Gabriel Attal défend ses réformes devant les sénateurs
Paru dans Scolaire le jeudi 12 octobre 2023.
“J'entends que pour un certain nombre d'enseignants c'est encore difficile“, faisait valoir Gabriel Attal concernant la rémunération des enseignants, mercredi 11 octobre en fin d'après-midi lors de sa première audition par la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat.
Le ministre de l'Education nationale n'a pas réaffirmé que le sujet était “clos“, mais a plutôt évoqué le “chemin parcouru“ avec 400 euros de revalorisation en 3 ans, un effort porté sur plus de 800 000 professionnels et qui “effa(ce) en grande partie une génération de déclassement salarial pour nos professeurs“.
Le débat très “médiatique“ suscité après l'annonce de l'interdiction du port de l'abaya étant retombé, Gabriel Attal considère qu'en matière de laïcité, le Conseil d'Etat a confirmé qu'il “ne faisai(t) qu'appliquer la loi de 2004“, et se dit “très satisfait de la manière dont cette mesure a été appliquée“. Il fait état de quelque 1 000 contestations à la règle la première semaine de rentrée des classes, ce qui sous-entend qu'une bonne partie des élèves concernés s'était déjà conformée à cette disposition, et qu'ensuite les situations se sont réglées facilement, car “quand il y a de l'humain, on arrive à gérer des situations tendues“. Il souhaite avancer sur une refondation de l'Education morale et civique (EMC), évoquant à ce titre une enquête révélant qu'un enseignant sur deux s'autocensurerait, notamment au sujet de contestations à la laïcité de la part de certains élèves.
Le ministre de l'EN estime également qu'il faut une “profonde réforme“ de la formation initiale des enseignants, car elle serait le “levier essentiel“ pour l'élévation du niveau des élèves, mais aussi pour le bien-être des enseignants et pour l'attractivité du métier. D'ailleurs, il ne “croi(t) pas du tout à une crise des vocations“, au contraire il y en aurait davantage qu'auparavant, mais la crise d'attractivité serait mondiale, et liée à une perte “du respect de l'autorité de l'enseignant“, mais aussi “des savoirs dans nos sociétés“ dont les enseignants sont la première expression. De quoi rappeler que selon lui, la relation élève-professeur n'est pas “d'égal à égal, il y a celui qui sait et celui qui apprend“.
En outre, seulement 20 % des enseignants seulement “se disent suffisamment formés à la gestion de la classe“, et ils sont formés au niveau Master, passent un concours à bac+5, avec une année de Master 2 “trop chargée“ en cumulant de l'alternance, des cours, un mémoire.. ce qui réduit le vivier, d'autant que beaucoup démissionnent et ne sont pas titularisés. L'ambition serait donc “de créer les écoles normales du XXIè siècle, avec la possibilité d'avoir un concours positionné avant le bac+5, y compris des bac+3 et ensuite d'avoir une entrée progressive dans le métier qui permet de garder le niveau master“, tandis qu'une partie des recrutements “pourraient être faits par pré-recrutement dès le niveau bac“.
Au sujet de la formation continue des enseignants, Gabriel Attal “assume ce choix de la positionner en dehors des heures de cours pour limiter au maximum les heures perdues“, et mieux, cette décision “peut être une opportunité“ pour en améliorer le recours, alors qu'elle concernerait moins d'un enseignant sur deux au collège et à peine plus d'1 sur 3 au lycée. La question serait donc organisationnelle, les enseignants souhaitant “des modules plus courts, sécables, en hybride, sur site, dans l'établissement, en collectif avec (leurs) collègues“. La mise en place concernerait 30 % des formations depuis la rentrée, 50 % en janvier 2024 et 100 % à la prochaine rentrée afin de pouvoir “laisser le temps aux EAFC, à Canopée de déployer leur offre et de la réadapter“.
“Rénovation“. En termes d'attractivité, il est par ailleurs question du déroulement et de la progression de la carrière, avec “un sujet pour l'administration EN à permettre aux enseignants d'identifier et de valoriser et de certifier des compétences acquises par l'enseignement“. Car “aujourd'hui vous échangez avec des jeunes, assez peu disent qu'ils se voient faire le même métier toute leur vie, pourquoi est-ce qu'il en serait différemment pour l'EN ?“ Il faut donc ne pas renvoyer l'idée que ces jeunes “ne pourront pas faire autre chose si ils en ont envie à un autre moment dans leur vie“, sachant qu'a priori pour des employeurs privés ou public “quelqu'un qui a géré une classe de collège pendant 15 ans, en termes de résilience, de capacité à s'adapter, de compétences acquises, évidemment qu'il a beaucoup de choses à valoriser s'il veut faire autre chose“.
Gabriel Attal fait encore valoir que les difficultés en matière d'affectations et de mutations peuvent être un frein pour certains futurs enseignants qui dès lors préfèrent être contractuels. Il faudrait “trouver un système qui permette de dire à un enseignant : si vous acceptez telle affectation, telle mutation, on vous donne la garantie qu'au bout de 3, 5 ans vous aurez la possibilité d'un retour dans votre académie, et peut être que ça permettra de faciliter les choses“.
Concernant le souhait d' “élever le niveau“ des élèvesle ministre de l'EN estime qu'il ‘existe ‘beaucoup de rapports, d'audits“ et que “maintenant il est peut-être temps de concrétiser tout ça“, c'est à dire “faire des propositions opérationnelles“. Il attend d'ici 8 semaines celles la mission qu'il a mandatée à ce sujet.
Pour les Mathématiques plus précisément, il estime encore que nous ne sommes “pas du tout au bout de ce qu'il faut faire pour redresser le niveau dans notre pays“, invitant “à agir dans le 1er degré, au collège, peut-être au lycée.“ D'où l'idée de “groupes de compétence“ (en Français et en Maths) au collège, “ce qui a déjà commencé à être fait puisque pour l'heure supplémentaire à la place de l'heure de techno en Français et Maths on fonctionne par groupes de compétences“. Mais faut-il garder des groupes aussi hétérogènes dans les classes ? demande-t-il, tout en affirmant ne pas vouloir revenir sur le collège unique ni à des classes de niveau. Pourtant, il rappelle que le SNALC avait fait il y a quelques années des propositions de “collège modulaire“, et a donc “demandé à la mission de regarder ce sujet-là“.
Pour la médecine scolaire, qui a “une vraie difficulté d'attractivité puisque les postes sont là mais pas pourvus“, il faut “inventer de nouvelles manières de travailler, faire coopérer davantage les établissements scolaires avec la médecine de ville et les établissements de santé“. Si cela sera plus long pour avoir de nouveaux médecins, pour les infirmières scolaires un “levier d'attractivité“ serait, alors qu'aujourd'hui ce n'est pas possible, de pouvoir “cumuler“ si elles le souhaitent avec cette activité avec une autre, “libérale“ à côté de cet emploi.
“Oui il y a un manque de places en IME." L'école inclusive a été longuement évoquée, et Garbiel Attal explique que beaucoup d'enseignants lui “disent qu'ils se sentent dépassés“. Ont ainsi été expliqués les PAS qui remplacerons les PIAL pour pouvoir notamment “faire intervenir des personnels du médico-social auprès des enseignants et des PE“. Mais il faut renforcer aussi les heures de scolarité dans les établissements médico-sociaux, car aujourd'hui des familles ont un accueil en IME ou en ITEP prescrit par la MDPH souhaitent que l'enfant aille à l'école parce qu'il y a plus d'heures de cours“.
A noter également que le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FSDAP) sera maintenu pour l'année 2023-24 et qu'un “dialogue“ sera ouvert avec les élus pour son évolution à compter de la prochaine rentrée.
Quant aux élèves qui effectueront un SNU avec leur classe de seconde, ils seront dispensés de stage, et auront une “proposition d'accompagnement à un autre moment“. Enfin, 126 cités éducatives qui arrivent à échéance en 2023 et 2024 seront relabellisées d'un bloc.
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