela vaut aussi pour les adultes. Le MEDEF Ile-de-France a signé des conventions avec chacun des clubs de rugby de la Région pour mettre en relation les joueurs et les entreprises qui recrutent dans leur environnement proche. Pour le recteur, qui évoque l'animosité, voire les rixes qui opposent les jeunes de deux communes voisines, "il faut qu'on lutte contre un phénomène délétère, il en va de la cohésion républicaine". Mais ce qui est difficile pour les jeunes, pour leurs parents, l'est aussi pour les chefs d'établissement dont la responsabilité est engagée lors des déplacements d'élèves.
Autre difficulté, l'organisation des stages ou des PFMP (périodes de formation en milieu professionnel) dont la temporalité devrait dépendre du métier envisagé. En maintenance, il vaudrait mieux un stage fractionné, de courtes périodes plus fréquentes, mais dans le bâtiment, pour suivre une réalisation du début à la fin, il faut des périodes longues. Pour le lycée, cela signifie que l'élève part huit semaines, plus, en général, deux semaines de vacances, pas loin d'un trimestre pendant lequel le lycée ne voit pas l'élève.
Encore faut-il que l'élève trouve dans l'entreprise un salarié qui ait envie de transmettre. Ce n'est pas toujours le cas. Et du côté des élèves, il faut oser. Emilie Korchia (Myjobglasses) souligne qu'ils ont souvent "peur des professionnels" qu'ils placent "sur un piédestal". Ils sont étonnés que quelqu'un leur "consacre du temps", et "ils se mettent des barrières". D'où l'importance des échanges entre jeunes, qui peuvent partager leur expérience. D'où l'importance aussi, pour la découverte des métiers à partir de la 5ème, de diversifier les intervenants, représentants de grands groupes ou de PME.