Hommage aux victimes du terrorisme : les enseignants doivent s'abstenir de toute récupération (Conseil d'Etat)
Paru dans Scolaire le dimanche 15 octobre 2023.
Un enseignant, professeur de mathématiques dans un lycée "a tenu devant ses élèves, le 27 novembre 2015, jour de l'hommage national aux victimes des attentats du 13 novembre 2015, des propos politiques et homophobes constitutifs de graves manquements aux devoirs de réserve et de neutralité". Il s'est vu infliger une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de six mois. A sa demande, le tribunal administratif de Versailles annule cette sanction qu'il juge "illégale" au motif "de son caractère disproportionné". Il est réintégré dans ses fonctions "de sorte que la période d'éviction s'est étendue du début du mois d'août à la fin du mois d'octobre 2016, soit trois mois". Il demande alors "à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 21 359,91 euros (...) en réparation des préjudices moral et financier qu'il estime avoir subis en raison de l'illégalité de la sanction dont il a fait l'objet" (puisqu'il n'a pas perçu son salaire durant trois mois, ndlr).
Le TA rejette cette deuxième demande, décision confirmée par la Cour d'appel de Versailles qui estime que, "compte tenu de la gravité des faits reprochés au requérant, l'administration aurait pu légalement prendre une sanction emportant les mêmes effets sur sa rémunération". Pour le dire autrement, la sanction était illégale parce que trop sévère, mais elle ne l'aurait pas été si elle avait été de trois mois. Elle estime donc que le préjudice allégué par l'enseignant "du fait de la perte de revenus au cours de sa période d'éviction ne présentait pas un lien de causalité direct avec l'illégalité" de la sanction prononcée.
Le Conseil d'Etat confirme la décision de la CAA. Il considère qu' "un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre", mais il ajoute que "le juge peut rechercher si (...) une sanction emportant les mêmes effets, aurait pu être légalement prise par l'administration". Compte tenu de la gravité des faits reprochés à cet enseignant, "l'administration aurait pu légalement prendre une sanction emportant les mêmes effets sur sa rémunération".
La décision 462580 du 13 octobre 2023 (ici)